[CRITIQUE] : The Lost Daughter
Réalisatrice : Maggie Gyllenhaal
Avec : Olivia Colman, Dakota Johnson, Jessie Buckley, Oliver Jackson-Cohen, Peter Sarsgaard, Paul Mescal, Ed Harris,...
Distributeur : Netflix France
Nationalité : Américain, Grec.
Genre : Drame
Durée : 2h02min
Synopsis :
Lors de vacances à la mer en solitaire, Leda est fascinée par une jeune mère et sa fille qu'elle observe sur la plage. Bouleversée par leur relation fusionnelle (ainsi que par leur grande famille bruyante et intimidante), Leda est submergée par la terreur, la confusion et l'intensité de ses souvenirs de maternité précoce. Un acte impulsif la replonge dans les méandres étranges et inquiétants de son esprit, l'obligeant à affronter les choix peu conventionnels qui ont été les siens en tant que jeune mère et leurs conséquences.
Critique :
Professeure en université, Lena espère profiter de ses vacances sur les rives d'une paradisiaque île grecque, pour trouver le calme qu'elle est venu chercher, et préparer tranquillement l'année scolaire à venir.
Le problème c'est que l'abandon et la quiétude qu'elle désire, elle ne les trouvera jamais tant tout vacille dès son arrivée et sa rencontre avec Nina, une jeune mère au bout du rouleau.
Sans forcément le vouloir, cette jeune mère la renvoie non seulement aux années où elle-même, maman de deux petites filles, luttait pour mener à bien sa vie de femme et ses ambitions professionnelles, totalement écrasées par son rôle de mère; mais aussi à tous les remords et toutes les pensées négatives, honteuses et secrètes qui l'avaient insidieusement envahis, jusqu'à ce qu'elle commette l'impensable.
Lena pourra-t-elle sauver Nina des erreurs qu'elle connaît trop bien ?
Ou cette reconnaissance partagée signifie-t-elle qu'elle en veut à Nina d'incarner un rappel sinistre de tous ses regrets ?
Même si elle a su mener une carrière savamment hors des radars, marqués par des choix forts et singuliers - aussi bien sur le petit que sur le grand écran -, rien ne laissait pourtant présager que la talentueuse Maggie Gyllenhaal soit une conteuse aussi naturelle derrière la caméra.
Prenons désormais cette vérité pour acquise avec son superbe The Lost Daughter, adaptation du roman éponyme d'Elena Ferrante (Poupée Volée par chez nous) prenant les courbes d'un passionnant et inquiétant thriller psychologique sur le voyage intérieur d'une femme à la dérive (porté par une tension constante qui laisse toujours présager que quelque chose de mal va produire... ou s'est déjà produit), questionnant son auditoire et, par la même occasion, la société sur les limites de la maternité (toutes femmes ont-elles besoin de devenir mères ? Devraient-elles abandonner leurs propres désirs au service de leurs enfants ?).
Délibérément floue autant dans sa mise en scène (à la fois déconnectée et intime, bien aidée par la photographie inspirée d'Hélène Louvart) que dans sa narration fluide entre le passé - via des flashbacks - et le présent de Lena, le film se fait comme une chute dans le vide au ralenti, où l'on assiste impuissant à une inéluctable (auto)destruction d'une âme isolée incapable de se pardonner ni même à accepter ses actes et son passé.
Embrassant un sujet que le septième art ne devrait plus fuir (les tabous de la maternité mais surtout la lutte d'une femme avec le manque d'épanouissement de son rôle de mère, qu'avait à peine esquissé, il y a quatre décennies déjà, Kramer contre Kramer), Gyllenhaal, qui ne cherche jamais à rendre plus agréable ou linéaire son expérience (quitte à même surjouer des sous-entendus), sublime la fragilité et l'agonie d'une femme foncièrement antipathique, mais dont la douleur et la gêne sont incroyablement contagieuses : l'important n'est pas d'apprécier Lena, mais avant toute chose de la comprendre.
Dominé de la tête et des épaules par une Olivia Colman absolument renversante et captivante (et à qui Jessie Buckley, incarnant une version plus jeune de son personnage, répond à la perfection dans une performance toute aussi viscérale et nuancée), The Lost Daughter est un sauvage, captivant et sensuel drame/thriller psychologique dont l'honnêteté titille autant qu'elle peut pousser à la réflexion, dans sa belle mise en bouteille d'une femme prise entre son désir de vivre sa vie librement en s'extirpant des responsabilités asphyxiantes et du devoir de diligence que l'on attend d'elle.
Sans le moindre jugement, Maggie Gyllenhaal fustige le conformisme et le traumatisme d'une oppression patriarcale de la société contemporaine, en montrant que toutes les femmes ne sont pas faites pour être mère, et qu'il faut simplement le, et surtout les, comprendre.
Jonathan Chevrier
Avec : Olivia Colman, Dakota Johnson, Jessie Buckley, Oliver Jackson-Cohen, Peter Sarsgaard, Paul Mescal, Ed Harris,...
