[CRITIQUE] : Bernie
Réalisateur : Richard Linklater
Acteurs : Jack Black, Shirley MacLaine, Matthew McConaughey, Brady Coleman,...
Distributeur : ExtraLucid Films
Budget : -
Genre : Comédie, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h36min.
Synopsis :
À Carthage, petite bourgade du Texas, dans les années 1990, Bernie Tiede, assistant croque-mort est aimé de tous les habitants. Véritable maître de l’embaumement et des animations d’enterrements, chanteur hors pair, Bernie va se lier d’amitié avec Marjorie Nugent, une riche veuve, à l’inverse, détestée car désagréable. Très vite, ils deviennent inséparables, voyagent à travers le monde et ne peuvent plus se passer l’un de l’autre. Mais la vieille femme possessive maintient Bernie sous son emprise jusqu’à ce qu’il l’assassine pour s’en libérer...
Critique :
À l'image du cinéma de Cameron Crowe (qui, cependant, ne se satisfait pas toujours d'être en marge du système), avec qui il partage plusieurs points communs loin d'être anecdotiques, il y a quelque chose de profondément magique dans la filmographie du conteur fantastique qu'est Richard Linklater, tant il s'échine continuellement à catapulter son auditoire dans des univers richement authentiques, souvent inspirés de sa propre existence.
Des films au formalisme sobre mais palpable, qui sont moins intéressés par leurs intrigues où des objectifs narratifs bien précis, qu'incarner de vrais instantanés réalistes, des explorations frappées de détails presque anthropologiques, visant à faire ressentir au spectateur que c'était que d'être en vie aux côtés des personnages, à un certain endroit et/où à une certaine époque.
De vrais morceaux de vies retranscrivant à la perfection les nuances et l'universalité du quotidien, au travers de personnages aussi furieusement empathiques qu'ils nous semblent toujours réels.
En attendant de le voir s'attaquer à la Nouvelle Vague avec son prochain long-métrage (sobrement intitulé Nouvelle Vague, pourquoi s'emmerder ?), qui s'attachera au tournage du chef-d'œuvre A Bout de souffle de Jean-Luc Godard, aux origines du mouvement, place à une sortie - vraiment - tardive, l'inédit Bernie (tourné avant Before Midnight), petite merveille de comédie dramatico-policière qui marquait la réunion entre le cinéaste et Black huit ans après l'excellent Rock Academy.
Mise en images à la légèreté/simplicité trompeuse de l'affaire Bernhardt "Bernie" Tiede (soit Bernhardt Tiede, employé de pompes funèbres apprécié de la petite communauté de Carthage au Texas, qui a tiré sur Marjorie Nugent, une riche veuve pas particulièrement appréciée de 81 ans, avant de l'envelopper dans un drap blanc et la mettre dans un congélateur), qui a totalement retourné l'opinion populaire (qui soutenait passionnément son acquittement malgré sa culpabilité évidente), le film oscille entre la comédie - qui n'en est pas totalement une - sauce frangins Coen (on pense même au mésestimé Cookie's Fortune de Robert Altman), le drame sous fond de reconstitution policière et le mockumentary débridé voire folklorique, nourrit par des témoignages hilarants de vrais habitants de Carthage.
Un cocktail en apparence indigeste mais qui trouve une sorte d'équilibre fou et miraculeux à l'écran, Linklater dédramatisant tout du long l'horreur du réel tout en jouant avec l'image adorable du meurtrier, pour mieux dresser une réflexion lucide et pleine de mordant sur l'Amérique profonde, de son manque d'acceptation face à l'atrocité qui nourrit son quotidien comme ses fondements, à son homophobie exacerbé, en passant par la dichotomie réelle entre le pouvoir juridique et l'opinion populaire qui la réfute et où l'adapte selon ses critères.
Désinvolte sans jamais ridiculiser ni son histoire ni ses sujets (le cinéaste n'a aucune intention condescendante de reconstruire la réalité, son Bernie Tiede n'est que celui créé par Carthage et ses citoyens, la " légende " derrière l'histoire qu'ils ont choisit de conter pour supplanter la réalité), complexe tout en refusant toute étude psychologique de sa figure centrale (ce qui renforce le malaise et l'ambiguïté derrière son crime), Bernie ne serait cela dit rien sans la partition absolument délirante de son trio vedette : Jack Black (sans doute la plus belle prestation de sa carrière, avec celui de Nick Vanderpark dans l'excellent Envy de Barry Levinson), Shirley MacLaine (savoureusement vacharde) et du caméléon Matthew McConaughey (qui venait d'entamer son incroyable come-back/remontada Hollywoodienne).
Tout en nuances et avec une ironie complice, Richard Linklater nous prouve que la folie étrange de la réalité dépasse un peu trop souvent celle de la fiction.
On le croit sur parole et, surtout, sur pellicule.
Jonathan Chevrier
Acteurs : Jack Black, Shirley MacLaine, Matthew McConaughey, Brady Coleman,...
Distributeur : ExtraLucid Films
Budget : -
Genre : Comédie, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h36min.
