[CRITIQUE] : Je n’avais que le néant
Réalisateur : Guillaume Ribot
Actrice : Guillaume Ribot et Claude Lanzmann.
Distributeur : MK2 Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français.
Durée : 1h34min.
Synopsis :
La réalisation du film Shoah de Claude Lanzmann est une aventure en elle-même. Douze années de travail, des milliers d’heures de préparation, des voyages aux quatre coins du monde, des dizaines de témoins… et autant de doutes, de déboires, de fausses routes, mais aussi de moments de grâce douloureuse où la vérité apparaît. Grace aux 220 heures de rushes non utilisées au montage et aux mémoires de son auteur, Guillaume Ribot plonge au cœur de la production d’une œuvre majeure du cinéma, au plus près des obsessions de celui qui entreprit de faire émerger la vérité du néant.
Les ravages de la Seconde Guerre mondiale (dont on " célèbre " justement cette année, les quatre-vingt ans de la fin du conflit), comme les sujets de l'holocauste et de la déportation a été abordé tant de fois au cinéma par le passé comme aujourd'hui (à tel point qu'ils ne semblent jamais nous avoir réellement quitté, et peut-être d'une manière encore plus marquée aujourd'hui où, paradoxalement, les extrêmes se rapprochent dangereusement du pouvoir au coeur du Vieux Continent), que notre familiarité avec ses événements tragiques - comme avec ce sous-genre spécifique du film historique - fait qu'il est difficile pour tout oeuvre de ne pas flirter dangereusement autant avec un voyeurisme presque inévitable, qu'un sentiment encore plus racoleur et abject d'exploitation éhontée de l'un des pans les plus sombres de l'humanité.
Tout n'est qu'une question de subtilité (voire de sincérité, quand bien même les pires exemples ne doivent pas totalement en être dépourvu non plus) mais aussi et surtout de savoir-faire.
Un écueil qui ne frappe pas le moins du monde le nouvel effort de Guillaume Ribot, Je n’avais que le néant, où il offre un prisme inédit au déjà monstrueusement imposant Shoah de Claude Lanzmann (40 ans cette année), oeuvre fleuve de plus de 9h30 destinée à préserver la mémoire collective de l'Holocaust dans le marbre de la pellicule, en s'attachant à son processus créatif fastidieux et complexe.
En résulte une sorte de making-of poignant et révélateur, le portrait fasciné et fascinant d'un cinéaste prêt à (littéralement) tout pour que son devoir de mémoire né d'un désespoir universel ne soit pas incomplet et qui, par l'intermédiaire d'un autre, voit son travail (re)trouver une force encore plus sidérante.
Jonathan Chevrier






