[CRITIQUE] : La Femme la plus riche du monde
Réalisateur : Thierry Klifa
Acteurs : Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Marina Fois, Raphaël Personnaz,...
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Français, Belge.
Durée : 2h02min
Synopsis :
Ce film est présenté en hors-compétition au Festival de Cannes 2025
La femme la plus riche du monde : sa beauté, son intelligence, son pouvoir. Un écrivain photographe : son ambition, son insolence, sa folie. Le coup de foudre qui les emporte. Une héritière méfiante qui se bat pour être aimée. Un majordome aux aguets qui en sait plus qu’il ne dit. Des secrets de famille. Des donations astronomiques. Une guerre où tous les coups sont permis.
On avait laissé le cinéma de Thierry Klifa sur une note résolument réjouissante avec Les Rois de la piste, comédie dramatico-policière à l'italienne qui rappelle même gentiment le Family Business de feu Sidney Lumet, vissé sur une famille mi-arnacoeurs, mi-bras cassés sur plusieurs générations, dominée par une matriarche qui a sensiblement du sang d'Arsène Lupin dans les veines, mais des gamins (et leurs gamins) qui semblent des héritiers direct des Dalton.
Un petit bout de cinéma hybride, à la fois romantique, émouvant et burlesque mais aussi et surtout un vrai film d'acteurs à l'enthousiasme autant non feint que follement communicatif, d'une Fanny Ardant magnifiquement barrée à une Laetitia Dosch joliment loufoque, en passant par un Mathieu Kassovitz irrésistible.
C'est toujours avec une verve inspirée, mais sur un groove résolument plus satirique, qu'il nous revient avec le tout aussi hybride La Femme la plus riche du monde, fusion entre le thriller comico-ludique et le drame bourgeois sensiblement Chabrolien, qui s'inspire librement de l'affaire François-Marie Banier-Françoise Bettencourt-Meyers, vissé sur la dynamique entre le premier et la mère de la seconde, Liliane, milliardaire à la tête de l'empire L'Oréal, avec la plus Chabrolienne des comédiennes qui soit dans le rôle titre - Isabelle Huppert, pas un hasard.
Petit retour en arrière/recontextualisation Wikipedia-esque pour les non-initiés à ce sacré scandale (qui en appellera d'autres dans la foulée) : 2010, Françoise Bettencourt-Meyers, héritière de l'immense fortune de L'Oréal, dépose une requête en justice pour que sa mère, Lillianne Bettencourt, soit déclarée juridiquement incapable de gérer l'empire familiale comme sa propre fortune, affirmant qu'elle avait été victime d'extorsion par le photographe François-Marie Banier, un dandy homosexuel/ami proche de la milliardaire avec qui elle a nouée une romance platonique et qui lui aurait vraisemblablement soutiré, sous diverses formes, près d'un milliard d'euros - il sera condamné pour abus de faiblesse, a de la prison avec sursis et, suite à des accords, à payer des dommages intérêts réduits à 1 € symbolique.
De cette histoire jamais trop folle pour être vraie, Klifa tire le portrait d'une femme glaciale et toute-puissante dans un monde tout en luxe et en excès, figure d'influence paradoxalement sous influence, bouffée par sa propre solitude et une santé qui lui file entre les doigts, et qui laisse volontairement roder autour d'elle (dans un souci, totalement conscient, de s'offrir une sorte d'échappatoire, même toxique, à la lassitude de sa propre existence) un prédateur assoiffé d'or, tout aussi cruel et irrévérencieux qu'ambiguë (tout du moins, un temps) et sophistiqué, appelé à ébranler une cage dorée à l'image jusqu'ici méticuleusement gérée.
Succession n'est jamais loin - toute propension gardée, évidemment -, tant le cinéaste reprend le même cynisme vachard comme la propension de croquer avec une précision chirurgicale, des personnages jamais aussi fascinants que lorsqu'ils pataugent mignon dans leurs zones d'ombre (mépris de classe, racisme, antisémitisme,...).
D'autant qu'il s'offre pour l'occasion, une distribution aux petits oignons : Huppert donc comme dit plus haut, investie comme jamais, mais également un Laurent Lafitte flamboyant, à l'énergie fantasque et férocement théâtral (il cabotine comme un sagouin, et son alchimie avec la reine Isabelle est incroyable), à laquelle répond une Marina Fois tout aussi juste en héritière à la fois frustrée et inquiète, finalement autant en quête d'amour que peut l'être sa vulnérable matriarche.
Pas la plus subtile ni adroite des satires prenant en grippe les ultra-riches totalement déconnecté du monde certes, mais La Femme la plus riche du monde n'en reste pas moins une fresque savoureusement outrancière qui arrive à tromper sa linéarité évidente, lorsqu'elle laisse s'exprimer tout le vice de son petit théâtre des cruautés (sa première partie, résolument moins sage que la seconde).
C'est quand-même moche d'être très, très riche...
