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[CRITIQUE] : Bye Bye Tibériade


Réalisatrice : Lina Soualem
Avec : Hiam Abbass
Distributeur : JHR Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français, Belge, Qatari, Palestinien.
Durée : 1h22min.

Synopsis :
Hiam Abbass a quitté son village palestinien pour réaliser son rêve de devenir actrice en Europe, laissant derrière elle sa mère, sa grand-mère et ses sept sœurs. Trente ans plus tard, sa fille Lina, réalisatrice, retourne avec elle sur les traces des lieux disparus et des mémoires dispersées de quatre générations de femmes palestiniennes. Véritable tissage d’images du présent et d’archives familiales et historiques, le film devient l’exploration de la transmission de mémoire, de lieux, de féminité, de résistance, dans la vie de femmes qui ont appris à tout quitter et à tout recommencer.



Critique :


Aperçue dans une poignée de films au coeur de sa jeune carrière de comédienne (dont l'excellent Vous méritez un amour de Hafsia Herzi), Lina Soualem était passé - et avec brio - derrière la caméra il y a un tout petit peu plus de deux ans maintenant via un joli premier documentaire, Leur Algérie, réflexion mélancolique sur la notion d'identité prenant les contours d'un formidable et doux (même si un brin teinté d'amertume) portrait de famille psychanalytique replacé au coeur de l'histoire avec un grand H, qui frappait autant par sa poésie que par son immense humanité.

Copyright Frida Marzouk/Beall Productions

Par sa caméra complice et aimante, elle faisait de la vie de ses grands-parents paternels, le témoignage émouvant et intime d'une génération sacrifiée, qui a émigrée en France pour mieux gagner sa vie mais qui ne s'est jamais vraiment senti intégré, alors qu'elle a vécu l'indépendance de l'Algérie de l'étranger, porté par l'espoir chimérique de pouvoir repartir un jour chez eux (ce qui n'adviendra, pour beaucoup, jamais).

Place donc désormais au film dit de la confirmation avec Bye Bye Tibériade, nouvelle excursion intime et délicate au sein de sa propre famille - maternelle cette fois -, qui prend cette fois-ci le magnifique contour autant d'une ode aux souvenirs, qu'une magnifique et admirative célébration de la résilience et du courage sororale, tant elle rend hommage aux femmes fortes qui l'ont précédée - avant tout et surtout sa mère, la célèbre actrice Hiam Abbas -, et à leurs luttes angoissées face à un patriarcat écrasant et anxiogène.
Jonglant entre les images d'archives, les vidéos personnelles et une narration au présent - avec des témoignages intergénérationnels -, la cinéaste concocte autant un vaste et pudique mémorial familial au féminin, qu'une auscultation fragile et complexe de son propre passé (traumatisé par les tourments de l'histoire, comme la Palestine elle-même par ses nombreux bouleversements politiques - mais pas que), sondant la douleur sourde de l'exil - consenti comme imposé -, du déracinement et de la séparation.

Copyright Frida Marzouk/Beall Productions

D'une sincérité lumineuse, liant avec chaleur l'intime à l'universel au sein d'une épopée puissante canalisant les histoires vivantes de sa mère et de ses grands-mères, Lina Soualem fait de Bye Bye Tibériade une imposante et poétique mosaïque humaine, un formidable hommage à la persévérance des femmes palestiniennes à travers le temps, ou elle veille à ce que leur héritage se perpétue et inspire les générations futures à travers la lentille éternelle du septième art.


Jonathan Chevrier


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