[CRITIQUE] : Greenhouse
Réalisatrice : Lee Sol-hui
Avec : Kim Seo-Hyeong, Yang Jae-sung, Ahn So-yo, Shin Yeon-sook,…
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Thriller.
Nationalité : Sud-coréen.
Durée : 1h40min.
Synopsis :
Aide-soignante à domicile, Moon-Jung s’occupe avec bienveillance d'un vieil homme aveugle et de sa femme. Mais quand un accident brutal les sépare, tout accuse Moon-Jung. Elle se retrouve à devoir prendre une décision intenable.
Critique :
Avec son portrait d'une figure maternelle aussi obsessionnelle que profondément complexe et acculée, il y a, évidemment, une filiation naturelle qui se noue entre le premier long-métrage impressionnant de la wannabe cinéaste sud-coréenne Lee Sol-hui, Greenhouse, à la distribution pour le moins atypique (il est sorti à Paris ce mercredi, et débarquera d'ici le 29 mai dans le reste de la France), au puissant L’Infirmière de Koji Fukada autant qu'au chef-d'oeuvre Mother de Bong Joon-ho (on pensera également, assez logiquement dans son final, à Burning de Lee Chang-Dong), d'autant qu'il s'échine comme sez ainés, à refuser toutes les étiquettes qu'on tenterait de lui coller sur la bobine, par la force d'une narration à l'audace assez rare.
Bien qu'il arpente pendant un temps, le terrain balisé du drame psychologique légèrement saupoudré de comédie noire, noué autour de la fragilité des liens familiaux, le film bouscule et bascule très vite vers le thriller domestique à l'ironie piquante, fruit d'une volonté de Sol-hui à jouer des ellipses, à laisser s'échapper quelques traits cruciaux comme pour mieux perdre son auditoire au plus près d'une héroïne qui elle-même, s'abîme et se perd dans sa propre solitude insondable.
Soit Moon-jung, une aide-soignante à qui la vie n'a définitivement rien donné, mais qui s'est toujours entêtée à tout lui prendre quand-même.
Elle vit seule dans une serre agricole elle-même isolée de tout, jusqu'à ce qu'elle puisse rassembler suffisamment d'argent pour louer un appartement en ville pour elle et son fils adolescent, sur le point d'être libéré d'un centre de détention pour mineurs, et qui ne semble pas forcément enthousiaste à l'idée de vivre avec une mère dont la dépression profonde se manifeste par de violents actes d'automutilation - à l'image de sa propre mère, elle aussi malade et internée dans un établissement spécialisé.
Incapable de s'offrir les soins médicaux et psychologiques dont elle a cruellement besoin (elle n'a qu'un groupe de paroles - qui n'en est pas totalement un - comme hypothétique porte curative, qui ne fera in fine que lui apporter encore plus de problèmes), elle trouve néanmoins la capacité de subvenir aux soins quotidien d'un couple âgé et aisé, Tae-kang, quasiment aveugle, et son épouse atteinte d'Alzheimer, Hwa-ok, pour qui elle devient une sorte de fille de substitution, jusqu'à ce qu'une douloureuse tragédie (la mort de Hwa-ok) arrive...
Itinéraire tendu d'une femme oppressée qui perd lentement mais sûrement le contrôle (une magnifique et envoûtante Kim Seo-hyung), que la cinéaste suit avec une certaine empathie le basculement troublant dans la folie, comme pour mieux nourrir sa charge costaude contre les contradictions et les ambivalence d'une société sud-coréenne qui précipite les plus fragiles au fond du goufre; Greenhouse ne révolutionne pas une popote un brin familière mais mets savamment tous ses œufs dans le bon panier, pour incarner un solide thriller tordu et cruel, qui ne renie jamais sa part d'humanité.
Exactement le type d'expérience merveilleusement noire et intense, comme le cinéma du pays du matin frais sait si bien les faire.
Jonathan Chevrier
Avec : Kim Seo-Hyeong, Yang Jae-sung, Ahn So-yo, Shin Yeon-sook,…
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Thriller.
