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[CRITIQUE] : Il Boemo


Réalisateur : Petr Vaclav
Avec : Vojtěch Dyk, Barbara RonchiElena Radonicich,...
Distributeur : Nour Films
Budget : -
Genre : Biopic, Historique.
Nationalité : Tchèque, Italien, Slovaque.
Durée : 2h20min

Synopsis :
1764. Dans une Venise libertine, le musicien et compositeur Josef Myslivecek, surnommé « Il Boemo », ne parvient pas à percer malgré son talent. Sa liaison avec une femme de la cour lui permet d’accéder à son rêve et de composer un opéra. Dès lors sa renommée grandit, mais jusqu’où ira-t-il ? La vie, l’œuvre et les frasques d’un compositeur de génie oublié que le jeune Mozart admirait.



Critique :


Plus qu'un simple biopic visant à réhabiliter une figure méconnue de la musique classique (ainsi que son œuvre elle-même), le compositeur tchécoslovaque Josef Mysliveček - surnommé « le Bohémien », d'où le titre -, Il Boemo de Petr Vaclav se veut une immersion réaliste et fouillée entre une Vienne libertine et Naples, au coeur du XVIIIe siècle, à une heure de bouleversement musical absolument vertigineux.

Par delà la courte mais intense carrière de son sujet, génie oublié mort dans la pauvreté et la solitude dans les rues de Rome, le film tire toute sa puissance et prend même tout son sens par son simple geste à vouloir faire revivre toute une époque à l'écran, par la reconstruction minutieuse d'un passé embaumé par la mort, tant son cinéaste s'intéresse in fine tout autant aux événements historiques et au compositeur lui-même, qu'au déroulement et aux frasques d'un quotidien typique d'un autre temps.

Copyright Nour Films

Un parti pris culotté mais payant, tant son déploiement généreux d'accessoires et de costumes, sa représentation exigeante titille la rétine et expurge de tout académisme barbant ce portrait enlevée et follement romanesque d'un artiste acclamé - même par Mozart lui-même -, faisant soulever les foules avant de se faire ravager par la syphilis.
Et au fond avec Il Boemo, tout n'est qu'une question d'ivresse, si tenté qu'on accepte l'invitation qu'il nous ait faite.

Très vite les scènes se dilatent, l'intrigue se dilue (sans pour autant paraître insiginifiante, bien qu'elle se résume assez facilement aux nombreuses conquêtes que Mysliveček à consommé et consumé, et qu'elle est sensiblement hypertrophié par ses ellipses), les images prennent de la profondeur et de l'épaisseur par la force d'une mise en scène discrètement ravageuse, finalement tout aussi proche du Chronique d'Anna Magdalena Bach de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub que du Amadeus de Miloš Forman (avec un doigt du pessimisme d'Albert Serra), dans sa manière de faire voyager le spectateur dans le temps à travers la musique elle-même, retranscrite avec un profond respect.

Comme si le cinéaste avait pleinement conscience que, pour surplomber ses contraintes anthropologiques et les quelques maladresses de sa narration, il lui fallait s'abandonner, respirer le parfum d'une époque et de ses sonorités, pour marquer son auditoire.

Copyright Nour Films

Plus que le portrait d'un homme brillant et imparfait, espiègle et malheureux qui se cachait sous les masques, Il Boemo se fait un splendide devoir de mémoire, presque un acte de justice mélomane dans une morosité culturelle presque cultivée, Petr Vaclav (avec la photographie naturelle de Diego Romero), définissant chacune de ses séquences comme un mouvement musical, certes pas toujours mélodieux, mais définitivement stimulante et captivante.


Jonathan Chevrier


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