[CRITIQUE] : LaRoy
Réalisateur : Shane Atkinson
Avec : John Magaro, Steve Zahn, Dylan Baker, Matthew Del Negro, Megan Stevenson, …
Distributeur : ARP Sélection
Budget : -
Genre : Comédie, Policier, Thriller
Nationalité : Américain, Français
Durée : 1h52min
Synopsis :
Quand Ray découvre que sa femme le trompe, il décide de mettre fin à ses jours. Il se gare sur le parking d’un motel. Mais au moment de passer à l’acte, un inconnu fait irruption dans sa voiture, pensant avoir affaire au tueur qu’il a engagé.
Critique :
Comédie policière sensiblement dans l'ombre des cinémas de Quentin Tarantino et des frères Coen, #LaRoy incarne un premier long-métrage prometteur, ou Shane Atkinson joue autant la carte de l'exagération extrême qu'il jongle avec malice entre les genres. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/pWeVlAM2sk
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) April 14, 2024
Il a su créer la surprise au dernier festival de Deauville. LaRoy, le premier long-métrage de Shane Atkinson, avait fait sensation en repartant avec trois prix : le Grand Prix, le prix du public et celui de la critique. Thriller noir, à l’accent humoristique, le film se tient dans la lignée des frères Coen des débuts. Nous retrouvons avec plaisir le visage doux et paisible de John Magaro (First Cow, Past Lives) qui joue ici un pauvre loser que la violence vient cueillir sans crier gare. Pris dans un quiproquo, on le pense tueur à gage. Il doit tuer discrètement un avocat contre un généreux paquet de fric. Ce simple vendeur n’ose pas dire non …
Copyright 2023 LAROY PRODUCTIONS LLC |
À LaRoy, petite ville du Texas, personne n’est gagnant. Shane Atkinson fait le portrait des petites gens, ceux dont la vie tranquille ne prédestine pas à la tragédie. Et pourtant, n’est-ce pas dans les patelins perdus que l’on trouve le plus de vice ? Miss Marple ne dirait pas le contraire ! Dans ce premier long métrage, le réalisateur fait défiler les losers du quotidien. Ceux et celles dont on rit sous cape, tellement ils se sont enfermés dans un cliché. L’ancienne miss qui rêve de plus grand. L'époux modèle mais un peu mou. Le détective privé exubérant et con. L’opportuniste misogyne. Le tueur intransigeant, etc … La liste est longue. Il n’est cependant pas question de se moquer ici. Au contraire, si la succession d’événements révèlent leurs défauts aux yeux de tous, elle peut également en révéler leurs qualités insoupçonnées.
Le cinéaste ne lésine pas sur le cliché. Il embrasse l’exagération pour en prélever toute la comédie possible. C’est là où réside l’ombre des frères Coen ou de Tarantino. On retrouve dans LaRoy des bribes de leur filmographie respective : des vraies gueules de cinéma embarquées dans un tourbillon de violence, avec de l’humour, des profusions de punchlines et du sang. Le cinéaste puise également dans la comédie américaine pure, quand le récit oblige Ray et Skip, le détective, à se transformer en duo. Fort de leur caractérisation poussée à l’extrême, les deux compères nous font fortement penser aux duo comiques tels que l’on peut les trouver dans Wayne’s World ou Dumb & Dumber. Ce mélange confère au film une rupture de ton bénéfique, qui passe avec facilité de la comédie, au thriller noir, en passant par le drame social. Une rupture de ton s’installe aussi à l’image, passant d’une image de nuit avec des visages uniquement éclairés par des néons à une image diurne jaune, très “western”.
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Shane Atkinson a beaucoup d’empathie pour ses personnages. Il n’hésite pas à appuyer sur leur environnement, une petite ville où rien de bien important ne se passe. À part Ray, qui se complaît de ce rien, tous vivent dans l’illusion que quelque chose de merveilleux peut leur arriver. Tous veulent plus, quitte à voler, mentir, tromper pour l’obtenir. C’est pourquoi la naïveté et l’absence d’un esprit revanchard chez Ray et Skip leur donnent une force incroyable. Ce sont les outsiders que l’on attendait pas. D’abord clown triste, que son frère et sa femme manipulent comme une marionnette, Ray s’affirme comme le personnage le plus téméraire et le plus intelligent. Il n’est pas aveuglé par l'appât du gain. Il n’est pas aveuglé par l’illusion de sa propre importance. Il veut seulement revenir dans son “rien” car il sait que là était sa place. John Magaro joue sur son apparence tranquille, sur la douceur de ses traits pour faire de Ray un loser attendrissant, que le spectateur accompagne avec une seule envie : le voir vaincre ses peurs et les méchants. Steve Zahn n’est pas en reste et nous offre une prestation digne d’être vu.
Premier long métrage prometteur, LaRoy manie les genres avec succès. Laissez le soin à Skip et Ray de vous étonner et de vous faire rire, vous ne serez pas décu⋅es du voyage !
Laura Enjolvy