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[CRITIQUE] : The Novice


Réalisatrice : Lauren Hadaway
Avec : Isabelle FuhrmanAmy Forsyth, Dilone,...
Distributeur : Star Invest Films France
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h37min

Synopsis :
Alex Dall, jeune fille solitaire et dévorée par un besoin de réussir, décide de s’inscrire au club d'aviron de son université. Dès son arrivée, elle veut rejoindre le meilleur équipage par tous les moyens, y compris dépasser ses propres limites physiques et mentales quitte à se mettre ses coéquipières à dos.



Critique :


Impossible de ne pas penser au Black Swan de Darren Aronofsky (certains citeront également Whiplash de Damien Chazelle, même si la comparaison est définitivement moins pertinente) à la vision du premier long-métrage de la wannabe cinéaste Lauren Hadaway, The Novice, tant les similarités qui lient les deux films sont aussi troublantes que fascinantes à décortiquer, même s'il est évident que le premier incarne une oeuvre (quasiment) définitive signée par un cinéaste en pleine possession de ses moyens, là où le second est - logiquement - marqué par quelques petits scories inhérents à tout premier effort.
Articulé autour de deux symboles/substrats iconographiques furieusement évocateurs (le corbeau, déjà dans Black Swan, un oiseau de mauvais augure dans le folklore canadien, qui représente la transition entre la vie et la mort - la transformation/décomposition du corps -; et le crabe, un crustacé dont les pattes lui permettent de se nourrir, de se défendre et, paradoxalement, à leur faire du mal - la résilience face à la douleur et déconstruction du corps), le film tisse un récit initiatique et cathartique vissé sur l'opposition/rivalité de deux étudiantes désireuse d'intégrer l'équipe d'aviron de leur fac.

Copyright Star Invest Films France

Soit Alex, la protagoniste principale de l'histoire - le crabe -, dont le caractère obsessionnel-compulsif l'intime constamment à repousser les limites de son corps et de son esprit pour atteindre cet objectif (alors que rien, que ce soit du côté de son caractère solitaire où de ses capacités physiques, ne l'y prédispose), et Jamie, à l'esprit plus calme mais tout aussi tenace, qui doit désespérément rejoindre l'équipe pour obtenir une bourse.
Deux figures qui permettent à la cinéaste de questionner la notion de compétitivité, ici poussée à l'extrême, comme la valeur étalon de tout le champ éducatif Nord-américain, et par extension comment cette approche essentiellement égoïste, conditionne la société et les rapports humains aujourd'hui.
Un conditionnement à la racine (l'école) qui transparait ici dans le terrible entraînement-endoctrinement que subit Alex, qui la dépouille peu à peu de toute notion de grégorisme où d'un quelconque esprit d'équipe, ce qui est paradoxal dans un sport qui, en théorie, est censé entretenir l'importance de la force collective et non renforcer l'individualisme de chaque membre, même s'il s'agit de se concentrer avant tout sur soi, pour mieux servir les autres - autant une compréhension de groupe qu'une somme d'efforts individuels.
C'est dans cette dialectique ambivalente sur la nature des liens dans le sport, à la fois généreux (puisque les efforts donnés le sont en allant au bout de soi-même) et intéressés (tout n'est qu'une question de but à atteindre, coûte que coûte), noué au sein d'une narration qui s'appuie ponctuellement sur les codes du teen movie, que The Novice tire toute sa puissance tant Hadaway décrit avec une précision folle la dépression physique et psychologique d'Alex, en s'inspirant de son propre vécu universitaire.

Copyright Star Invest Films France

Son expérience personnelle donne une réelle vérité à ses images, même lorsqu'elle laisse s'immiscer quelques saillies fantastiques liés aux hallucinations d'Alex et aux causes de ses blessures, qui résultent à la fois de l'entraînement et de l'automutilation qu'elle s'inflige (là encore, Black Swan n'est jamais loin).
D'autant qu'il y a un vrai et rigoureux travail sonore opéré par la cinéaste pour renforcer le vertige de cette expérience sur le dépassement de soi, qui arpente sans trembler le territoire de l'inconscient et de l'inconfort.
Porté par une incroyable Isabelle Fuhrman, The Novice, pas exempt de quelques fioritures (les tentatives de sociabilisation de son héroïne, dont une liaison éthiquement douteuse,...), se fait un portrait absorbant et terrifiant du déterminisme et de l'obsession de la réussite, une plongée immersive et brutale dans le cycle infernal et désespéré que s'impose une âme dont le corps de plus en plus mutilé, menace continuellement de rompre sous le poids de sa volonté.
Un sacré premier effort.


Jonathan Chevrier



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