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[CRITIQUE] : A Ghost Story


Réalisateur : David Lowery
Acteurs : Casey Affleck, Rooney Mara, McColm Cephas Jr,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Drame, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h32min.

Synopsis :
Apparaissant sous un drap blanc, le fantôme d'un homme rend visite à sa femme en deuil dans la maison de banlieue qu'ils partageaient encore récemment, pour y découvrir que dans ce nouvel état spectral, le temps n'a plus d'emprise sur lui. Condamné à ne plus être que simple spectateur de la vie qui fut la sienne, avec la femme qu'il aime, et qui toutes deux lui échappent inéluctablement, le fantôme se laisse entraîner dans un voyage à travers le temps et la mémoire, en proie aux ineffables questionnements de l'existence et à son incommensurabilité.



Critique :


Si son merveilleux remake de Peter et Eliott le Dragon n'a décemment pas connu le succès qu'il méritait, gageons que A Ghost Story vienne réhabiliter le statut de génie à suivre du définitivement talentueux David Lowery.
Avec peu d'artifice (un drap, deux trous et un coeur gros comme ça), le bonhomme se réapproprie le film de fantôme avec la même poésie mélancolique qui lui a permis de se réapproprier avec panache les codes du film de gangsters pour son premier essai - Les Amants du Texas -, bel hommage au cinéma de Terrence Malick (sa figure tutélaire majeure) dans lequel figurait déjà le couple vedette Rooney Mara/Casey Affleck.


Prenant la même structure dramaturgique d'une romance maudite entre deux amants aux destins brisés (le mari disparaît dans un accident de voiture) et les sentiments passionnés qui les lient, A Ghost Story est un véritable conte crève-coeur embaumé par la mort, une bulle de pureté fantastique sur une figure en deuil, qui décide de rentrer chez lui et de hanter sa veuve pour ne plus jamais avoir à la quitter; deux amants dont on ne sait pas grand-chose (pas même leurs noms), qui se définissent uniquement par leurs sentiments.
Plus que de se focaliser sur la détresse insondable d'une veuve obligée de recommencer à vivre, Lowery s'attarde délibérément sur la solitude qui rédige l'existence lente et absente d'un homme condamné pour l'éternité à être mort et toujours vivant à la fois, inlassablement condamné à être le spectateur d'une vie qui n'existe plus.
En s’immisçant dans son intimité avec justesse et subtilité, le metteur en scène transcende l'aspect anti-dramatique de cette présente autant pesante et inerte qu'attachante, pour mieux faire naitre l'émotion la plus pure et bouleversante qui soit dans l'âme de spectateurs seuls face à leurs ressentis, seuls face à un film aussi sincère et pur qu'un amour véritable et partagé.


Tour de force prodigieux, sorte de huis clos muet façon poème faussement expérimentale mais réellement passionnant, sublimé par une dimension existentielle vertigineuse (et son beau questionnement sur le temps qui passe) et un véritable travail d'orfèvre côté mise en scène (sans oublier les envolées majestueuses de Daniel " Comet " Hart côté score); A Ghost Story est un pur exercice de style radical, profondément sensoriel et mélancolique d'une lenteur de ton aussi envoutante que spirituelle.
Un beau et grand film de fantôme, qui hante encore longtemps, très longtemps même, après sa vision.


Jonathan Chevrier