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[CRITIQUE] : La chance sourit à Madame Nikuko


Réalisateur : Ayumu Watanabe
Avec les voix originales de : Cocomi, Shinobu Otake, Izumi Ishii, Natsuki Hanae, …
Distributeur : Eurozoom
Budget : -
Genre : Animation
Nationalité : Japonais
Durée : 1h37min

Synopsis :
Nikuko est une mère célibataire bien en chair et fière de l'être, tout en désir et joie de vivre - un véritable outrage à la culture patriarcale japonaise ! Elle aime bien manger, plaisanter, et a un faible pour des hommes qui n’en valent pas toujours la peine. Après avoir ballotté sa fille Kikurin la moitié de sa vie, elle s’installe dans un petit village de pêcheurs et trouve un travail dans un restaurant traditionnel. Kikurin ne veut pas ressembler à sa mère et ses relations avec Nikuko ne sont pas toujours simples. Jusqu’au jour où ressurgit un secret du passé.



Critique :



Dans son nouveau long métrage, Ayumu Watanabe confirme son talent pour filmer l’adolescence. Avec La chance sourit à Madame Nikuko, adapté du roman écrit par Kanako Nishi, le réalisateur se sert d’une relation mère/fille haute en couleur pour nous offrir une chronique adolescente simple mais joviale.

Ce n’est pourtant pas le prénom de Kikurin, l’adolescente et personnage principal qui se retrouve dans le titre du film mais celui de sa mère, Nikuko, une femme hors norme dans le paysage du petit village de pêcheurs où elles ont déménagé. Le film nous la présente par le biais du regard de sa fille. Un regard-mi amusé, mi-cruel face à cette femme énorme, bavarde et toujours euphorique. Elle l’imagine comme une pièce de bœuf, ronde et délicieuse, rebondissant face au chaos que fut sa vie. Une vie délimitée par les hommes qui ont profité d’elle. Balancée de ville en ville, de désillusion en désillusion, Kikurin s’est construit une barrière que ne possède pas sa mère. Jeune fille réservée et responsable, celle-ci ne pourrait pas être encore plus aux antipodes de Nikuko.



Dans La chance sourit à Madame Nikuko, c’est la vie dans son plus simple appareil qui se déroule, amusante parfois mais surtout très ordinaire. Si Nikuko adore l’ordinaire et y voit un moyen de s’épanouir, ce n’est pas le cas de sa fille qui peine à trouver sa place et sa voix dans les girons de cette mère envahissante. Comme toute adolescente qui se respecte, elle a honte de sa mère, d’autant plus quand celle-ci s’éloigne des normes corporels et sociales. Nikuko est constamment ramenée à son poids, avec une mise en scène qui n’hésite pas à exagérer l’énormité de son ventre à l’intérieur de leur modeste péniche. Nikuko porte également des vêtements voyants, possède un rire tonitruant et arrive toujours à se faire remarquer. Difficile pour Kirurin de trouver sa place dans toute cette extravagance, à la limite du grotesque. C’est d’ailleurs le propre du personnage, traverser l'existence sans faire de vague. Elle veut rester neutre dans les petites querelles de cour de récréation, ne veut pas que son corps change, qu’il lui donne un cycle menstruel, qu’il développe des formes. Là où le trait de l’animation pousse le côté cartoon et rond de Nikuko, il donne à Kikurin un côté plus réaliste, des traits durs et longiligne pour l’éloigner encore plus de sa mère.

Pourtant, la vie intérieure de Kikurin fourmille d'incongruité et de bizarrerie. Elle donne une voix aux animaux qu’elle croise et imite les grimaces d’un de ses camarades de classe. Tout ceci lui donne un moyen d’exprimer ses émotions et lui offre une singularité dans un moment de vie où la norme est une obligation pour vivre en société. En côtoyant son amie Maria qui se fait remarquer avec ses robes à froufrou, ou son ami Ninomiya, discret et taiseux comme Kikurin, le personnage peut à la fois comprendre le besoin de se retirer dans sa bulle mais aussi le besoin de trouver son identité et de l’offrir aux yeux de tou⋅tes.

Du passage à l’âge adulte à l’évolution du corps féminin et le regard que la société pose sur lui, La chance sourit à Madame Nikuko est surtout un film agréable et léger, où l’on peut être soi en toute simplicité.


Laura Enjolvy


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