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[CRITIQUE] : Le Bonheur est pour demain


Réalisatrice : Brigitte Sy
Acteurs : Laetitia Casta, Damien Bonnard, Béatrice Dalle, Guillaume Verdier,...
Distributeur : Paradis Films
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h37min.

Synopsis :
Sophie a un enfant, un conjoint, mais son quotidien lui semble désespérément plat, sans plaisir, sans envies. Jusqu’au jour où elle rencontre Claude. Il est drôle, séduisant, intelligent. Elle tombe immédiatement sous le charme. Mais Claude n’est pas un prince charmant. C’est un braqueur. Or, au cours d’une attaque de banque, un homme est tué. Claude est arrêté et condamné à une lourde peine de prison. Ce qui aurait dû être la fin devient alors le début d’une histoire folle, passionnelle et sans limites. Soutenue par Lucie, la mère de Claude, Sophie ne renonce pas à son amour pour Claude. Elle est prête à aller jusqu’au bout. Quelles qu’en soient les conséquences.



Critique :


Quand Laetitia Casta, à la carrière résolument éclectique ses dernières années, ne brille pas devenant la caméra de son mari Louis Garrel, à travers des péloches qui elles ne le sont pas toujours (La Croisade était plutôt chouette, L'homme Fidèle nettement moins), la comédienne reste en famille puisqu'elle tourne avec sa belle-maman, Brigitte Sy, absente des plateaux depuis 2015 et le très beau L'Astragale (chronique intime et douloureuse d'un amour éprouvé par la vie et l'éloignement, capturée dans un noir et blanc aussi fiévreux que l'interprétation de son sublime couple Leïla Bekhti et Reda Kateb).

Copyright Paradis Films

Une affaire de famille donc (puisqu'elle y tourne même avec son propre fils, Rocco), pour un troisième long-métrage, Le Bonheur est pour demain, qui n'est in fine pas si éloigné du précédent qui, lui-même déjà, rappelait son premier effort, Les Mains libres, ou elle mettait en scène l'histoire d'une cinéaste qui se frotte à l'univers carcéral pour l'écriture d'un film, avant de tomber amoureuse de l'un des prisonniers.
La sempiternelle déclinaison d'une seule et même histoire finalement, la sienne (elle a épousé un ex-détenu, rencontré alors qu'elle enseignait le théâtre en prison), sous couvert de la fiction et de quelques inserts romanesques - quand bien même elle s'inspire une fois encore, de plusieurs histoires vraies.

Son " pendant " cinématographique est cette fois Sophie, mère de famille dont le quotidien au cœur des années 90, est morne et sans vie auprès d'un compagnon toxicomane qui ne lui fait pas espérer des lendemains qui chantent (pas même des aujourd'hui).
Mais tout bascule lorsqu'elle fait la rencontre presque providentielle de Claude, et que la flèche de Cupidon les transperce tous les deux.
Drôle et charmeur mais avec un vrai cœur tendre à l'intérieur, le bonhomme est aussi et surtout un braqueur professionnel qui, à la suite de l'attaque d'une banque qui tourne mal - avec un mort à la clé -, prend une lourde peine de prison : trente ans.

Copyright Paradis Films

Un évènement tragique qui mettra à l'épreuve son amour naissant avec Sophie, alors même qu'elle porte son enfant.
Mais parce que l'amour a ses raisons que la raison elle-même ignore, Sophie, soutenue par la mère de Claude (bouffée autant par le sida, que par la culpabilité de ne pas avoir été la matriarche qu'elle aurait dû/voulu être), va tout faire, quitte à multiplier les sacrifices, pour que leur amour survive...

Portrait vibrant au plus près des corps et des cœurs, d'une femme amoureuse qui n'a peur de rien dans sa lutte pour préserver une flamme sans laquelle elle ne pourrait pas/plus vivre, Brigitte Sy, qui vogue en mer conquise (un univers carcéral qu'elle connaît intimement), tout en embrassant pleinement les contradictions physiques et psychologiques de toute passion existant en-dehors et entre les barreaux (à la fois l'urgence de vivre les instants fugaces des retrouvailles, et la lente et destructrice attente entre elles), explore ici avec justesse la question de l'amour empêché et sous conditions, de celui qui impose des contraintes comme des peines et des combats quotidiens (la douleur de l'absence, l'angoisse du doute face à la vérité d'un monde répressif et violent, qui détruit tout), pour être préservé.

Copyright Paradis Films

Passionné et désenchanté, éprouvant les âmes autant qu'il célèbre la folie (nécessaire) d'un amour deraisonné qui tente de subsister coûte que coûte malgré l'adversité, qu'il véhicule la nécessité de préserver sans relâche ce qui peut l'être, Le Bonheur est pour demain se fait un lucide et doux-amer drame, dominé de la tête et des épaules à la fois par la partition enflammée de Laetitia Casta, que celle tout en délicatesse de Béatrice Dalle.


Jonathan Chevrier