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[CRITIQUE/RESSORTIE] : Quatre nuits d'un rêveur


Réalisateur : Robert Bresson
Acteurs : Guillaume des Forêts, Isabelle Weingarten, Patrick Jouané, Jean-Maurice Monnoyer,...
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Français.
Durée : 1h23min.

Date de sortie : 2 février 1972
Date de ressortie : 19 février 2025

Synopsis :
Une nuit, à Paris, Jacques sauve Marthe d’un saut tragique du Pont-Neuf. Alors qu’ils se livrent l’un à l’autre, ils décident de se revoir. Durant quatre soirées, Jacques réalise qu’il tombe profondément amoureux. Mais qu’en est-il des sentiments de Marthe à l’égard de Jacques ?




Critique :



Dîtes, vous reprendrez bien une petite douceur Bressonienne - et en version restaurée 4K, pour ne rien gâcher -, en cette fin d'hiver particulièrement riche en ressorties gentiment essentielles, allant de Robert Altman (Buffalo Bill et les Indiens) à Miike (Ichi The Killer), en passant par quelques péloches de Julien Duvivier ?
Ne cherchez pas, la réponse est oui et encore plus pour un chef-d'œuvre resté invisible pendant plus d'un demi siècle, tel que Quatre nuits d'un rêveur.

Sans doute le cinéaste de la Nouvelle Vague à avoir le plus ouvertement explorer la notion de foi, mais aussi et surtout celui avec le plus d'accointances avec la littérature russe, il n'y avait donc aucune surprise à le voir s'aligner dans la continuité de Luchino Visconti (le magnifique Nuits Blanches, déjà dégainé par Carlotta Films dans une ressortie toute pimpante mi-décembre), en adaptant à son tour et pour la seconde fois (après Une femme douce) la nouvelle Nuits blanches de Dostoïevski, à travers une romance résolument plus minimaliste et mélancolique - sans pour autant laisser de côté une noirceur joliment enivrante -, flanqué dans un éblouissant Paris nocturne des 70s (superbe photographie de Pierre Lhomme) où la jeunesse post-mai 68 ne semble pas avoir encore perdu son cœur et ses illusions.

CARLOTTA FILMS

L'histoire s'attache à celle de Jacques, un dandy artiste amateur et oisif qui tente de s'imprégner de l'ambiance de la vie nocturne de la rive gauche autant que de rencontrer tout âme féminine capable de faire chavirer son cœur.
Alors qu'il se promène de nuit sur le pont Neuf, il croise la route de Marthe, qui tente de sauter dans la Seine dans ce qui est une tentative désespérée d'enlacer la grande faucheuse, éprise qu'elle est d'un homme qui n'a jamais voulu la revoir.
Prédisposé à s'amouracher au premier regard (ou, tout du moins, à projeter son idéal obsessionnel et insaisissable sur la moindre de ses rencontres), Jacques tombe immédiatement amoureux de cette jeune et respectable jeune femme, qu'il reverra - et tentera de courtiser avec une dévotion tendre - au cours des trois nuits suivantes, où ils n'auront de cesse de se confier leurs chagrins d'amour et d'enrichir une relation vouée à la frustration et à l'échec...

Chronique désenchantée à l'immédiateté subtile et puissante, sur deux solitudes romantiques et idéalistes aux élans douloureusement retenus (une magnifique superbe et tourmentèe Isabelle Weingarten, un charismatique Guillaume des Forêts), douloureusement unis par ce qui les sépare; Quatre nuits d'un rêveur se fait un merveilleux drame tout en errance et en désespérance, au romantisme aussi pur et sincère qu'il est dénué de tout pathos superflu.
Quand Bresson pose son regard mordant et sensuel, sous une lune complexe et changeante, sur une jeunesse en pleine détresse romantique, le résultat ne peut qu'incarner quatre nuits précieuses auxquelles il est difficile de ne pas succomber...


Jonathan Chevrier