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[CRITIQUE] : Resurrection


Réalisateur : Andrew Semans
Acteurs : Rebecca Hall, Tim Roth, Grace Kaufman,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Thriller, Épouvante-horreur, Policier.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h43min.

Synopsis :
Une mère de famille épanouie doit faire face à la soudaine réapparition d’un ancien amant sadique.



Critique :


Il y a quelque chose de profondément frustrant à l'idée de se dire qu'une comédienne - et désormais cinéaste - de la trempe de Rebecca Hall, n'attire pas plus que de raison le regard des cinéphiles et autres spectateurs plus où moins avertis, à chacune de ses nouvelles péloches, même si celles-ci n'atteignent pas toujours les salles obscures (et encore moins nos plateformes de streaming).
Sorti directement par la case VOD ces jours-ci, Resurrection du scénariste et réalisateur Andrew Semans offre pourtant aussi bien sa performance la plus éclatante à ce jour, mais aussi et surtout l'un des meilleurs thrillers de cette riche et prolifique année 2022, dont l'édifice repose entièrement sur le pacte qu'il scelle avec son auditoire dans un monologue aussi captivant que glaçant.
Allant bien au-delà du carcan du thriller psychologico-paranoïaque pour viser une expérience encore plus déroutante et primitive pour son auditoire, le film scrute la lente descente aux enfers d'une mère de famille/cadre pharmaceutique, Margaret, dont le quotidien discipliné et à la limite du sado-masochisme, va vite basculer avec le retour inopiné et menaçant de David, un ancien amant violent et manipulateur.

IFC Midnight

Titillant constamment l'attention de son auditoire autant que la véracité de ce qu'il met en scène (est-ce vraiment réel ou tout n'est que le fruit de l'imagination d'une femme dont la vie parfaitement réglée et contrôlée s'effondre alors que sa fille s'en va pour l'université ?), tant tout l'intrigue pourrait n'être que le fruit d'une rupture psychologique résultant à une peur paralysante (l'idée de se retrouver seule et que sa fille n'est plus jamais besoin d'elle), le cinéaste joue frontalement le trouble vécu par son héroïne, faisant de plus en plus apparaitre un fantôme persistant de son passé dont la simple présence suffit à la paralyser.
Filmé comme un tueur tout droit sorti d'un slasher (dans des aperçus volés avant qu'il n'envahisse l'écran de manière presque surnaturelle, pour ne plus jamais le quitter), un prédateur qui suscite la fuite dès qu'il rentre à peine dans notre champ de vision, David (incroyable Tim Roth, d'une nonchalence angoissante) est un artisan calme et terrifiant de la violence psychologique et émotionnelle et il a bien intention de ramener Margaret entre ses griffes en sapant durablement son estime de soi autant que son sens de la réalité.
Le Repulsion de Roman Polanski n'est jamais loin, tant le film perturbe savamment la suspension de l'incrédulité de son spectateur en bousculant la subjectivité de son point de vue - celui de plus en plus délirant de Margaret - par un regard plus distancé et désinvolte où David est à la fois le boogeyman ultime et un homme comme les autres, une dichotomie effrayante et furieusement réelle (la force de milliers d'agresseurs au quotidien) qui ne fait que renforcer la puissance de son récit où le drame est dynamité par les oripeaux du genre horrifique (une montée progressive de la tension avec même une belle pointe de body horror).

Copyright Courtesy of Sundance Institute

Audacieux dans sa manière de balader son auditoire dans les recoins les plus sombres - et parfois absurdes/grotesques - d'une descente aux enfers pas si éloignée des cauchemards de David Cronenberg, où une femme (encore une fois, une magnifique Rebecca Hall dont le lent basculement vers la folie rappelle instinctivement celui de Mia Farrow dans Rosemary's Baby) réalise qu'il n'est jamais vraiment possible de sortir indemne d'une relation toxique et abusive; Resurrection, jusque dans son final sanglant et un poil frustrant, est de ces expériences faite pour bousculer et diviser qui vaut totamement l'engagement qu'elle exige à son spectateur.
Dommage, encore une fois, que sa sortie en catimini la condamne douloureusement à l'anonymat là où elle aurait pu - dû - faire sérieusement son boucan dans une salle obscure...


Jonathan Chevrier


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