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[CRITIQUE] : Barbes, Little Algérie

Réalisateur : Hassan Guerrar
Acteurs : Sofiane ZermaniKhalil Gharbia, Khaled BenaissaEye Haïdara,...
Distributeur : Jour2Fête
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Français.
Durée : 1h33min.

Synopsis :
Malek, la quarantaine, célibataire, vient d’emménager à Montmartre et accueille bientôt chez lui son neveu Ryiad fraîchement arrivé d’Algérie. Ensemble ils découvrent Barbès, le quartier de la communauté algérienne, très vivant, malgré la crise sanitaire en cours. Ses rencontres avec les figures locales vont permettre à Malek de retrouver une part de lui qu’il avait enfouie, de renouer avec ses origines et de commencer à faire le deuil de ses disparus.




Critique :



Qu'ils soient d'une flamboyante réussite ou proprement insipides, les premières réalisations sont toujours plus ou moins frappées par le sceau rafraîchissant de la nouveauté, de cette petite excitation face à la possibilité de découvrir l'un des potentiels grands cinéastes de demain.

Figure reconnue et respectée, Hassan Guerrar, jadis l'un des attachés de presse les plus influents du milieu du septième art hexagonal, passe de l'autre côté du rideau magique et s'essaye donc à la réalisation avec, force est de l'admettre, un sacré bon cru.

Copyright EAST FILMS - 2425 FILMS - CHELI FILMS

Beau baptême du feu, Barbès, Little Algérie est marqué par son choix loin d'être anodin d'arrimer la narration sur une frange de son propre vécu en tant que franco-algérien dans une France qui, quoiqu'on en dise, se radicalise de plus en plus (avec une décontraction proprement effrayante), marqué par sa volonté de la catapulter au coeur d'un quartier qu'il connaît bien : Barbès, quartier vivant et chaleureux où le vivre-ensemble n'est pas qu'une simple illusion, et plus directement sur la dynamique de la communauté algérienne qui y réside.

Chronique d'une existence dans un microcosme à deux pas d'un Paris bourgeois méprisant, frappé autant par la galère, la précarité et une violence arbitraire que par une solidarité, une fraternité hors du commun, une " vie de quartier " dont le wannabe cinéaste est décidé à en conter la vérité dans son authenticité la plus simple, capturant son essence multiculturelle dans un désir de rendre compte des règles et autres dilemmes intimes et complexes qui la font vivre; le film est à la fois léger et grave, dur et solaire, d'autant qu'il nous ramène à une époque pas si lointaine où le contexte sanitaire difficile dû au Covid-19, usait plus que de raison une humanité déjà fragile.

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L'histoire, c'est autant celle de Barbès, de sa communauté comme que de Malek, célibataire fraîchement dans la quarantaine (un brillant Sofiane " Fianso " Zermani) et récent résident à Montmartre, qui accueille chez lui son jeune neveu, Ryiad, qui débarque tout droit de l'Algérie.
Deux poissons hors de l'eau, ils vont découvrir ensemble la bouillonnante Barbès et sa communauté algérienne, dont la vie reste sensiblement active même sous le joug d'une crise sanitaire qui bat douloureusement son plein.
Un univers qui va permettre à l'aîné, au gré des rencontres et d'aléas plus où moins heureux, d'entamer un parcours rédempteur salutaire.

Autant comédie sociale complice que drame familialo-urbain à la densité étonnante, qui frappe par son immédiateté énergique, Barbès, Little Algérie prend le pouls d'un Paris interlope et désenchanté, et tire sa puissance d'une narration qui a le bon ton d'incarner d'un double portrait grisant, celui pétillant et lucide d'une communauté indubitablement couplée à celui plus intime d'un personnage entamant sa propre voie vers une maturité essentielle, au moment même où la capitale (la France ?) se déchire, se redessine et se déconstruit.

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Émotionnellement fort, bardé de personnages attachants, le film se fait une méditation à la fois douce-amère et rafraîchissante, voire même nécessaire où le racisme, la haine de l'autre et les préjugés faciles/abjectes (pas uniquement mais, soyons honnête, surtout envers la communauté musulmane), commencent à pourrir une France qui devrait pourtant plus que jamais être soudée.

Un sacré premier effort donc.


Jonathan Chevrier