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[CRITIQUE] : Assaut



Réalisateur : Adilkhan Yerzhanov
Acteurs : Azamat Nigmanov, Aleksandra Revenko, Nurbek Mukushev,....
Distributeur : Destiny Films
Budget : -
Genre : Drame, Thriller.
Nationalité : Kazakh, Russe.
Durée : 1h30min.

Synopsis :
Des élèves sont pris en otage dans le lycée de Karatas isolé par la neige. Apprenant que l’armée n’arrivera que dans deux jours, une équipe d’adultes menés par le professeur de mathématiques Tazshi décide d’aller les sauver eux-mêmes...


Critique :


Au coeur d'un septième art boursouflé par la franchisation à outrance (prequels, reboots, spin-offs, suites, remakes,...), il y a toujours quelque chose de rafraîchissant, voire même d'intimement rassurant, à voir des exploitations du Vieux Continent, majoritairement venant de son versant est, dégainer des films aussi originaux que savoureusement décalé.
Pointant quasiment à lui seul le Kazakhstan sur la carte grâce à une filmographie grandiose et prolifique qui capte à merveille aussi bien l'austérité que la beauté et l'absurdité qui peut habiter son pays, Adilkhan Yerzhanov est un orfèvre qui fait de quasiment tous ses films, de purs expériences de cinéma alternatif à part entière.

Ne dérogeant absolument pas à cette règle tout en n'étant pas forcément l'ouverture la plus facile - voire même la plus réussie - à son cinéma, Assaut n'en est pas moins un put*** d'uppercut pointant une nouvelle fois sa capacité extraordinaire à mélanger les genres avec justesse et cohérence, tout en faisant preuve d'une désinvolture et d'une singularité absolument irrésistible.
Car le film est totalement un condensé pur jus de son cinéma qu'il pousse ici à une distance si ironique de la réalité, qu'il rend la tragédie qui l'habite savoureusement abstraite, peuplée de personnages hétéroclites - mais surtout lâches, corrompus et inadaptés - aux réactions binaires, tellement au-dessus de tout et déconnectés que les pires choses peuvent se passer devant eux (où même à cause d'eux), qu'ils ne le remarqueraient - presque - même pas.

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C'est ainsi que l'histoire, une fois de plus flanquée à Karatas, voit des terroristes masqués et armés prendre (très) facilement en otage un lycée, tandis qu'une poignée d'adultes vont tenter d'expier leur impardonnable inaction et se faire des sauveurs du pauvre au coeur d'une mission sauvetage complexe et indemnisée, puisque aucune brigade d'intervention n'est prévue avant plusieurs jours.
Sorte de relecture folle et déglinguée du cultissime Assaut de Carpenter (tout est dans le titre), catapultée où presque dans le décor enneigé et hostile de The Thing (embaumé dans la superbe photographie d'Aidar Sharipov, déjà à l'oeuvre pour A Dark Dark Man et La tendre indifférence du monde), le Yerzhanov nouveau subvertit les codes du thriller, de la comédie noire, du drame social et du western (dont il détourne toute l'essence épique et virile) pour mieux incarner une tragi-comédie satirique (porté par l'humour noir pince-sans-rire si cher au réalisateur), tendue et faussement amorale, qui tacle entre les jambes le machisme hypocrite de la société kazakhe autant que la lâcheté d'adultes abandonnant/condamnant les jeunes générations à leur triste sort - à tous les niveaux.

Le tout en abordant deux sujets furieusement d'actualité : la crise des institutions et les tueries en milieu scolaire, qui ne touchent pas uniquement le pays de l'oncle Sam.
Bienvenue dans le Karatas du cinéaste donc, où il est impossible de totalement en revenir indemne même si l'on y lâche quelques rires sincères...


Jonathan Chevrier