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[CRITIQUE] : Les goûts et les couleurs


Réalisateur : Michel Leclerc
Avec : Rebecca Marder, Félix Moati, Judith Chemla, Philippe Rebbot, Eye Haïdara, Artus, Baya Kasmi, François Morel,…
Distributeur : Pyramide Distribution
Budget : -
Genre : Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h50min

Synopsis :
Marcia, jeune chanteuse passionnée, enregistre un album avec son idole Daredjane, icône rock des années 1970, qui disparait soudainement. Pour sortir leur album, elle doit convaincre l’ayant-droit de Daredjane, Anthony, placier sur le marché d’une petite ville, qui n’a jamais aimé sa lointaine parente et encore moins sa musique. Entre le bon et le mauvais goût, le populaire et le chic, la sincérité et le mensonge, leurs deux mondes s’affrontent. À moins que l’amour, bien sûr...



Critique :


Faisant partie de la - fine - liste des cinéastes français capable de manier l'art délicat de l'humour sans se perdre dans des élans potaches et/où une regurgitation facile de clichés éculés provoquant pas même un sourire gêné, on avait laissé le cinéma fictionnel (très) sympathique de Michel Leclerc avec l'excellent La Lutte des Classes (au titre jouant habilement du double-sens), ode humaniste à la tolérance, à la parentalité, la diversité et l'éducation (saupoudré d'une belle défense des valeurs républicaines et de l'école publique), lucide sur le monde qui l'entoure tout en étant sérieuse sans forcément l'être, où le génial couple Édouard Baer/Leïla Bekhti se faisait le porte-parole/représentant amusé et amusant de la France d'aujourd'hui.
Trois ans plus tard, c'est avec la plume - et la caméra - toujours aussi affûtée qu'il nous revient avec ce qui est peut-être son plus doux et enthousiasmant effort à ce jour : Les goûts et les couleurs - tout est dans le titre -, postulant sans trembler au titre de péloche immanquable du début d'été ciné 2022.

Copyright Pyramide Distribution

Vrai morceau de cinéma populaire juste et jamais caricatural, une nouvelle fois vissé sur l'opposition - puis l'inéluctable attirance - tendre et humaine de deux ames opposées gravitant dans deux mondes bien distincts (l'essence même de son cinéma), Leclerc aborde son sujet aussi bien avec malice et fantaisie qu'avec un regard dénué de tout constat sociologique (pas un mal), pour mieux théoriser avec délicatesse sur le bon vivre ensemble, cette idée furieusement utopique qu'un pays tel que le nôtre pourrait pleinement vivre dans un environnement moins asphyxiant avec plus d'entraide, d'humour et... d'amour.
Nouvelle preuve sur pellicule de la passion sincère du cinéaste pour l'humanité, dont la galerie de personnages haut en couleurs et attachants est taillé à la serpe, comme autant de portraits chorals qu'il entrelace dans un tout prenant et cohérent, porté autant par la méticulosité de sa mise en scène au plus près des coeurs, que par la partition enjouée de ses comédiens (d'un Félix Moati touchant à une Rebecca Marder craquante, en passant par une Judith Chemla étonnante en rockeuse iconique, qui vole la vedette dans le peu de scènes qui lui est donné).
Petite bulle de poésie sous fond de ballade musicale enlevée et entraînante, Les goûts et les couleurs a tout de la séance feel good parfaite pour pleinement démarrer l'été et permettre, entre deux blockbusters, à certains de se reconnecter avec des salles obscures qui en ont cruellement besoin.


Jonathan Chevrier