[CRITIQUE] : Une part manquante

Réalisateur : Guillaume Senez
Acteurs : Romain Duris, Judith Chemla, Mei Cirne-Masuki, Yumi Narita,....
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Belge, Français, Japonais.
Durée : 1h38min.

Synopsis :
Tous les jours, Jay parcourt Tokyo au volant de son taxi à la recherche de sa fille, Lily. Séparé depuis 9 ans, il n’a jamais pu obtenir sa garde. Alors qu’il a cessé d’espérer la revoir et qu’il s’apprête à rentrer en France, Lily entre dans son taxi…

Critique :

Dans la lignée de ses précédents efforts, Guillaume Senez fait de #LaPartManquante se fait un puissant drame, sensible et empathique, qui ne vise pas tant une vulgaire confrontation homme/femme, qu'à offrir un portrait mesuré d'une figure partenelle amputée de son désir d'être. pic.twitter.com/VypcXcArzm
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) November 14, 2024

Évidemment, la comparaison est un peu vulgaire voire même putassière mais pourtant, difficile de ne pas voir quelques points de concordances entre le magnifique Perfect Days de Wim Wenders, sorti il y a quasiment un an jour pour jour, et le délicat Une part manquante du cinéaste belge Guillaume Senez, dans la manière que celui-ci aborde avec un regard différent, respectueux et impliqué, dénué de tout fétichisme, la société japonaise et ses codes pas toujours compréhensibles et/où assimilables pour les occidentaux que nous sommes.

Notamment en ce qui concerne son mécanisme juridique, la garde des enfants et les droits parentaux après le divorce, tant son système de garde exclusive amène à ce qu'un parent puisse être incapable de contacter son enfant après une séparation - et encore plus pour un parent étranger -, même en payant une pension alimentaire.

Dans le même mouvement que ses premiers efforts (sonder la complexité des dynamiques familiales et la responsabilité intime de chacune de ses figures), mais surtout de Nos Batailles, pour lequel il retrouve d'ailleurs un Romain Duris des grands jours, il s'attache aux aléas de Jérôme - familièrement appelé Jay -, un quadragénaire installé dans le pays du Soleil Levant depuis neuf ans, après avoir perdu contact avec sa fille Lily, issue de son union avec Keiko, et qu'il n'a eu de cesse de rechercher depuis - les lois japonaises reconnaissent comme autorité parentale celle du conjoint qui a la garde l'enfant au moment de la rupture.

Ancien chef cuisinier, il travaille désormais comme chauffeur de taxi la nuit afin d'avoir ses matinées libres pour tenter, discrètement, de la retrouver.
Un soir, il fait la connaissance par l'intermédiaire de son avocat, qui le pousse à divorcer de Keiko (ce qu'il refuse, pour ne pas perdre toute possibilité de lien avec Lily), d'une autre " gaijin ", une française dans le même cas de figure que lui, Jessica, qui est bouleversée par le fait qu'on lui ait fraîchement enlevé son jeune enfant, et qu'il va accompagner dans son propre calvaire qui ressemble douloureusement au sien.
Mais un jour, alors qu'il était prêt à tout abandonner, il retrouve enfin sa fille désormais âgée de douze ans...

S'il revisite un territoire familier (Nos Batailles, encore une fois) au cœur d'un Tokyo totalement déglamourisé, vissé sur le malheur d'un mari négligeant mais père aimant, qui ne demande qu'à se voir offrir une seconde chance et ainsi renouer avec la chair de sa chair, Une part manquante se fait pourtant un puissant drame, sensible et empathique, qui ne vise pas tant une vulgaire confrontation homme/femme (le personnage de Keiko est merveilleusement nuancé et jamais diabolisé, elle qui est avant tout une femme qui a souffert en silence de sa situation), qu'à offrir un portrait racé et mesuré d'une figure partenelle amputée de son désir d'être.

Une sacrée réussite, rien de moins.

Jonathan Chevrier