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[CRITIQUE] : Le Successeur


Réalisateur : Xavier Legrand
Acteur : Marc-André Grondin, Yves Jacques, Anne-Elisabeth Bossé, Blandine Bury,...
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français, Canadien, Belge.
Durée : 1h52min

Synopsis :
Heureux et accompli, Ellias devient le nouveau directeur artistique d’une célèbre maison de Haute Couture française. Quand il apprend que son père, qu’il ne voit plus depuis de nombreuses années, vient de mourir d’une crise cardiaque, Ellias se rend au Québec pour régler la succession. Le jeune créateur va découvrir qu’il a hérité de bien pire que du coeur fragile de son père.



Critique :

Il est de ces films qui ont un potentiel particulièrement clivant et Le successeur se place sans aucun doute possible dans cette catégorie. Lors de notre interview (qui arrivera pour la sortie en salle du long-métrage), Xavier Legrand admettait sans aucun souci que sa nouvelle réalisation allait déconcerter le public par ses prises de positions narratives. Admettons alors que nous ferons partie sans hésiter des avis positifs tant il y a une audace dans cette relecture du roman L’ascendant. Xavier Legrand parvient à reprendre son ossature simple en apparence tout en l’enrichissant de thématiques fortes et en lien avec sa filmographie.

Copyright Haut et Court

Jusqu’à la garde, le premier long-métrage de Xavier Legrand, abordait ainsi un sujet douloureux dans une inscription réelle qui n’empêchait pas le metteur en scène de proposer quelques effets de mise en scène ainsi qu’une conclusion particulièrement horrifique. Ici, il nous installe en quelques minutes dans l’univers de son protagoniste principal, incarné avec brio par Marc-André Grondin. Dans sa présentation, on ressent le poids de l’héritage de ce protagoniste qui cherche absolument à faire briller une certaine image de lui. Ce rapport au soi vu par les autres sera essentiel et amené ici par une séquence d’introduction qui, assez subtile, parvient à installer de nombreuses idées sur son personnage sans que l’on ne puisse se rendre compte directement du labyrinthe émotionnel qui va le renfermer.

Le décès d’un père peu connu va alors imposer à notre personnage un retour aux sources forcé, une forme de fébrilité de cette identité qu’il a su se construire jusqu’à ce que les événements prennent une tournure qu’il serait criminel de dévoiler, bien que le long-métrage instille déjà la noirceur à venir. La bascule, sans la révéler, se fera d’ailleurs par le biais d’un plan absolument marquant, sans doute l’un des plus réussis de cette année par ce qu’il parvient à véhiculer dans ses intentions. Là, le film enferme son héros dans une mécanique qui risque clairement de diviser mais dont les actions se justifient par une explosion émotionnelle particulièrement douloureuse et significatrice. L’héritage du père se dessine avec des contours peu flatteurs, renvoyant un reflet assez lourd de sens d’impositions patriarcales jusqu’au vertige.

Copyright Haut et Court

Retenons-nous alors de vous dévoiler plus de clés d’un long-métrage parvenant à surprendre par ses virages particulièrement sombres. Tout ce que nous pouvons alors déclarer sans briser l’expérience du premier visionnage, c’est que Xavier Legrand nous propose avec Le successeur une interrogation sur l’influence paternelle dans des contours déplaisants, mettant à mal toute possibilité d’ego masculin pour mieux étouffer jusqu’au dernier instant son audience en même temps que son personnage principal. C’est une proposition détonante, douloureuse mais passionnante par ses absences de facilité et son déroulé narratif plongeant tête baissée dans l’erreur et l’horreur de l’être.


Liam Debruel