[CRITIQUE] : Beloved
Avec : Eran Naim, Stav Almagor, Stav Patai,...
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Israélien.
Durée : 1h48min.
Synopsis :
Infirmière dévouée dans un hôpital de Tel-Aviv, Avigail mène une existence effacée entre sa fille adolescente et son mari Rashi. Le jour où ce dernier est ébranlé dans sa vie professionnelle, la fragilité de son couple lui apparaît brutalement. Elle réalise n’être plus vraiment maitresse de ses choix de vie. Saura-t-elle se reconnecter à elle-même ?
Critique :
En offrant un regard pertinent sur l'Israël d'aujourd'hui, tout en s'interrogeant sur la place des femmes, Yaron Shani, qui n'a pas peur de la complexité de l'âme humaine et de ses contradictions, fait de #Beloved le portrait lumineux d'une femme généreuse au carrefour de sa vie. pic.twitter.com/iPSWVR8oDO— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) July 15, 2020
Il y a quelque chose de profondément enthousiasmant à l'idée de pouvoir découvrir en à peine une semaine d'intervalle, deux oeuvres qui se répondent sans qu'elles n'impliquent forcément, d'être découvertes ensemble, même si tous ceux ayant eu la chance de pouvoir découvrir Chained, ne pourront que vivement vous encourager à faire de même avec Beloved - et inversement.
Aussi bien jumeau sur la forme (épurée et solidement interprété, qui se détourne volontairement du cinéma traditionnel, pour mieux la frontière tenue entre le documentaire et la fiction, une absence jamais plombante de musique,...), que diamétralement opposé dans le fond (l'accent est ici placé sur l'autre versant des liens filiaux, l'instinct maternel), au précédent film de Yaron Shani, lui aussi exemple parfait de cinéma-vérité bouleversant, Beloved quitte l'attitude toxique et horriblement protectrice de Rashi, pour se focaliser sur l'aura solaire de sa compagne Avigail.
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Il s'extirpe de l'expérience anxiogène et tendu prônant l'hermétisme et le renfermement sur soi, pour plonger corps et âme dans une chronique lumineuse, anti-violente (mais pas dénuée d'obscurité et de douleurs), intime et profondément féministe.
Toute aussi radicale dans sa vérité, le film suit l'introspection non sans heurt, de l'effacée Avigail, mère inquiète et femme sous pression, désespérée à l'idée de briser la relation qu'elle entretient avec sa fille (qui ne supporte plus l'autorité de son beau-père), autant que de ne pas pouvoir donner un enfant à son époux, compliquant un couple dont les sentiments amoureux sont (déjà) une histoire ancienne.
Son quotidien est étouffant, et elle se doit de trouver la moindre respiration extérieure, sous peine d'imposer... alors elle s'en éloigne, et recherche quelques parcelles de vie ailleurs.
Et elle en trouve auprès d'autres femmes comme elle, des soutiens empathiques qui connaissent ses difficultés - tout simplement parce qu'elles les vivent aussi -, mais qui sont plus sûrs d'elles, et qui décident de goûter ne serait-ce que fugacement, à un épanouissement mérité et salutaire.
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Regard plus doux mais pas moins pertinent, sur la société israélienne contemporaine, s'interrogeant subtilement sur la place des femmes (leurs statuts de mères, d'épouses et de femmes tout court) et la légitimité de leur quête de bonheur, Shani, qui a une nouvelle fois jamais peur de la complexité de l'âme humaine et de ses contradictions, dresse le portrait édifiant et lumineux d'une femme au grand coeur au carrefour de son existence, psychologiquement et sentimentalement parlant.
Une claque au moins aussi importante et imposante que Chained.
Jonathan Chevrier