[Y-A-QUOI A LA TELE CETTE SEMAINE ?] : #77. Semaine du 12 au 18 janvier 2020
Chaque semaine je continue à faire — pour vous — le tour des programmes TV en extirpant de tout cela une offre cinématographique autour de trois œuvres. Mais, je vais aussi vous proposer des contre-programmations ainsi que des secondes parties de soirée pour les cinéphiles insomniaques.
Semaine du 12 Janvier au 18 Janvier
Dimanche 12 Janvier.
Gravity de Alfonso Cuaron sur TF1.
Pour sa première expédition à bord d’une navette spatiale, le docteur Ryan Stone accompagne l’astronaute Matt Kowalsky. Mais lors d’une banale sortie dans l’espace, une catastrophe se produit. Lorsque la navette est pulvérisée, Stone et Kowalsky se retrouvent totalement seuls, livrés à eux-mêmes dans l’univers. Le silence assourdissant autour d’eux leur indique qu’ils ont perdu tout contact avec la Terre.
Gravity c’est d’abord un exercice filmique, celui qui s’amuse a repousser les possibles pour offrir à son spectateur une expérience inédite. C’est là que réside le second point, Cuaron au travers de ses choix de metteur en scène actionne un pur moment de cinéma, celui comparable a un grand huit qui secoue le spectateur de haut en bas, de droite à gauche. Mais, Gravity, s’il n’était que ça n’aurait jamais pu affronter les affres du temps, rien ne vieillit moins bien qu’un pur exercice cinématographique, c’est pour cela que le réalisateur gorge l’œuvre d’une donnée essentielle : l’humain. Car, c’est bel et bien, à la fin, et tout du long, le portrait de cette femme, meurtrie en elle, qui va lutter pour non pas survivre, mais bien, comme l’explicite le sublime plan de fin, renaitre. Poignant et universel.
Mais aussi... C8 propose le Snowden d’Oliver Stone. Un film hautement politique, comme souvent avec Stone, qui se prélasse plus dans le genre du thriller que celui du biopic. Car ici, le cinéaste fait d’Edward Snowden un étendard qui dépasse le pur cadre cinématographique, et en donne toute sa puissance, en nous posant directement une question : peut-on bafouer les libertés individuelles au nom de la sécurité ?
Lundi 13 Janvier.
Kingdom of Heaven de Ridley Scott sur C8.
En Provence, au XIIe siècle, Balian, un forgeron, enterre son épouse qui s’est suicidée. Passe un groupe de croisés. Leur chef, Godefroy d’Ibelin, lui confie qu’il est son père et lui propose de le suivre à Jérusalem. Balian accepte. En chemin, Godefroy est blessé lors d’une embuscade. Avant de mourir, il adoube Balian.
Lors de sa sortie au cinéma en 2004, Kingdom of Heaven n’était plus totalement la version qu’avait Ridley Scott en tête lors du développement du projet. Trop long, trop complexe, le montage initial fait peur à la 20th Century Fox qui demande des coupes, si Scott se plie aux exigences et le film est accueilli assez fraichement par la critique — et les spectateurs. Il faudra attendre la sortie en DVD pour visionner la vraie version du film, au travers un director’s cut de 3 h 15 que proposera C8 ce lundi. Avec 45minutes supplémentaires, le cinéaste offre tout simplement un autre long-métrage, saisissant enfin toute l’ampleur de cette fresque historique. Le spectateur ne doit pas hésiter à plonger dans cet univers élargi. Plus fluide dans sa narration, l’œuvre se complexifie, notamment en justifiant des intrigues jugées peu utiles dans la version initiale, mais c’est surtout les personnes qui gagnent en densité psychologique et permettent de mieux appréhender leurs évolutions. Tout cela emballé par un Scott virtuose de l’image, celle qui marque, frappe, happe et donne ainsi une œuvre aussi fastueuse que profonde, exaltante et bouleversante.
Mais également... TMC propose Edge of tomorrow de Doug Liman. Un Crusien movie, qui parvient sur un concept usé — revivre la même journée — à puiser une force inattendue. L’effet rembobinage offre à Liman un support scénaristique qui lui permet d’imposer un rythme effréné qui multiplie les gags. Car oui, si Edge of tomorrow est un excellent film d’action, un solide film de SF, il est aussi un film sacrément drôle. Le tout est emballé avec malice et efficacité faisant de ce « Tom Cruise Movie » un des must des années 2010.
Jeudi 16 Janvier.
Les Infiltrés de Martin Scorsese sur TF1SeriesFilms.
Billy, un jeune policier de Boston, a pour mission d’infiltrer le gang d’un puissant parrain irlandais, Frank Costello. De son côté, Colin Sullivan, proche du même caïd, intègre la police. Mais un jour, mafieux et policiers comprennent, chacun de leur côté, qu’un indicateur se cache parmi eux.
Les Infiltrés fait, encore aujourd’hui, office de dernière œuvre contemporaine du cinéaste, un statut qui lui donne une certaine saveur. Ici, Scorsese s’adonne à un exercice peu reluisant, celui du remake d’un film étranger – en l’occurrence hongkongais; mais, peu enclin a ne signer qu’une redite, le metteur en scène s’empare du matériau de base pour mieux le tordre, malaxer, triturer donnant ainsi naissance à une œuvre passionnelle, névrotique, méandreuse. Soutenu par un casting au diapason, de Jack Nicholson à Leonardo DiCaprio, Les Infiltrés est l’illustration parfaite d’un réalisateur en pleine possession de son art, parvenant a articuler, dans cette angoisse latente, un grand spectacle adrénalitique qui captive de bout en bout. Alors, bien sûr, on peut ensuite se questionner, est-ce que ce film, dans la carrière de son cinéaste était celui qui méritait le plus de le voir récompenser de l’Oscar du meilleur réalisateur ? Oui et non, car si Scorsese a fait mieux, il faut bien avouer que sa maitrise, ses obsessions, son sens du cinéma fait de ce remake un film parvenant à faire oublier son statut initial.
Thibaut Ciavarella