[CRITIQUE] : The Fabelmans
Réalisateur : Steven Spielberg
Avec : Gabriel LaBelle, Michelle Williams, Paul Dano, Seth Rogen,…
Distributeur : Universal Pictures International France
Genre : Biopic, Drame
Nationalité : Américain
Durée : 2h31min
Synopsis :
Le jeune Sammy Fabelman, rêve de devenir réalisateur.
Le début des années 2020 est synonyme d'autobiographie chez les cinéastes américains. Rien que l’année dernière, Paul Thomas Anderson et James Gray nous avaient emmené tous deux dans leur enfance/adolescence. Le premier dans un Los Angeles solaire, le second dans un New York crépusculaire. C’est au tour de Steven Spielberg, père (ou grand-père) attitré pour tout cinéphile qui se respecte, de nous plonger dans ses souvenirs. The Fabelmans se fait le miroir de la vie du cinéaste. Les fans de la première heure reconnaîtront les moments charnières du réalisateur, ceux qui l'ont façonné en tant que cinéaste et en tant qu'homme.
Mais il faut surtout voir ce nouveau film comme un énième hommage que fait Spielberg au cinéma (chacun de ces films ne sont-ils pas tous des hommages, directs ou indirects, au Septième Art ? Vous avez quatre heures.) Ici, l’hommage est bien évidemment profondément intime, un moyen de panser les blessures, de célébrer les passions ou de créer un dialogue, aussi difficile soit-il. Le cinéma est le point d’orgue du jeune Sam Fabelman, le traumatisme originel mais aussi le moment fondateur de toute une vie. Quand le personnage, un jeune enfant sensible, va pour la première fois dans une salle de cinéma avec ses parents, il en ressort avec une nouvelle peur : les accidents de train. C’est en recréant la scène fatidique, avec la vieille caméra de son père mais sur les conseils bienveillants de sa mère, que le petit Sam découvre pour la première fois la puissance d’une image et l’aspect thérapeutique de la mise en scène. Faire revivre la séquence, c’est se rendre compte de la magie du cinéma, de la fausseté d’une image. Le train n’a pas vraiment eu d’accident, les personnages ne sont pas vraiment morts. Tout est faux mais en même temps tout est vrai si on veut y croire.
Malgré l’intimité de The Fabelmans, Steven Spielberg se détache d’une narration centrée sur lui-même pour embrasser l’universalité de l’adolescence. Le film s’apparente parfois à un teen-movie, où la découverte de la sexualité côtoie l’antisémitisme, avec l’amour du cinéma en toile de fond. Même les moments plus personnels comme un deuil ou une rencontre fondatrice avec un géant du cinéma (le bien nommé John Ford) prennent la direction d’un vécu plus large que sa propre personne, en prenant comme parti-pris l’humour ou l’humilité. Ce n’est pas tant la volonté de se livrer qui anime Spielberg mais plutôt de transcender son vécu pour parler de son grand amour, le cinéma, qui dépasse tout ce que le réalisateur pourrait nous dire. Présent à chaque moment de sa vie, le cinéma est autant le problème que la solution, autant le point noir que le corollaire d’un monde plus lumineux et candide. Ballet de bonheur simple et d’amertume, The Fabelmans raconte une vie bercée par le cinéma. Lucide et modeste, Steven Spielberg nous offre un bout de son existence, celle qui n’a jamais cessé de poindre le bout de son nez dans sa filmographie : son enfance.
Laura Enjolvy
Avec : Gabriel LaBelle, Michelle Williams, Paul Dano, Seth Rogen,…
Distributeur : Universal Pictures International France
Genre : Biopic, Drame
Nationalité : Américain
Durée : 2h31min
Synopsis :
Le jeune Sammy Fabelman, rêve de devenir réalisateur.
Critique :
Ballet de bonheur simple et d’amertume, #TheFabelmans raconte une vie bercée par le cinéma. Lucide et modeste, Steven Spielberg nous offre un bout de son existence, celle qui n’a jamais cessé de poindre le bout de son nez au coeur de sa filmographie: son enfance. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/OKpMVbyXbK
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 12, 2023
Le début des années 2020 est synonyme d'autobiographie chez les cinéastes américains. Rien que l’année dernière, Paul Thomas Anderson et James Gray nous avaient emmené tous deux dans leur enfance/adolescence. Le premier dans un Los Angeles solaire, le second dans un New York crépusculaire. C’est au tour de Steven Spielberg, père (ou grand-père) attitré pour tout cinéphile qui se respecte, de nous plonger dans ses souvenirs. The Fabelmans se fait le miroir de la vie du cinéaste. Les fans de la première heure reconnaîtront les moments charnières du réalisateur, ceux qui l'ont façonné en tant que cinéaste et en tant qu'homme.
