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[CRITIQUE/RESSORTIE] : La Mariée était en noir


Réalisateur : François Truffaut
Acteurs : Jeanne Moreau, Michel Bouquet, Jean-Claude Brialy, Michael Lonsdale, Charles Denner, Claude Rich,...
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Policier, Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h47min.

Date de sortie : 17 avril 1968
Date de ressortie : 3 août 2022

Synopsis :
Le jour de son mariage, alors qu’elle sort à peine de l’église, Julie voit son mari assassiné sous ses yeux. Personne ne sait pourquoi l’homme était la cible de cette balle. La veuve va alors entreprendre un voyage pour se venger de ceux qui ont tué son mari. Elle tient une liste des cinq responsables, qu’elle compte éliminer un par un...



Critique :


Trois décennies bien tassées avant que Quentin Tarantino ne dégaine sous son influence, une Mariée vengeresse qui décidait de liquider ceux qui ont tués aussi bien son futur époux et - supposément mais in fine non - son bébé que tentés de lui faire passer l'arme à gauche; Truffaut, qui lui aussi n'avait pas inventé la poudre sur ce sujet (mais savait bien un minimum s'en servir), s'attachait donc à la traque impitoyable et sourde d'une mariée face aux responsables de la mort de son mari - là aussi mort à l'église -, sous les traits de feu la merveilleuse Jeanne Moreau, que le réalisateur retrouvait six ans après Jules et Jim.
À ceci près que l'orfèvre français ne joue pas - évidemment - la carte du spectaculaire et du pulp (ni de la relecture du western spaghetti où encore du film d'action HK) avec La Mariée était en noir, mais bien celle du minimalisme (qui aurait pu l'être encore plus, le cinéaste regrettant de ne pas voir pu tourné le tout en noir et blanc) et de l'hommage feutré au pape du film noir Alfred Hitchcock - avec même une pointe de réflexion Freudienne.

© Carlotta Films

Vissé sur une veuve loin d'être éplorée qui a perdu l'amour de sa vie (qu'elle a d'ailleurs, littéralement, attendue toute sa vie) quelques secondes après s'être unis avec lui devant le seigneur (un assassinat qui l'a d'autant plus privée d'épanouissement sexuel le jour de leur mariage - elle est toujours vierge -, sa frustration la conduisant un temps à une tentative de suicide, avant une expression juste de sa colère, alimentée et justifiée par sa foi religieuse), fauché par une balle perdue dont elle s'échine elle aussi à trouver les expéditeurs - cinq cibles au casting quatre étoiles, comme autant de victimes qu'elle tuera stoïquement -, Truffaut dégaine un polar aussi mystérieux qu'il est dénué de crédibilité, distillant pas toujours adroitement ses révélations (ses flashbacks bien trop explicatifs) sous les sonorités férocement sentencieuses de Bernard Herrmann, qui appuient encore un peu plus les clins d'oeil avec le réalisateur de Psychose, déjà peu subtilement perceptible à travers les thèmes abordés (enlacer l'amour avec l'obsession, le sexe et la séduction avec la mort,...).
En résulte un cocktail un peu étrange mais élégant, sorte de relecture symbolique et émotionnelle du polar Hitchcockien, à l'héroïne elle aussi maladroitement ambiguë (elle tue de sang-froid mais peu faire preuve d'empathie de manière un brin imprévisible parfois), piégé dans son propre monde fait de douleur et de rage.
Truffaut livre ici sa vision du thriller comme Fahrenheit 451 était sa vision de la SF, divertissant donc si l'on ne fait (vraiment) pas trop attention aux détails...


Jonathan Chevrier