Jonathan Chevrier
Acteurs : Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Marina Fois, Raphaël Personnaz,...
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Français, Belge.
Durée : 2h02min
Synopsis :
Ce film est présenté en hors-compétition au Festival de Cannes 2025
La femme la plus riche du monde : sa beauté, son intelligence, son pouvoir. Un écrivain photographe : son ambition, son insolence, sa folie. Le coup de foudre qui les emporte. Une héritière méfiante qui se bat pour être aimée. Un majordome aux aguets qui en sait plus qu’il ne dit. Des secrets de famille. Des donations astronomiques. Une guerre où tous les coups sont permis.
On avait laissé le cinéma de Thierry Klifa sur une note résolument réjouissante avec Les Rois de la piste, comédie dramatico-policière à l'italienne qui rappelle même gentiment le Family Business de feu Sidney Lumet, vissé sur une famille mi-arnacoeurs, mi-bras cassés sur plusieurs générations, dominée par une matriarche qui a sensiblement du sang d'Arsène Lupin dans les veines, mais des gamins (et leurs gamins) qui semblent des héritiers direct des Dalton.
Un petit bout de cinéma hybride, à la fois romantique, émouvant et burlesque mais aussi et surtout un vrai film d'acteurs à l'enthousiasme autant non feint que follement communicatif, d'une Fanny Ardant magnifiquement barrée à une Laetitia Dosch joliment loufoque, en passant par un Mathieu Kassovitz irrésistible.
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Copyright Haut et Court |
C'est toujours avec une verve inspirée, mais sur un groove résolument plus satirique, qu'il nous revient avec le tout aussi hybride La Femme la plus riche du monde, fusion entre le thriller comico-ludique et le drame bourgeois sensiblement Chabrolien, qui s'inspire librement de l'affaire François-Marie Banier-Françoise Bettencourt-Meyers, vissé sur la dynamique entre le premier et la mère de la seconde, Liliane, milliardaire à la tête de l'empire L'Oréal, avec la plus Chabrolienne des comédiennes qui soit dans le rôle titre - Isabelle Huppert, pas un hasard.
Petit retour en arrière/recontextualisation Wikipedia-esque pour les non-initiés à ce sacré scandale (qui en appellera d'autres dans la foulée) : 2010, Françoise Bettencourt-Meyers, héritière de l'immense fortune de L'Oréal, dépose une requête en justice pour que sa mère, Lillianne Bettencourt, soit déclarée juridiquement incapable de gérer l'empire familiale comme sa propre fortune, affirmant qu'elle avait été victime d'extorsion par le photographe François-Marie Banier, un dandy homosexuel/ami proche de la milliardaire avec qui elle a nouée une romance platonique et qui lui aurait vraisemblablement soutiré, sous diverses formes, près d'un milliard d'euros - il sera condamné pour abus de faiblesse, a de la prison avec sursis et, suite à des accords, à payer des dommages intérêts réduits à 1 € symbolique.
De cette histoire jamais trop folle pour être vraie, Klifa tire le portrait d'une femme glaciale et toute-puissante dans un monde tout en luxe et en excès, figure d'influence paradoxalement sous influence, bouffée par sa propre solitude et une santé qui lui file entre les doigts, et qui laisse volontairement roder autour d'elle (dans un souci, totalement conscient, de s'offrir une sorte d'échappatoire, même toxique, à la lassitude de sa propre existence) un prédateur assoiffé d'or, tout aussi cruel et irrévérencieux qu'ambiguë (tout du moins, un temps) et sophistiqué, appelé à ébranler une cage dorée à l'image jusqu'ici méticuleusement gérée.
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Copyright Haut et Court |
Succession n'est jamais loin - toute propension gardée, évidemment -, tant le cinéaste reprend le même cynisme vachard comme la propension de croquer avec une précision chirurgicale, des personnages jamais aussi fascinants que lorsqu'ils pataugent mignon dans leurs zones d'ombre (mépris de classe, racisme, antisémitisme,...).
D'autant qu'il s'offre pour l'occasion, une distribution aux petits oignons : Huppert donc comme dit plus haut, investie comme jamais, mais également un Laurent Lafitte flamboyant, à l'énergie fantasque et férocement théâtral (il cabotine comme un sagouin, et son alchimie avec la reine Isabelle est incroyable), à laquelle répond une Marina Fois tout aussi juste en héritière à la fois frustrée et inquiète, finalement autant en quête d'amour que peut l'être sa vulnérable matriarche.
Pas la plus subtile ni adroite des satires prenant en grippe les ultra-riches totalement déconnecté du monde certes, mais La Femme la plus riche du monde n'en reste pas moins une fresque savoureusement outrancière qui arrive à tromper sa linéarité évidente, lorsqu'elle laisse s'exprimer tout le vice de son petit théâtre des cruautés (sa première partie, résolument moins sage que la seconde).
C'est quand-même moche d'être très, très riche...
Jonathan Chevrier