©Storyteller Distribution Co., LLC. All Rights Reserved. |
Mais il faut surtout voir ce nouveau film comme un énième hommage que fait Spielberg au cinéma (chacun de ces films ne sont-ils pas tous des hommages, directs ou indirects, au Septième Art ? Vous avez quatre heures.) Ici, l’hommage est bien évidemment profondément intime, un moyen de panser les blessures, de célébrer les passions ou de créer un dialogue, aussi difficile soit-il. Le cinéma est le point d’orgue du jeune Sam Fabelman, le traumatisme originel mais aussi le moment fondateur de toute une vie. Quand le personnage, un jeune enfant sensible, va pour la première fois dans une salle de cinéma avec ses parents, il en ressort avec une nouvelle peur : les accidents de train. C’est en recréant la scène fatidique, avec la vieille caméra de son père mais sur les conseils bienveillants de sa mère, que le petit Sam découvre pour la première fois la puissance d’une image et l’aspect thérapeutique de la mise en scène. Faire revivre la séquence, c’est se rendre compte de la magie du cinéma, de la fausseté d’une image. Le train n’a pas vraiment eu d’accident, les personnages ne sont pas vraiment morts. Tout est faux mais en même temps tout est vrai si on veut y croire.
Steven Spielberg se sert justement de ses images pour structurer narrativement The Fabelmans. Les ellipses temporelles se créent directement dans le cadre, un mot ou une action servent de basculement. De nombreuses scènes viennent asseoir le pouvoir des images sur Sam, mais une en particulier retient notre attention parce qu’elle sert de péripéties centrales à un drame familial. Alors qu’il monte un simple moment en famille lors d’un week-end au camping, les images dévoilent ce qui restait caché jusqu’alors : l’adultère de la mère, Mitzi, avec Benny, le meilleur ami de son mari. Malgré quelques cris, la discussion mère/fils s’effectue dans le silence d’une projection, où la douleur s’échappe des images d’un été doré et où la vérité apparaît en arrière-plan. L'œil innocent de Sam, qui voulait juste créer des souvenirs pour sa famille, a su capter l’invisible qui sonne le glas d’un avenir radieux pour les Fabelman. Afin de marquer la différence, Spielberg choisit cette fois un effet de fondu au noir (le seul du film) en tant qu’ellipse. Si on a souvent pu reprocher au réalisateur un manque de nuance dans ses personnages féminins, il semblerait qu’il lui fallait prendre exemple sur sa mère pour nous offrir un personnage digne de ce nom. Bien qu’elle soit mère de famille, comme presque tous ses personnages féminins, il se dégage de Mitzi (impeccable Michelle Williams) quelque chose de bouleversant. Comme pour lui offrir ce qu’elle n’a pu avoir, Spielberg appuie sur le côté artistique de Mitzi, sur ses élans lyriques qui façonnent son caractère et sa vision de la vie. C’est une artiste contrariée, une pianiste de talent qui, à cause d’une éducation religieuse ou à cause de l’époque (le film ne tranche pas), a dû raccrocher les partitions pour se construire une vie de famille et devenir mère à part entière. Spielberg ne tarit pas d'éloges sur Mitzi, lui donne la beauté, un côté fantasque et surtout, le soutien inconditionnel d’une mère pour son fils, artiste lui aussi. Même si le personnage du père (Paul Dano, tout aussi impeccable) a lui aussi ses moments de gloire, Mitzi lui vole souvent la vedette tant Spielberg nous dit qu’il lui doit tout, ou presque.
©Storyteller Distribution Co., LLC. All Rights Reserved. |
Malgré l’intimité de The Fabelmans, Steven Spielberg se détache d’une narration centrée sur lui-même pour embrasser l’universalité de l’adolescence. Le film s’apparente parfois à un teen-movie, où la découverte de la sexualité côtoie l’antisémitisme, avec l’amour du cinéma en toile de fond. Même les moments plus personnels comme un deuil ou une rencontre fondatrice avec un géant du cinéma (le bien nommé John Ford) prennent la direction d’un vécu plus large que sa propre personne, en prenant comme parti-pris l’humour ou l’humilité. Ce n’est pas tant la volonté de se livrer qui anime Spielberg mais plutôt de transcender son vécu pour parler de son grand amour, le cinéma, qui dépasse tout ce que le réalisateur pourrait nous dire. Présent à chaque moment de sa vie, le cinéma est autant le problème que la solution, autant le point noir que le corollaire d’un monde plus lumineux et candide. Ballet de bonheur simple et d’amertume, The Fabelmans raconte une vie bercée par le cinéma. Lucide et modeste, Steven Spielberg nous offre un bout de son existence, celle qui n’a jamais cessé de poindre le bout de son nez dans sa filmographie : son enfance.
Laura Enjolvy