[CRITIQUE] : L'Élue
Réalisateur : Osgood Perkins
Acteurs : Tatiana Maslany, Rossif Sutherland, Erin Boyes, Birkett Turton,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Epouvante-horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h39min.
Synopsis :
Liz et Malcolm partent pour un week-end romantique dans un chalet coupé du monde. Lorsque Malcolm doit retourner précipitamment en ville pour son travail, Liz se retrouve isolée, confrontée à une présence maléfique qui révèle les terrifiants secrets du chalet.
“ You know, Minister, I disagree with Dumbledore on many counts...but you cannot deny he's got style ”.
Cette réplique que les fans d'Harry Potter n'auront pas eu de mal à reconnaître (le cinquième tome, L'ordre du Phoenix, les vrais savent), pourrait totalement s'appliquer au rejeton d'Anthony Perkins, le faiseur de cauchemars Osgood Perkins - étrangement prolifique sur les deux dernières années - et à son cinéma, qu'on a laissé sur la double réception divisée de Longlegs comme de The Monkey (un Destination Finale glorieusement kitsch et sarcastique as hell, à la narration assez superficielle mais au sadisme accrocheur).
Sans surprise, et parce que le bonhomme a toujours cherché - plus où moins habilement, certes - à jouer avec les attentes de ses spectateurs tout en jonglant (encore une fois, plus où moins adroitement) avec les genres, son dernier effort en date, L'Élue aka Keeper, suit scrupuleusement la même lignée en poussant le bouchon du vice d'une manière encore plus provocante que par le passé, quitte a gentiment largué le spectateur le moins endurant à ses habitudes.
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| Copyright Metropolitan FilmExport |
Arpentant, tout comme ont pu le faire ses derniers mois Companion et Together, le terrain sinueux de l'auscultation de la nature même d'une relation toxique, au détour d'une union de deux âmes aux maladresses complémentaires (Liz et Malcolm, qui a fait rompre à la première quasiment tous ses liens, et qui décident de s'offrir une petite escapade boisée), Perkins choisit néanmoins moins l'expression d'une narration presque prétexte (mais surtout méchamment chaotique), que celle d'une mise en scène chirurgicale qui installe subtilement les fruits empoisonnés de la discorde et de la désorientation, un glissement vers l'onirisme à coups de cadres étranges et inhabituels, de sequences volontairement troubles, floues, et d'une gestion folle de l'architecture de sa maitre unité de lieu.
Jeu de dupes d'un cinéaste perdu dans son statut de sale gosse qui se rêve plus malin qu'il ne l'est, où belle expression d'un éclectisme qui laisse la porte ouverte à mille et une possibilités, même les plus improbables ?
L'ambiguïté est totale et Perkins tient longtemps son pari de ne pas sombrer facilement dans les bras d'une horreur classique et conventionnelle (quitte à décontenancer, voire à paraître complaisant dans sa propension à ne jamais donner de réponses claires et/où satisfaisantes), privilégiant l'immédiateté d'une expérience viscérale à celle d'un vertige qui s'immisce lentement mais sûrement dans la psyché, totalement vissé sur la prestation tout aussi puissante et vulnérable d'une Tatiana Maslany qui s'éloigne savamment du cliché facile, de la femme - littéralement - au bord du gouffre.
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Perkins joue de et avec ses émotions, se nourrit des imperfections de son personnage pour façonner un malaise constant et captivant, pour façonner une oeuvre brute de décoffrage et sensiblement inaboutie, une oeuvre du ressentie qui ne donne pas toutes ses clés à son auditoire.
Le symbole, au fond, d'un cinéaste pas toujours plaisant à suivre mais qui ose (et ils sont rares aujourd'hui, et encore plus au coeur du giron horrifique américain), ne cherche jamais à plaire à tout le monde quitte à lui-même, saboter ses freins pour foncer droit dans le mur.
La singularité agace parfois (souvent), mais reste essentielle dans la - dense - production cinématographique actuelle.
Jonathan Chevrier



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