[CRITIQUE] : Black is Beltza
Réalisateur : Fermin Muguruza
Acteurs : avec les voix de Unax Ugalde, Isaach de Bankolé, Iseo,...
Distributeur : Gabarra Films
Budget : -
Genre : Animation, Aventure.
Nationalité : Espagnol.
Durée : 1h28min
Synopsis :
Octobre 1965, New York. Les traditionnels géants des Fêtes de Pampelune sont invités à défiler sur la 5ème avenue. Mais les autorités américaines interdisent la participation des deux géants noirs dans le contexte de la ségrégation raciale. C’en est trop pour Manex qui, fidèle à ses convictions et son tempérament rebelle, fausse compagnie à ses collègues. Il part à la découverte du New York de la lutte pour les droits civiques et de la contre-culture. Il est alors loin de s’imaginer que c’est le début pour lui d’un périple loin de son Pays Basque natal, entre Cuba et Mexico, en passant par Alger et Montréal. Il y croisera des militants de tous bords, des agents de la CIA, des femmes passionnées et révolutionnaires… Entre voyage initiatique et odyssée libertaire, Manex traverse le monde en ébullition de cette fin des années 60, celui de la Guerre Froide et des mouvements de libération des peuples.
Critique :
En partant d'un événement révoltant,#BlackisBeltza privilégie le patchwork vif au récit cohérent, un avantage pour le zèle philanthropique qui survole toute l'oeuvre, moins pour un propos qui aurait pu être un éloge puissant sur la diversité et la solidarité des classes opprimées pic.twitter.com/JgeS9LtQtQ— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) May 8, 2019
Le cinéma d'animation a cette particularité tout simplement fantastique de pouvoir tout faire, de pouvoir parler de tout, d'oser tout, visuellement, thématiquement et même esthétiquement tant les limites ne sont délimités que par l'imaginaire de ses têtes pensantes.
Quoi de plus passionnant alors, de voir un film animé qui se libère volontairement du carcan faussement enfantin qu'on lui colle assez souvent sur le dos, pour mieux se mouvoir d'une vertu didactique importante en traitant d'un sujet majeur de l'humanité : la bouillante lutte des droits civiques et contre le racisme, encore cruellement d'actualité.
Chanteur engagé se faisant désormais cinéaste, l'espagnol Fermín Muguruza laisse de côté les paroles fortes pour les images qui le sont tout autant, et croque avec Black is Beltza - adaptée du roman graphique éponyme qu'il a lui-même signé - une oeuvre certes infiniment maladroite, mais d'une sincérité et d'une énergie enthousiasmante.
En plein coeur des 60's, époque où la libération sexuelle pointait doucement le bout de son nez et où la violence gangrènait plus d'une société se voulant "égalitaire et moderne", Muguruza fait voyager son auditoire à travers le pèlerinage d'un jeune basque - Manex - étrangement invité dans les plus hautes sphères des mouvements révolutionnaires (la révolution cubaine avec le Che, les mouvements antiracistes américains avec les Black Panthers, l'anti-franquisme, l'Algérie, la création du mouvement hippy,...), une étude de la scène internationale en souffrance et où la musique est autant un moyen d'expression que se rassemblement.
Véritable meli-mélo animé de questions raciales et politique, d'espionnage et de fuite tout autant qu'il est mâtiné d'un espoir doux amer, Black is Beltza est un véritable road trip sans frontière cinglant et vivant, une carte ambitieuse de la résistance qui souffre pourtant autant de ses bonnes intentions que de sa propre rhétorique, se montrant même parfois férocement brouillon - voire pédant - dans son manque complet d'explication et ses partis pris faciles (les espagnols prennent cher, les personnages féminins encore plus).
En partant d'un événement révoltant (l'interdiction, en 65, de défilé des deux géants de Pampelune, sur la Cinquième Avenue de New York, dû au contexte de ségrégation raciale), Muguruza privilégie le patchwork vif et brutal au récit cohérent, un avantage pour le zèle philanthropique et passionné qui survole toute l'oeuvre, moins pour un propos qui aurait pu être un éloge puissant sur la beauté de la diversité et la solidarité des peuples et des classes opprimées, dont on aurait bien eu besoin aujourd'hui...
Jonathan Chevrier