Synopsis :
À Carthage, petite bourgade du Texas, dans les années 1990, Bernie Tiede, assistant croque-mort est aimé de tous les habitants. Véritable maître de l’embaumement et des animations d’enterrements, chanteur hors pair, Bernie va se lier d’amitié avec Marjorie Nugent, une riche veuve, à l’inverse, détestée car désagréable. Très vite, ils deviennent inséparables, voyagent à travers le monde et ne peuvent plus se passer l’un de l’autre. Mais la vieille femme possessive maintient Bernie sous son emprise jusqu’à ce qu’il l’assassine pour s’en libérer...
Critique :
Désinvolte sans jamais ridiculiser ni son histoire ni ses sujets, complexe tout en refusant toute étude psychologique de sa figure centrale ambiguë, #Bernie est un bijou de comédie dramatico-folklorique sauce docu-fiction, dominé par un incroyable trio Black/MacLaine/McConaughey. pic.twitter.com/y7RHg1JFtX
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 9, 2025
À l'image du cinéma de Cameron Crowe (qui, cependant, ne se satisfait pas toujours d'être en marge du système), avec qui il partage plusieurs points communs loin d'être anecdotiques, il y a quelque chose de profondément magique dans la filmographie du conteur fantastique qu'est Richard Linklater, tant il s'échine continuellement à catapulter son auditoire dans des univers richement authentiques, souvent inspirés de sa propre existence.
Des films au formalisme sobre mais palpable, qui sont moins intéressés par leurs intrigues où des objectifs narratifs bien précis, qu'incarner de vrais instantanés réalistes, des explorations frappées de détails presque anthropologiques, visant à faire ressentir au spectateur que c'était que d'être en vie aux côtés des personnages, à un certain endroit et/où à une certaine époque.
De vrais morceaux de vies retranscrivant à la perfection les nuances et l'universalité du quotidien, au travers de personnages aussi furieusement empathiques qu'ils nous semblent toujours réels.
Copyright ExtraLucid Films |
En attendant de le voir s'attaquer à la Nouvelle Vague avec son prochain long-métrage (sobrement intitulé Nouvelle Vague, pourquoi s'emmerder ?), qui s'attachera au tournage du chef-d'œuvre A Bout de souffle de Jean-Luc Godard, aux origines du mouvement, place à une sortie - vraiment - tardive, l'inédit Bernie (tourné avant Before Midnight), petite merveille de comédie dramatico-policière qui marquait la réunion entre le cinéaste et Black huit ans après l'excellent Rock Academy.
Mise en images à la légèreté/simplicité trompeuse de l'affaire Bernhardt "Bernie" Tiede (soit Bernhardt Tiede, employé de pompes funèbres apprécié de la petite communauté de Carthage au Texas, qui a tiré sur Marjorie Nugent, une riche veuve pas particulièrement appréciée de 81 ans, avant de l'envelopper dans un drap blanc et la mettre dans un congélateur), qui a totalement retourné l'opinion populaire (qui soutenait passionnément son acquittement malgré sa culpabilité évidente), le film oscille entre la comédie - qui n'en est pas totalement une - sauce frangins Coen (on pense même au mésestimé Cookie's Fortune de Robert Altman), le drame sous fond de reconstitution policière et le mockumentary débridé voire folklorique, nourrit par des témoignages hilarants de vrais habitants de Carthage.
Un cocktail en apparence indigeste mais qui trouve une sorte d'équilibre fou et miraculeux à l'écran, Linklater dédramatisant tout du long l'horreur du réel tout en jouant avec l'image adorable du meurtrier, pour mieux dresser une réflexion lucide et pleine de mordant sur l'Amérique profonde, de son manque d'acceptation face à l'atrocité qui nourrit son quotidien comme ses fondements, à son homophobie exacerbé, en passant par la dichotomie réelle entre le pouvoir juridique et l'opinion populaire qui la réfute et où l'adapte selon ses critères.
Copyright ExtraLucid Films |
Désinvolte sans jamais ridiculiser ni son histoire ni ses sujets (le cinéaste n'a aucune intention condescendante de reconstruire la réalité, son Bernie Tiede n'est que celui créé par Carthage et ses citoyens, la " légende " derrière l'histoire qu'ils ont choisit de conter pour supplanter la réalité), complexe tout en refusant toute étude psychologique de sa figure centrale (ce qui renforce le malaise et l'ambiguïté derrière son crime), Bernie ne serait cela dit rien sans la partition absolument délirante de son trio vedette : Jack Black (sans doute la plus belle prestation de sa carrière, avec celui de Nick Vanderpark dans l'excellent Envy de Barry Levinson), Shirley MacLaine (savoureusement vacharde) et du caméléon Matthew McConaughey (qui venait d'entamer son incroyable come-back/remontada Hollywoodienne).
Tout en nuances et avec une ironie complice, Richard Linklater nous prouve que la folie étrange de la réalité dépasse un peu trop souvent celle de la fiction.
On le croit sur parole et, surtout, sur pellicule.
Jonathan Chevrier