[CRITIQUE] : Love me tender
Réalisatrice : Anna Cazenave Cambet
Acteurs : Vicky Krieps, Antoine Reinartz, Monia Chokri, Viggo Ferreira-Redier,...
Distributeur : Tandem
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 2h13min.
Synopsis :
Une fin d’été, Clémence annonce à son ex-mari qu’elle a des histoires d’amour avec des femmes. Sa vie bascule lorsqu'il lui retire la garde de son fils. Clémence va devoir lutter pour rester mère, femme, libre.
Librement adapté de l’ouvrage de Constance Debré (Editions Flammarion, 2020).
Quand bien même les deux films ne voguent pas sur les mêmes voies cinématographiques, difficile de ne pas nouer quelques points de concordances (au-delà de la présence à la distribution, de l'indispensable - et définitivement partout - Monia Chokri) entre les récents Des preuves d'amour d'Alice Douard et Love me tender d'Anna Cazenave Cambet (librement inspiré du roman éponyme de Constance Debré), dans leur manière d'aborder avec délicatesse la notion de maternité au détour du jugement social qu'elle peut susciter, tout en explorant dans le même mouvement, les incertitudes et les doutes face aux bouleversements qu'elle impose, et encore plus au détour de figures féminines dont le quotidien est déjà passablement troublé.
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| Copyright Tandem Films |
Comme cette vie jadis plus structurée avec laquelle le personnage de Clémence a voulu rompre, par nécessité plus que par choix, des années de carrière d'avocate de renom pour finalement se consacrer à l'écriture (une carrière certes plus épanouissante mais surtout bien plus précaire), des années d'un mariage insatisfaisant qui jusqu'ici se transformait en une séparation cordiale, avant que ses envies d'indépendance - notamment sexuelle - ne viennent rabattre les cartes, ne viennent remettre en cause son statut de mère (qu'elle doit à nouveau " prouver ", presque comme son propre droit d'exister).
Ou comment les rancunes d'un ancien conjoint manipulateur condamne dès le départ, une envie légitime et tout simplement humaine de vouloir refaire sa vie, en ramenant continuellement le passé dans la balance de la reconstruction vulnérable d'une indépendance et d'une identité queer.
C'est ce double combat, à la fois celui pour retrouver la garde partagée de son jeune fils de huit ans (face à une mécanique bureaucratique et judiciaire qui retarde continuellement la résolution du conflit) et l'autre, plus insidieux, qui se niche à travers lui (son affirmation pleine et authentique d'elle-même et de son homosexualité, jamais ouvertement jugée comme néfaste pour l'éducation de la chair de sa chair, mais douloureusement considéré comme tel), qui sert de corps à ce beau et concis portrait de femme discriminée mais résiliente, qui refuse de se renier ni de renoncer à qui elle est, qui refuse de se laisser briser par les contraintes comme les standards d'une société patriarcale hypocrite et aux préjugés homophobes.
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Parce qu'elle n'aime pas comme les autres le voudrait, parce qu'elle résiste au lieu de se soumettre, parce qu'elle veut rester une mère (quand bien même tout ce processus judiciaire rend de plus en plus insignifiante son impact dans la vie de son fils) tout en conservant sa propre identité.
Dénué d'élans mélodramatiques et émotionnels superflus et/où putassiers, même si frappé par quelques aspérités dispensables (comme cette voix-off, cohérente avec le statut d'autrice de Clémence dont le livre se nourrit de sa propre histoire, mais le procédé s'avère finalement plus plombant qu'autre chose), totalement vissé sur la prestation tout en justesse er retenue d'une Vicky Krieps incroyable, Love me tender se fait un merveilleux drame psychologique sur la nécessité de résister pour exister comme pour s'affirmer.
L'une des séances les plus indispensables du moment.
Jonathan Chevrier



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