[GUINNESS, CORK ET CINE] #6 : Nouvelles expériences cinématographiques
#6. Nouvelles expériences cinématographiques.
Le printemps tarde à pointer le bout de son nez dans Cork. Vous me direz que cela fait d’autant plus d’occasions d’aller au cinéma, et vous aurez totalement raison. Ma carte de fidélité du Gate Cinemas est désormais pleine, témoin de mon activité principale ici: observer le cinéma en Irlande, son public, ses productions et ses anecdotes. Que s’est-il donc passé ces derniers mois dans ma petite vie de cinéphile ici ?
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Tout d’abord, il y a eu début mars le fameux festival du film français : le 30ème Cork French Film Festival, organisé par Alliance Française. Il s’agit, avec le Cork Film Festival dont j’avais déjà parlé, du deuxième festival cinéma de Cork, et dont la programmation est très alléchante. L'objectif est de faire rayonner la culture française à Cork, où la communauté française est importante et surtout où le français est une deuxième langue très enseignée. J’ai donc pu voir (un peu tard certes) le fabuleux film Le Grand Bain de Gilles Lellouche (traduit en Sink or Swim) dans une salle plutôt remplie d’irlandais hilares et très réactifs à leur habitude. Les nombreux moments de rire me sont ainsi parus plus intenses encore lorsque la salle s’esclaffait avec moi! C’était vraiment une expérience vivifiante, et d’ailleurs le film a continué à être exploité dans le cinéma local quelques semaines après le festival, témoignant de son succès. Pour continuer ma série de films sous-titrés en anglais, j’ai vu Mektoub, My Love de Abdellatif Kechiche dans une salle comble où l’ensemble des personnes présentes semblaient partager mon ennui profond et mon énervement devant ces trois heures perdues de ma vie à regarder un film voyeur, autocentré et vide. Les salles irlandaises ont ce mérite d’être très réactives, en bien comme en mal, et plusieurs personnes (dont j’aurais pu faire partie) ont quitté la salle en cours de visionnage
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Le dernier film que j’ai pu voir (je dis “pu” parce que si j’avais eu le temps et l’emploi du temps, je serai allée à toutes les projections pour la beauté du cinéma français) est l’émouvant La Douleur d’Emmanuel Finkiel (traduit en Memoir of War). Le film, forcément lent et dur de part son sujet, a su me captiver et visiblement l’audience majoritairement irlandaise aussi. Le plus intéressant fut néanmoins la discussion qui a suivi avec le réalisateur qui s’était déplacé; j’ai pu poser une question sur son utilisation de la mise au point, sur certains de ses choix de mise en scène, une amie a aussi posé des questions sur les choix d’adaptation. Le réalisateur a été très accessible et a offert des réponses toujours pertinente. Quelle chance de pouvoir avoir des échanges aussi intéressants ici ! Les irlandais ont plutôt posé des questions d’ordre historique, et semblaient très impliqués dans l’histoire du film.
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Le festival a projeté bien d’autres films comme Cyrano de Bergerac, Pupille, L’Homme Fidèle, la Villa… Ainsi que plusieurs animations, dont une French Party et des ateliers de cuisine française. C’était vraiment un programme passionnant, et d’après mes observations, le public irlandais est très friand de films français car malgré la grande communauté française à Cork, la majeure partie du public était anglophone, intéressé par la projection de films sortant du circuit habituel anglo-saxons. Les salles étaient presque toujours remplies même en plein après-midi. Prometteur pour la suite (enfin ils sont aguerris vu que c’est la 30ème édition, on l’imagine bien)! Pour un petit coup d’oeil au programme, c’est ici : https://www.corkfrenchfilmfestival.com/programme/.
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Suite à mon dernier article, l’interview avec Cathal, je m’étais dit qu’une étape essentielle de mon année à Cork était de découvrir un produit culturel récent et 100% local : The Young Offenders. Tout d’abord le film: une comédie loufoque et pleine de bons sentiments, qui cherche à retranscrire l’atmosphère d’un quartier populaire de Cork, ses violences, mais aussi ses moments de grâce. Se basant sur une réelle saisie de cocaïne au large de la ville, le scénario part ensuite de deux ados se mettant en tête de retrouver ladite drogue. De là, on découvre une galerie de personnages variée et typique, possédant tous un accent à couper au couteau. Très sympathique et une superbe introduction à la ville, aux us et coutumes de Cork. (toujours disponible sur Netflix!).
Après le film, je me suis attaquée à la série, qui reprend les personnages et les lieux introduits précédemment. Chaque épisode ne dure que 20 minutes, autant vous dire que j’ai avalé les 7 épisodes en même pas une journée. Chacun développe un peu plus les relations entre les ados, leurs parents, la police, la petite délinquance, et même des poissons (oui). Très drôle mais aussi très tendre, la série a des moments surprenants et un casting qui ne vous laissera pas de marbre. Il s’agit d’une superbe manière de dynamiser et de faire rayonner la ville!
J’ai d’ailleurs croisé un des acteurs dans la rue l’autre jour (celui qui joue Billy Murphy (Shane Casey) et cela m’a semblé parfaitement normal tant la série est ancrée dans la réalité de la ville. Une de mes amies de l’association de comédie musicale a été figurante dans l’épisode spécial de Noël. On ne peut pas faire plus authentique que cela, je vous encourage donc vivement à vous plonger dans cet univers!
Enfin, la dernière expérience dont j’avais envie de parler est le premier film d’horreur irlandais que j’ai vu au cinéma, et de ma vie en fait. Une recherche rapide sur l’outil Internet montre bien que les films d’horreur irlandais sont une catégorie de niche (16 occurrences environ) et dès que j'ai vu l’affiche, j’ai foncé. L’horreur est l’un de mes genres préférés, et cela me permet de découvrir un autre aspect de la culture irlandaise. Qu’est-ce qui fait peur aux irlandais ? The Hole in the Ground, de Lee Cronin, est un film d’horreur plutôt classique, avec peu de jumpscares ou de moments dérangeants, mais qui raconte une histoire intéressante d’une mère et son fils emménageant dans une maison à l’environnement mystérieux. Les voisins, notamment une vieille femme qui semble avoir perdu la tête, ne vont pas rassurer la famille, qui va devoir faire face à des évènements de plus en plus inquiétants.
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Subtil, jouant sur des effets simples mais efficaces, la grande force du film réside selon moi dans la réinterprétation de mythes traditionnels irlandais. Ces mythes peuvent être rapprochés de certaines maladies, mentales par exemple, et leur signification moderne est encore débattue: les mythes du changeling, des fées, des cercles magiques par exemple. Le film garde un ancrage dans la réalité malgré la présence de ces mythes qui le rend assez glaçant. Je n’ai pas été vraiment effrayée par le film (pourtant il ne me faut pas grand chose) mais ce qu’il implique par rapport aux éléments surnaturels (ou non?) exposés m’ont fait réfléchir et une analyse d’après-film m’a fait l’apprécier encore plus. Il faut que je m’intéresse plus à l’horreur irlandaise, surtout si elle est d’aussi bonne facture!
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Voilà qui conclut ma deuxième édition d’expériences cinéma irlandaises. Plus je découvre le pays et la ville de Cork, plus j’en découvre les films, plus je comprends les réactions des gens et leur histoire. Ces mois ici me rendent vraiment familière avec la culture irlandaise et je pense que passer par la production cinéma est une manière ludique et très intéressante. Les irlandais sont toujours très impressionnés par des étrangers qui connaissent leurs séries ou films fétiches, alors foncez!
La bise irlandaise,
Léa