[CRITIQUE/RESSORTIE] : L'Échelle de Jacob
Réalisateur : Adrian Lyne
Acteurs : Tim Robbins, Elizabeth Peña, Danny Aiello, Matt Craven,...
Distributeur : Les Acacias
Budget : -
Genre : Drame, Épouvante-horreur, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h53min.
Date de sortie : 16 janvier 1991
Date de ressortie : 17 décembre 2025
Synopsis :
Jacob Singer, un employé des postes new-yorkaises, est assailli par de nombreux cauchemars durant ses journées. Il voit des hommes aux visages déformés et se retrouve dans des lieux qu'il ne connaît pas. Jacob est victime des flashbacks incessants de son premier mariage, de la mort de son fils et de son service au Vietnam. Jours après jours, Jacob s'enfonce dans la folie en essayant de comprendre ce qui lui arrive avec l'aide de Jezebel, son épouse.
Considéré comme l'un, si ce n'est LE, pape du drame/thriller érotique des 80s/90s (pas une couronne que beaucoup de cinéastes se sont battus à avoir, certes), Adrian Lyne a néanmoins su composer une véritable anomalie, un pur cauchemar sur pellicule au milieu de ses explorations des vérités rugueuses et sensuelles d'unions romantico-troubles : L'échelle de Jacob aka Jacob's Ladder, complément édifiant aux monuments Voyage au bout de l'enfer de Michael Cimino et Rambo de Ted Kotcheff, vraie oeuvre politique replaçant l'Amérique face à sa responsabilité et le malaise de son traitement des vétérans de guerre, au plus près du calvaire surréaliste d'une âme traumatisée dont les séquelles, impossibles à guérir, le font glisser lentement mais sûrement vers la folie.
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| Copyright © Rialto Pictures/Studiocanal/Les Acacias |
Odyssée fiévreuse et labyrinthique d'un homme perdant progressivement le contrôle sur son existence, incapable de déceler les différences entre une réalité morcelée et l'expression infernale de ses peurs et de ses démons intérieurs, symbolisés sous des formes abstraites, difformes et terrifiantes (Kojima et ses Silent Hill lui doivent beaucoup), le film disséque avec puissance comment la guerre, dont les souvenirs sont impossibles à dissiper pour ceux ayant survécus - physiquement - à son horreur, peut venir ronger un esprit jusqu'à le dépouiller de sa raison, l'enfermer dans une prison mémorielle et psychologique où il ne peut se fier à rien ni personne, pas même à lui-même.
Faisant savamment fit de la prévisibilité de son édifice narratif (c'est, une fois encore, le voyage tortueux et cauchemardesque qui compte, pas sa destination, même si le dit voyage se pense peut-être plus malin qu'il ne l'est réellement, même s'il a le bon ton de toujours interroger et de laisser plusieurs questions en suspens), tout en voguant à vue sur des terres qui lui étaient encore inconnues (l'horreur psychologique et surréaliste à la David Lynch, voire même le body horror citant gentiment David Cronenberg), Lyne compose une oeuvre protéiforme, entre le thriller psychologico-horrifique aux questionnements existentialo-bibliques sur les notions de vie et de mort, le drame subversif et paranoïaque à l'atmosphère étouffante, et la quête identitaire angoissée et angoissante d'une âme perdue dans les limbes (Angel Heart n'est d'ailleurs jamais trop loin).
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Subtil et ambiguë, sombre et intense, totalement suspendu à la performance halluciné et hallucinante d'un Tim Robbins magistral, L'Échelle de Jacob est une merveille de séance déstabilisante et pessimiste ou le cinéaste fout un gros coup de pied au derrière de son Alice/Jacob, pour la catapulter au fond du terrier des enfers où aucune issue n'est possible.
Toujours une claque, même trente-cinq ans plus tard...
Jonathan Chevrier



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