[CRITIQUE] : L’œuf de l’ange
Réalisateur : Mamoru Oshii
Acteurs : avec les voix de Mako Hyôdô, Jinpachi Nezu, Keiichi Noda,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Animation, Drame, Fantastique.
Nationalité : Japonais.
Durée : 1h11min
Synopsis :
Une jeune fille fragile parcourt un monde obscur et dangereux. Sa survie semble dépendre d'un oeuf mystérieux qu'elle transporte.
La fin irrigue nos doutes, nos angoisses et nos actions. Qu’importe que l’on puisse remplir notre tête constamment afin de ne pas y penser, nous sommes dans une période qui ne peut qu’aller vers une conclusion, comme toute chose sur Terre. Ce sentiment nourrit bien évidemment l’art, à l’instar de cet Œuf de l’ange, film de Mamoru Oshii qui ressort dans nos salles de cinéma pour le quarantième anniversaire de sa sortie. Et une chose est sûre : si l’expérience de la fin inonde le long-métrage, celui-ci n’a clairement pas pris une ride techniquement.
Dès le début, le film installe une ambiance mortifère par son travail sensoriel, que ce soit par son traitement visuel ou bien sonore. Nous sommes dans une expérience cinématographique mais toujours au plus près des émotions, bien que celles-ci ne sont pas les plus positives. C’est une fin du monde qui s’illustre ici, celle d’une Terre dépourvue d’animaux et où la vie ne s’illustre quasiment que par des ombres constamment fuyantes. L’architecture imposante des décors renforce la solitude, l’isolement qui ne laisse que peu d’espoir dans ses rues où les mécaniques sont plus présentes que les êtres, dans un univers d’une aspérité déshumanisée.
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Les cadres jouent donc constamment de cette ampleur, réduisant d’autant plus cette jeune fille croyant porter l’œuf d’un ange et cherchant à le protéger de tout. Ce jeu d’échelles permet de mieux y déployer son monde sans jamais se sentir obligé de verbaliser ses intentions. Cette approche risque de mettre de côté une audience qui a besoin que tout soit expliqué mais cela permet justement de donner une sensation de film monde, de ceux qui se referment sur eux-mêmes avec la sensation de nous emporter dans un cauchemar à analyser, interpréter et creuser, encore et encore, pour espérer en saisir son fond murmuré mais néanmoins bruyant de destruction.
L’œuf de l’ange reste donc près de 40 ans après sa sortie une claque visuelle, techniquement vertigineuse et sensoriellement incisive, de celles qui ne laissent aucune zone de confort en 72 minutes mais s’avèrent inscrites en soi par leur travail émotionnel. On se laisse donc prendre dans ce labyrinthe de monde en perdition, où la vie ne peut qu’aller vers la disparition et son humanité vers une fin inéluctable. Dans la beauté vide de son architecture étouffante, c’est le vide qui fait le plus de bruit, l’absence rappelant le temps d’avant en nous confrontant à une agonie de monde.
Liam Debruel







