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[CRITIQUE] : Room


Réalisateur : Lenny Abrahamson
Acteurs : Brie Larson, Jacob Tremblay, William H. Macy, Joan Allen,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Drame, Thriller.
Nationalité : Canadien, Irlandais.
Durée : 1h58min.

Synopsis :
Jack, 5 ans, vit seul avec sa mère, Ma. Elle lui apprend à jouer, à rire et à comprendre le monde qui l’entoure. Un monde qui commence et s’arrête aux murs de leur chambre, où ils sont retenus prisonniers, le seul endroit que Jack ait jamais connu. L’amour de Ma pour Jack la pousse à tout risquer pour offrir à son fils une chance de s’échapper et de découvrir l’extérieur, une aventure à laquelle il n’était pas préparé.


Critique :


Brie Larson.
Si pour beaucoup ce doux petit nom ne dit pas grand chose (attendons un brin que le buzz des oscars fassent pleinement son effet), pour les cinéphiles purs et durs en revanche, il est synonyme d'exception depuis un bon bout de temps tant elle est - à l'instar de Jennifer Lawrence, Alicia Vikander et Emma Stone -; l'incarnation séduisante et talentueuse du Hollywood de demain.

Et tout comme les trois actrices nommées plus haut, il suffit qu'elle pointe le joli bout de son nez pour faire craquer tout son monde.


Que ce soit dans la glorieuse sitcom Community, en ex-petite amie de Michael Cera dans le délirant et mésestimé Scott Pilgrim vs The World, en love interest de Jonah Hill dans 21 Jump Street, ou encore en sœurette de Joseph Gordon-Levitt dans Don Jon et même ex-love interest du tout aussi passionnant à suivre Miles Teller, dans le précieux The Spectacular Now; partout ou elle passe, la belle Brie ne laisse personne indifférent.

Si l'on se demande toujours autant comment le wagon de la chasse aux récompenses ne l'avait pas emporté avec elle il y a de cela deux ans à la sortie du merveilleux State of Grace de Destin Cretton (ou elle est éblouissante en éducatrice traumatisée au sein d'un foyer de jeunes adolescents physiquement et mentalement abusés); il était pourtant écrit qu'elle obtiendrait dans un futur proche, LE grand rôle qui la propulserait définitivement sur les cimes de la A-List d'Hollywood.

Bonne nouvelle, il semble ne pas avoir mis longtemps à lui tomber entre les mains puisque tout laisse à penser que la belle l'a bien trouvée grâce à Room de Lenny Abrahamson (le génial Frank avec Michael Fassbender, Maggie Gyllenhaal et Domhnall Gleeson), bouillant drame social indé adapté du best-seller éponyme de l'auteure irlandaise Emma Donoghue - également derrière le script - et incarnant définitivement le grand gagnant de la course aux statuettes dorées de l'année ciné 2016.


Balancé dans les salles obscures hexagonales près de cinq mois après sa sortie en salles outre-Atlantique par un distributeur (Universal) bien conscient que l'aura des Oscars lui siérait parfaitement, Room suit l'histoire puissante d'une jeune femme et de son fils, Jack, séquestré dans une toute petite salle aux douloureuses allures de prison, par un maniaque qui ne se prive pas de violer celle-ci tous les soirs.
Alors que son fils - né durant cette séquestration - vient tout juste d'atteindre ses cinq printemps, cette mère courage va tout faire pour mettre au point une évasion avec son enfant, pour se libérer une fois pour toute de leur ravisseur...

Sous couvert d'un pitch aussi sordide qu'il est sombre et réaliste (on se rappelle des destins similaires d'Elizabeth Fritzl ou encore de Natascha Kampusch, qui ont inspirés Donahue pour son livre), Room est un formidable et haletant huis-clos à la noirceur qui n'a d'égale que la douceur renversante qui émane d'une relation mère/fils absolument bouleversante.

Émouvant, intense et follement prenant, bien loin des films de kidnapping offrant un double point de vue victime/ravisseur, la péloche dénote pleinement du genre en offrant un point de vue unique (on ne sait rien ou presque du monstre qui séquestre la famille), celui du calvaire constant subit par le personnage de Brie Larson et de son fils; véritable point d'encre émotionnelle de l'histoire tant l'amour indéfectible qui lie Ma et Jack - qu'elle protège autant qu'elle le peut - éclabousse l'écran de toute sa poésie.


Car la grande force de ce drame dur et poignant, c'est bel et bien le duo attachant que forme Larson (merveilleuse, tout en fragilité et en détermination dans la peau d'une mère abimée mais aimante, elle n'a pas volée sa statuette) et le jeune Jacob Tremblay (ahurissant de naturel, véritable révélation du métrage); le second incarnant véritablement la lumière de l’existence à jamais déchirée de la première, qui ne s'accroche/vit que pour que son fils, encore plein d'innocence, puisse pleinement vivre sa vie un jour.

Une relation bâtie sur l'anormalité et qui se voit complétement bousculée dans la seconde partie, ou les deux héros quittent l'univers extrême qui était le leur pendant toutes ces années (horrible pour la mère, moins odieux et plus imaginaire pour sa progéniture) pour être confrontés au monde extérieur - changé pour Ma et plein de découverte pour Jack.
Une seconde moitié bien plus psychologique, dans laquelle le cinéaste déploie avec subtilité et virtuosité les conséquences dramatiques du calvaire d'un enfermement et de son douloureux " après ".

Évitant intelligemment l'écueil facile du voyeurisme et de la perversion gerbante, d'une sobriété exemplaire et joliment dénué de tous pathos malvenu, porté par une écriture et une interprétation d'une ampleur incroyable mais surtout sans la moindre faille - le tout merveilleusement mis en scène par un Abrahamson en pleine possession de son sujet -; Room tutoie de tout son long la pureté et le naturel confondant pour mieux incarner un merveilleux conte noir viscéral et sensible, aussi improbable que criant d'humanité, sur l'amour maternel confronté à l'horreur de l'isolement et de la noirceur de l'âme humaine.


Une péloche jamais dérangeante (malgré un sujet choc), qui ne se limite jamais vraiment à son postulat de départ, qui n'en fait jamais trop et qui transcende complétement son sujet tout en ne perdant jamais l'attention de son spectateur - même si il approche les deux bonnes heures au compteur.

Bref, une grosse claque à dix doigts, un véritable tour de force à la maitrise proprement étourdissante, incarnant sans l'ombre d'un doute, l'un des films majeurs de cette définitivement très riche année ciné 2016.


Jonathan Chevrier