[CRITIQUE] : La Trilogie d'Oslo / Amour

Réalisateur : Dag Johan Haugerud
Acteurs : Andrea Bræin Hovig, Tayo Cittadella Jacobsen, Marte Engebrigtsen, Lars Jacob Holm,...
Distributeur : Pyramide Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Norvégien.
Durée : 1h59min.
Synopsis :
Sur un ferry qui les ramène à Oslo, Marianne, médecin, retrouve Tor, infirmier dans l’hôpital où elle exerce. Il lui raconte qu’il passe souvent ses nuits à bord, à la recherche d’aventures sans lendemain avec des hommes croisés sur des sites de rencontre. Ces propos résonnent en Marianne, qui revient d’un blind date organisé par sa meilleure amie et s’interroge sur le sens d’une vie amoureuse sans engagement. Mais ce soir-là, Tor succombe au charme de Bjorn, qui lui résiste et lui échappe...
Il y a à peine une semaine (attention, le film est, évidemment, toujours présent en salles), on avait découvert la première monture de ce qui est LA trilogie de l'été, La Trilogie d’Oslo du romancier et cinéaste Dag Johan Haugerud (dont chaque opus, on le répète, fonctionnent indépendamment des autres et n'impliquent pas une vision chronologique, quand bien même tous sont liés par le même cadre urbain : la pittoresque capitale norvégienne), Rêves, récit introspectif, tout en contrastes (comme son esthétique à la fois chaleureuse et austère) et profondément littéraire d'un amour intense et romanesque, attaché à la vérité douloureuse du béguin de Johanne, une adolescente résolument privilégiée de dix-sept ans, pour sa professeure de français - un amour interdit qu'elle transformera en roman.
Une petite douceur qui nouait éveil sentimental et éveil créatif au cœur d'un récit initiatique touchant et clinique, dont la simplicité évidente n'avait d'égale que la méticulosité exacerbée.
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Place désormais à la seconde péloche de cette approche trinitaire de l'amour (bien éloigné de ce qu'ont pu faire Richard Linklater - plus romantique - et Henry Miller - plus explosif -, avec le même type de structure), Amour, qui se fait peut-être encore plus volubile que son aîné, cloué aux basques des pulsions plurielles de Marianne (excellente Andrea Bræin Hovig), une urologue hétérosexuelle respectée et célibataire depuis des lustres, qui aspire à la fois à être en couple tout en étant attirée par les rencontres fortuites, terrain propice aux échanges émotionnels et physiques intenses; et de Tor (un attachant Tayo Cittadella Jacobsen), un collègue infirmier gay qui bosse dans le même service de cancérologie et tout aussi ouvert aux expériences, adepte qu'il est d’aventures sans lendemain avec des hommes croisés sur des sites de rencontre.
Tous les deux ont peur des normes entourant toute relation, conscient qu'ils sont d'être potentiellement condamnés à la solitude affective (parce qu'ils la côtoie au quotidien, ils ont pris pour certitude que l'on est de toute manière toujours seul face à la mort) mais aspirent néanmoins à établir une véritable et forte connexion avec quelqu'un.
Et, contre toute attente, l'amour va s'immiscer sous plusieurs apparences, au cœur des unions un poil chaotiques qu'ils ont tissés au fil des rencontres...
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Remettre en question les conventions (et si nos désirs n'était au fond, qu'un acte rationnel dans une société ou les certitudes s'effondrent et où la promiscuité avec l'autre se fait de plus en plus rare ?), apprendre à se découvrir soi-même à travers l'autre, où encore affronter sa crainte d'être blessé tout autant qu'un besoin d'amour que l'on réprime pour préserver son indépendance... Haugerud arpente ce terrain sinueux sensiblement défraîchi par plus talentueux que lui (Bergman, Rohmer,...), sans once d'originalité certes mais avec suffisamment d'assurance en sa plume pour rendre son voyage émotionnel parallèle et choral profondément grisant, en grande partie grâce à ses personnages solidement croqués et attachants.
Chronique de cœurs incertains et hésitants aux corps aventureux, catapulté dans le bal chaotique des sentiments et de la (réelle) découverte de soi, Amour, plus verbeux mais aussi et surtout plus drôle et émouvant que Rêves, est d'une délicatesse et d'une douceur des plus charmantes.
On se répète, mais vivement Désir mercredi prochain.
Jonathan Chevrier