[FUCKING SÉRIES] : Stranger Things saison 3 : Apocalypse is coming
(Critique - avec spoilers - de la troisième saison)
Plus qu'un simple hommage appuyé au cinéma béni des 80's faisant méchamment vibrer notre fibre nostalgique, Stranger Things était surtout un savoureux petit bijou de série addictive, une belle gourmandise qu'il nous etait si facile d'engloutir en deux temps, trois mouvements.
Reprenant tous les codes visuels, sonores et narratifs des films cultes de l'époque, s'attachant à une bande de gosses aussi finement croqués qu'empathiques (magnifiée par la révélation Millie Bobby Brown); le show nous faisait revivre ce frisson incroyable, ce " je ne sais quoi " enthousiasmant que l'on pouvait avoir à la vision des Goonies, de E.T. ou même Stand By Me.
Passé l'ouragan de la dernière saison de Game of Thrones, qui a tiré sa révérence avec un petit arrière goût de frustration (pour être poli), la saison 3 débarque donc enfin en ses premières heures de juillet, nous ramène dans les rues pas si tranquille de la petite ville d'Hawkins pour une nouvelle salve d'épisodes jouant pleinement la carte du bigger and better - plus encore que la saison précédente -, tout en gardant l'ADN même qui faisait le charme enivrant de la série : un amour inconditionnel autant pour les années 80 que pour ses personnages.
Déjouant totalement les codes de la franchisation à outrance Hollywoodienne, le show se paye le luxe de s'améliorer de cuvée en cuvée (après la révérence à Aliens, on est face ici à un mélange entre Body Snatchers, Red Dawn, The Thing et Terminator), même si elle ne fait qu'habilement - ou pas pour certains - reprendre la même trame, et nous croque à nouveau un formidable rollercoaster télévisuel à la sauce multigénérationnelle (les adultes, les ados, les enfants), comblant les petites lacunes de ses illustres ainées tout en transcendant avec une générosité incroyable, ses nombreuses qualités.
Catapulté en 1985 en pleine effervescence d'un l'été brûlant saupoudré d'un soupçon de Guerre Froide (inhérent à l'époque même si un poil dispensable), Stranger Things 3 s'offre une intrigue mère autant sérieuse que solide (exit l'effet de surprise et la présentation des personnages, les frangins Duffer rentrent tout de suite dans le vif du sujet), rythmée au cordeau avec un suspens intelligemment ménagé et un développement des personnages très malin : on les fait rentrer de plein fouet dans les affres de l'adolescence (surtout Elfe/Onze, qui s'affirme de plus en plus comme ce qu'elle doit être : une jeune fille comme les autres), entre les premiers émois amoureux et la défiance d'une amitié jadis indéfectible de jeunes héros construisant gentiment mais sûrement les adultes qu'ils seront demain, le tout avec une menace plus imposante que jamais, qui grandit dans l'ombre.
C'est quand elle épouse pleinement la carte du teen movie banal mais pas moins passionnant à suivre, que la série touche son auditoire avec le plus de justesse, tant les sentiments et les passages obligés entre l'enfance et la vie un brin plus mature, sont d'une universalité déchirante.
Plus rien ne sera comme avant passé cet été, et le show le montre aussi bien dans l'intimité des héros, que dans une véritable apocalypse télévisée, spectaculaire et grisante, mise en boîte avec maîtrise (une mise en scène étonnamment appliquée et tutoyant même la grâce sur certaines séquences purement horrifiques) et référencée à mort, et qui s'articule comme la saison 2 : séparer ses héros pour mieux les réunir dans un final dantesque et tragique (la disparition d'Hopper... même si tout ne semble pas perdu et qu'un retour est toujours possible, et teasé dans la scène post-générique du season final)
Plus épurée que les précédentes saisons (huit épisodes, ce qui bonifie grandement la fluidité de l'intrigue et laisse peu de place aux sous-intrigues expédiées à la va-vite), laissant un brin de côté les adultes (Jim et Joyce, qui stagnent gentiment dans leur relation et leur développement, surtout que ce dernier se transforme clairement en quadra toxique, les nouveaux personnages qui peinent pleinement à s'intégrer, comme trop souvent) mais jouant avec fougue la carte de la nostalgie à tous les étages mais surtout en mettant clairement les bouchées doubles du côté de l'horreur pure et jouissivement graphique - violente et franchement ténébreuse -; Stranger Things saison 3 est sans contestation possible la saison la plus addictive et réussite du show.
Qu'on se le dise, la miraculeuse bulle pop et nostalgique de Netflix n'a pas perdu une once de sa magie et en a encore dans le ventre, et il est déjà très, très dur de devoir attendre la suite...
Jonathan Chevrier