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[CRITIQUE] : Divertimento


Réalisatrice : Marie-Castille Mention-Schaar
Avec : Oulaya Amamra, Lina El Arabi, Niels Arestrup, Zinedine Soualem,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame, Biopic.
Nationalité : Français.
Durée : 1h50min

Synopsis :
À 17 ans, Zahia Ziouani rêve de devenir cheffe d’orchestre. Sa sœur jumelle, Fettouma, violoncelliste professionnelle. Bercées depuis leur plus tendre enfance par la musique symphonique classique, elles souhaitent à leur tour la rendre accessible à tous et dans tous les territoires. Alors comment peut-on accomplir ces rêves si ambitieux en 1995 quand on est une femme, d’origine algérienne et qu’on vient de Seine-Saint-Denis ? Avec détermination, passion, courage et surtout le projet incroyable de créer leur propre orchestre : Divertimento.


Critique :


Il y a une douce ironie dans ce que le hasard (où non) du calendrier des sorties peut produire, comme de faire s'opposer le même mercredi deux oeuvres il est vrai foncièrement différentes - Tár de Todd Field et Divertimento de Marie-Castille Mention-Schaar -, alors qu'elles ont toutes les deux la particularité de mettre en lumière au coeur de l'histoire, des femmes à la tête d'un orchestre symphonique là où, statistiques à l'appuie, elles ne sont 4% en France à pouvoir tenir cette profession, et seulement 6% dans le monde.
Ironie voire même un certain cynisme donc, dans le fait de voir notre distribution hexagonale divisée par deux la potentielle portée que pourrait glaner chacun de ses films dans leur volonté louable de faire évoluer la conscience citoyenne de ses spectateurs, face à des milieux où la discrimination et le sexisme ne sont pas simplement monnaie courante, mais surtout furieusement institutionnalisées.
Si le dernier long-métrage de Field suit le parcours troublé du thriller, celui de Mention-Schaar, qui fait suite au maladroit - pour être poli - A Good Man, prend le parti d'un biopic bien moins conventionnel et familier qu'annoncé sur le papier.

Copyright Guy FERRANDIS - 2022 ESTELLO FILMS - EASY TIGER - FRANCE 2 CINÉMA

En s'attachant à conter l'histoire vraie de la cheffe d'orchestre Zahia Zihouani (et moins directement, de sa soeur Fettouma, violoncelliste professionnelle), la cinéaste sonde une double marginalisation/discrimination - sociale et de genre - au travers du parcours de son héroïne qui, loin de se complaire dans une vision individualiste, prône avec sincérité et enthousiasme l'inclusion.
En ancrant sa caméra dans un réalisme palpable tout en rendant hommage à une profession exigeante (articulée autour du don de soi et de la transmission d'une passion inébranlable pour la musique), Mention-Schaar n'isole jamais son héroïne, elle en fait un catalyseur de positivisme et de détermination au sein même de son environnement familial, social et professionnel.
Une figure (la pétillante Oulaya Amamra, juste exceptionnelle) qui s'épanouit tout comme l'art, dans la communion avec les autres, le désir de rendre accessible le (faussement) inaccessible (la " grande musique " aux quartiers populaires), de partager et de pousser à la réflexion - où au minimum à l'ouverture d'esprit - par la force d'une ténacité et d'une abnégation à toute épreuve.
Alors certes, si certains devraient tiquer sur sa bienveillance (très) prononcée, impossible pourtant de totalement remettre en cause l'honnêteté d'une oeuvre chorale qui transmet de manière vibrante et poétique l'exaltation de la création musicale et de son expression à travers le corps et les coeurs.
Une belle leçon de courage et un vrai beau moment musical et de cinéma.


Jonathan Chevrier