Nationalité : Sud-coréen.
Durée : 1h40min.
Synopsis :
Aide-soignante à domicile, Moon-Jung s’occupe avec bienveillance d'un vieil homme aveugle et de sa femme. Mais quand un accident brutal les sépare, tout accuse Moon-Jung. Elle se retrouve à devoir prendre une décision intenable.
Critique :
Itinéraire tendu d'une femme oppressée qui perd lentement le contrôle, #Greenhouse ne révolutionne pas une popote familière mais mets savamment tous ses œufs dans le bon panier, pour incarner un solide thriller psychologique tordu et cruel, qui ne renie jamais sa part d'humanité. pic.twitter.com/WynqmTl6YW
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) May 24, 2024
Avec son portrait d'une figure maternelle aussi obsessionnelle que profondément complexe et acculée, il y a, évidemment, une filiation naturelle qui se noue entre le premier long-métrage impressionnant de la wannabe cinéaste sud-coréenne Lee Sol-hui, Greenhouse, à la distribution pour le moins atypique (il est sorti à Paris ce mercredi, et débarquera d'ici le 29 mai dans le reste de la France), au puissant L’Infirmière de Koji Fukada autant qu'au chef-d'oeuvre Mother de Bong Joon-ho (on pensera également, assez logiquement dans son final, à Burning de Lee Chang-Dong), d'autant qu'il s'échine comme sez ainés, à refuser toutes les étiquettes qu'on tenterait de lui coller sur la bobine, par la force d'une narration à l'audace assez rare.
Bien qu'il arpente pendant un temps, le terrain balisé du drame psychologique légèrement saupoudré de comédie noire, noué autour de la fragilité des liens familiaux, le film bouscule et bascule très vite vers le thriller domestique à l'ironie piquante, fruit d'une volonté de Sol-hui à jouer des ellipses, à laisser s'échapper quelques traits cruciaux comme pour mieux perdre son auditoire au plus près d'une héroïne qui elle-même, s'abîme et se perd dans sa propre solitude insondable.
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Soit Moon-jung, une aide-soignante à qui la vie n'a définitivement rien donné, mais qui s'est toujours entêtée à tout lui prendre quand-même.
Elle vit seule dans une serre agricole elle-même isolée de tout, jusqu'à ce qu'elle puisse rassembler suffisamment d'argent pour louer un appartement en ville pour elle et son fils adolescent, sur le point d'être libéré d'un centre de détention pour mineurs, et qui ne semble pas forcément enthousiaste à l'idée de vivre avec une mère dont la dépression profonde se manifeste par de violents actes d'automutilation - à l'image de sa propre mère, elle aussi malade et internée dans un établissement spécialisé.
Incapable de s'offrir les soins médicaux et psychologiques dont elle a cruellement besoin (elle n'a qu'un groupe de paroles - qui n'en est pas totalement un - comme hypothétique porte curative, qui ne fera in fine que lui apporter encore plus de problèmes), elle trouve néanmoins la capacité de subvenir aux soins quotidien d'un couple âgé et aisé, Tae-kang, quasiment aveugle, et son épouse atteinte d'Alzheimer, Hwa-ok, pour qui elle devient une sorte de fille de substitution, jusqu'à ce qu'une douloureuse tragédie (la mort de Hwa-ok) arrive...
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Itinéraire tendu d'une femme oppressée qui perd lentement mais sûrement le contrôle (une magnifique et envoûtante Kim Seo-hyung), que la cinéaste suit avec une certaine empathie le basculement troublant dans la folie, comme pour mieux nourrir sa charge costaude contre les contradictions et les ambivalence d'une société sud-coréenne qui précipite les plus fragiles au fond du goufre; Greenhouse ne révolutionne pas une popote un brin familière mais mets savamment tous ses œufs dans le bon panier, pour incarner un solide thriller tordu et cruel, qui ne renie jamais sa part d'humanité.
Exactement le type d'expérience merveilleusement noire et intense, comme le cinéma du pays du matin frais sait si bien les faire.
Jonathan Chevrier