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[CRITIQUE] : Les mots qu'elles eurent un jour


Réalisateur : Raphaël Pillosio
Avec : -
Distributeur : JHR Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français.
Durée : 1h24min

Synopsis :
En 1962, Yann Le Masson filme la parole de militantes algériennes à leur sortie de prison en France. Plus de 50 ans après, alors que la bande son a disparu, je pars à la recherche de ces femmes. Un film-enquête qui raconte leur histoire silencieuse. Un film-essai sur le cinéma qui figure leur disparition, et pour toujours, les garde vivantes.




Au sein d'une distribution hexagonale de plus en plus imposante (entendons-nous bien, c'est à la fois une bénédiction comme une malédiction pour tous les cinéphiles, peut-être un peu moins cela dit pour les simples spectateurs qui ne se laisseront pas submerger par cette accumulation de propositions), il y a des séances dont on n'attend pas forcément grand chose (ce qui est assez vulgaire annoncé comme cela, évidemment, mais tu sais cher lecteur, l'honnêteté l'est aussi parfois), voire dont on a pas forcément connaissance de leur exploitation mais qui pourtant, presque contre une adversité imaginaire conçue par notre hypothétique prévision de ce qu'il a à nous offrir, arrivent à nous cueillir de la plus belle des manières, en nous assénant une petite cla-claque derrière la nuque qui remet toutes nos idées en place.

Elles sont rares ses séances, sporadiques même tant on s'échine à garder nos radars cinématographiques les plus alertes possibles, mais merveilleusement essentielles.

Copyright JHR Films

Les Mots qu'elles eurent un jour de Raphaël Pillosio est clairement de ces séances-là, âpre et dépouillé moment de cinéma qui vient investiguer comme prolonger le travail du cinéaste engagé Yann Le Masson, qui en 1962 s'était donné pour noble mission de donner la parole a la petite quinzaine de militantes algériennes du FLN, au lendemain de la guerre d'Algérie et à leur sortie de prison en France; un film-enquête précieux mais mystérieusement dépourvu de sa bande sonore comme si le destin (prenez des guillemets) mettait un point d'honneur à invisibiliser encore un peu plus le rôle important des femmes dans l'Algérie indépendante.

Six décennies plus tard, le cinéaste cherche à leur redonner la parole au cœur d'un hommage puissant, authentique et vibrant à un pan méconnue de leur/notre histoire (ou chacun des témoignages restitués se fait une pièce essentielle d'un puzzle historique encore incomplet et douloureux), à leur conférer le respect et la dignité que leur sacrifice comme leur courage méritent (ses résistantes ont été torturées et emprisonnées pour contribuer à l'indépendance de leur nation, pour mieux être oubliées par tous au fil du temps), tout en venant titiller une mémoire collective à la défaillance - toujours - sélective.
Un documentaire saisissant et indispensable.


Jonathan Chevrier