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[CRITIQUE] : Un Silence


Réalisateur : Joachim Lafosse
Acteurs : Daniel Auteuil, Emmanuelle Devos, Jeanne Cherhal, Louise Chevillotte,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Belge, Français.
Durée : 1h39min.

Synopsis :
Silencieuse depuis 25 ans, Astrid la femme d’un célèbre avocat voit son équilibre familial s’effondrer lorsque ses enfants se mettent en quête de justice.



Critique :


On avait laissé le délicat cinéma de Joachim Lafosse fin 2021 avec le déchirant Les Intranquilles, drame familial jouant jusqu'à l'extrême avec les limites de l'amour et de la vie de couple (une habitude chez le cinéaste belge), tout autant qu'il scrutait comment la maladie - ici mentale - empoisonne tout, même les coeurs les plus aimants, ne masquant jamais le bal des douleurs qui l'accompagne.

Copyright Films du Losange

De drame familial et d'auscultation de sphères intimes, il en est, évidemment, à nouveau question avec son dixième effort, Un Silence, tissé à partir de la complexe affaire Hissel (l'ancien avocat des familles victimes de Marc Dutroux, condamné à 10 mois de prison pour détention d’images à caractère pédopornographique, puis poignardé par son propre fils, lui-même condamné par la suite), nouvelle plongée sombre et tortueuse dans les méandres des secrets d'une famille rongée par le mal.

Soit les Schaar, dont le silence induit par le titre est à la fois la cause (celui d'une vérité qui se sait et se tait) et la résultante (la gangrène se fait complexe du mal, et accentue ses ravages) de maux insolubles - des violences sexuelles sur mineurs et la pédopornographie.
La caméra ne quitte jamais cette cellule familiale et sa demeure (aussi obscure que peuvent l'être les âmes), comme pour mieux confronter son auditoire à l'étouffement consentis et désespéré d'une vérité intenable qui menace d'exploser, de tout exploser, sous le poids d'une énergie consciemment contradictoire : se taire parce que l'on peut rien faire d'autre, se taire parce que cela en devient presque vital.

Copyright Films du Losange

Dévoilant lentement les stigmates des Schaar via une structure à rebours, Lafosse est moins intéressé comme pourrait l'être un Michael Haneke, par l'idée d'ériger une allégorie sombre et ambiguë du noyau bourgeois, que par celle plus primaire et dévastatrice, de présenter une famille et son silence face à ces atrocités, comme une entité malade nouée autour du combat moral et existentielle d'une mère (formidable Emmanuelle Devos), qui ne sait pas/plus si c'est le mensonge ou la vérité qui peut sauver les siens, complètement absorbée, paralysée par la peur de regarder dans le rétroviseur du passé.

Un drame pudique et authentique, comme l'orfèvre belge sait si bien les faire.


Jonathan Chevrier


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