Distributeur : Netflix France
Nationalité : Américain, Grec.
Genre : Drame
Durée : 2h02min
Synopsis :
Lors de vacances à la mer en solitaire, Leda est fascinée par une jeune mère et sa fille qu'elle observe sur la plage. Bouleversée par leur relation fusionnelle (ainsi que par leur grande famille bruyante et intimidante), Leda est submergée par la terreur, la confusion et l'intensité de ses souvenirs de maternité précoce. Un acte impulsif la replonge dans les méandres étranges et inquiétants de son esprit, l'obligeant à affronter les choix peu conventionnels qui ont été les siens en tant que jeune mère et leurs conséquences.
Critique :
Dominé de la tête et des épaules par un duo Olivia Colman/Jessie Buckley absolument renversant, #TheLostDaughter est un sauvage, captivant et sensuel thriller psychologique sur les limites de la maternité, dont l'honnêteté titille autant qu'elle pousse férocement à la réflexion. pic.twitter.com/LIlUa8XcFt
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) December 31, 2021
Professeure en université, Lena espère profiter de ses vacances sur les rives d'une paradisiaque île grecque, pour trouver le calme qu'elle est venu chercher, et préparer tranquillement l'année scolaire à venir.
Le problème c'est que l'abandon et la quiétude qu'elle désire, elle ne les trouvera jamais tant tout vacille dès son arrivée et sa rencontre avec Nina, une jeune mère au bout du rouleau.
Sans forcément le vouloir, cette jeune mère la renvoie non seulement aux années où elle-même, maman de deux petites filles, luttait pour mener à bien sa vie de femme et ses ambitions professionnelles, totalement écrasées par son rôle de mère; mais aussi à tous les remords et toutes les pensées négatives, honteuses et secrètes qui l'avaient insidieusement envahis, jusqu'à ce qu'elle commette l'impensable.
Lena pourra-t-elle sauver Nina des erreurs qu'elle connaît trop bien ?
Ou cette reconnaissance partagée signifie-t-elle qu'elle en veut à Nina d'incarner un rappel sinistre de tous ses regrets ?
Copyright Yannis Drakoulidis/Netflix |
Même si elle a su mener une carrière savamment hors des radars, marqués par des choix forts et singuliers - aussi bien sur le petit que sur le grand écran -, rien ne laissait pourtant présager que la talentueuse Maggie Gyllenhaal soit une conteuse aussi naturelle derrière la caméra.
Prenons désormais cette vérité pour acquise avec son superbe The Lost Daughter, adaptation du roman éponyme d'Elena Ferrante (Poupée Volée par chez nous) prenant les courbes d'un passionnant et inquiétant thriller psychologique sur le voyage intérieur d'une femme à la dérive (porté par une tension constante qui laisse toujours présager que quelque chose de mal va produire... ou s'est déjà produit), questionnant son auditoire et, par la même occasion, la société sur les limites de la maternité (toutes femmes ont-elles besoin de devenir mères ? Devraient-elles abandonner leurs propres désirs au service de leurs enfants ?).
Délibérément floue autant dans sa mise en scène (à la fois déconnectée et intime, bien aidée par la photographie inspirée d'Hélène Louvart) que dans sa narration fluide entre le passé - via des flashbacks - et le présent de Lena, le film se fait comme une chute dans le vide au ralenti, où l'on assiste impuissant à une inéluctable (auto)destruction d'une âme isolée incapable de se pardonner ni même à accepter ses actes et son passé.
Embrassant un sujet que le septième art ne devrait plus fuir (les tabous de la maternité mais surtout la lutte d'une femme avec le manque d'épanouissement de son rôle de mère, qu'avait à peine esquissé, il y a quatre décennies déjà, Kramer contre Kramer), Gyllenhaal, qui ne cherche jamais à rendre plus agréable ou linéaire son expérience (quitte à même surjouer des sous-entendus), sublime la fragilité et l'agonie d'une femme foncièrement antipathique, mais dont la douleur et la gêne sont incroyablement contagieuses : l'important n'est pas d'apprécier Lena, mais avant toute chose de la comprendre.
Copyright Yannis Drakoulidis/Netflix |
Dominé de la tête et des épaules par une Olivia Colman absolument renversante et captivante (et à qui Jessie Buckley, incarnant une version plus jeune de son personnage, répond à la perfection dans une performance toute aussi viscérale et nuancée), The Lost Daughter est un sauvage, captivant et sensuel drame/thriller psychologique dont l'honnêteté titille autant qu'elle peut pousser à la réflexion, dans sa belle mise en bouteille d'une femme prise entre son désir de vivre sa vie librement en s'extirpant des responsabilités asphyxiantes et du devoir de diligence que l'on attend d'elle.
Sans le moindre jugement, Maggie Gyllenhaal fustige le conformisme et le traumatisme d'une oppression patriarcale de la société contemporaine, en montrant que toutes les femmes ne sont pas faites pour être mère, et qu'il faut simplement le, et surtout les, comprendre.
Jonathan Chevrier