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[CRITIQUE] : Elyas


Réalisateur : Florent-Emilio Siri
Acteurs : Roschdy Zem, Laëtitia Eïdo, Jeanne Michel, Dimitri Storoge,...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Action, Thriller.
Nationalité : Français.
Durée : 1h39min

Synopsis :
Elyas, ancien soldat des Forces Spéciales, solitaire et paranoïaque, devient garde du corps pour Nour, 13 ans et sa mère Amina, venues du Moyen-Orient. Tandis que l’ex-guerrier et la jeune fille s’apprivoisent, un mystérieux commando les prend pour cibles. Elyas ne reculera devant rien pour la sauver.



Critique :



Ils se font de plus en plus rares, passé la désertion d'une Europa Corp qui produisait - mal - du bis musclé plus vite que son ombre, les irréductibles gaulois bien décidés à changer le statut d'un cinéma d'action made in France sclérosé et cantonné à n'exister que sous les pitreries amorphes d'un Olivier Marchal dont le cinéma n'est plus que l'ombre de lui-même depuis très (trop) longtemps.

Copyright 2024 - Récifilms - Studiocanal - France 2 Cinéma

On peut citer Julien Leclercq malgré quelques efforts fragiles, le tandem Guillaume Pierret/Benjamin Rocher à travers l'initiative d'un Alban Lenoir qui se bat toujours bec et ongles, même dans des péloches indignes de ses capacités (coucou Le Salaire de la peur), Xavier Gens même si son Farang a tout du one shot sans lendemain, et désormais un Florent-Emilio Siri sur le retour, ex-enfant prodigue du genre qui ne l'avait plus abordé depuis l'excellent Otage avec Bruce Willis, en 2005.
Mais point de passage par la case plateforme, c'est bel et bien dans des salles pas assez obscures qu'il nous revient avec le bien nommé Elyas, dominé par un Roschdy Zem plus létal que jamais.

Proto-Man on Fire sur le papier, avec son pitch presque prétexte (Elyas, ancien soldat des Forces Spéciales solitaire et paranoïaque, souffrant de PTSD, devient garde du corps pour Nour, 13 ans et sa mère Amina, venues du Moyen-Orient, et alors que l’ex-guerrier et la jeune ado au caractère bien trempé s’apprivoisent, un mystérieux commando les prend pour cibles : monumentale erreur), le septième effort du cinéaste n'en est finalement qu'un lointain cousin bien de chez nous, tant il penche plus vers une fusion entre le film d'action et le thriller paranoïaque, dont il fait graduellement monté la sauce telle une cocotte minute qui, comme son anti-héros vedette méchamment troublé, menace continuellement d'exploser, avant de finalement lâcher les chevaux dans un déferlement de violence et de rage qui va bien au-delà de la simple vendetta facile.

Copyright 2024 - Récifilms - Studiocanal - France 2 Cinéma

Parangon de la construction testostéronée et nerveuse confiante et assurée, ou Siri sait pertinemment ce qu'il doit donner à son public (ce qui le rend prévisible... mais fuck it), mais surtout comment user des moyens à sa disposition, Elyas est tout du long un baril de poudre certes imparfait mais brutal, fun et gorgé d'adrénaline, qui nous rappelle au (trop?) bon souvenir d'une époque pas si lointaine ou les honnêtes faiseurs, pas forcément les plus doués pour autant, traitaient le cinéma d'action avec enthousiasme et sérieux.

S'il ne péte évidemment pas dans la soie de l'originalité (son écriture n'en est pas moins suffisamment solide pour donner du sens et de la nuance à son histoire mais aussi aux motivations de son anti-héros, dont il joue savamment de ses certitudes biaisées et brisées), s'est évidemment dans la limpidité de son exécution que la péloche tire son efficacité extrême, Siri misant intelligemment sur un savant enchaînement de séquences homériques aussi brutales qu'intenses, une montée graduelle et jouissive dans la violence sans pour autant être dénué d'impact physique ni émotionnel, capturé avec une lisibilité folle (chorégraphie, découpages, tout est pensé et conçu pour atteindre un degré d'efficacité redoutable), prouvant sans artifices putassiers les nobles intentions du bonhomme d'offrir un divertissement généreux à un auditoire qu'il ne prend jamais pour une buse.

Copyright 2024 - Récifilms - Studiocanal - France 2 Cinéma

Maître de son histoire et de sa caméra, faisant habilement de Roschdy Zem un wannabe John W. Creasy tout aussi brutal, mutique et touchant que l'original, Florent-Emilio Siri nous livre avec Elyas une séance aussi énervée et tortueuse que viscérale, une petite tatanerie comme on les aime pour une fête du cinéma qui ne demandait qu'à être giflée dans les valseuses.


Jonathan Chevrier