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[CRITIQUE] : Chime


Réalisateur : Kiyoshi Kurosawa
Acteurs : Mutsuo Yoshioka, Seiichi Kohinata, Tomoko Tabata, Ikkei Watanabe,...
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Épouvante-horreur, Thriller.
Nationalité : Japonais.
Durée : 0h45min.

Synopsis :
Tashiro entend un carillon que personne d’autre n’entend.
Le “Chime”résonne.
Il affirme qu’une machine s’est greffée à son cerveau.
Le “Chime” résonne. Encore.
Matsuoka, son professeur de cuisine, tente de l’aider.
Le “Chime” résonne. Plus fort.
Tashiro se saisit d’un couteau.





Assez rares sont finalement les cinéastes qui tentent des approches inédites pour renouveler les codes formels des genres qu'ils abordent, histoire de se démarquer un minimum de la production récente.
Il faut donc comprendre là que la majorité - voire plus - se contente de faire peu ou le strict minimum, même quand ils sont des réalisateurs chevronnés d'un genre aussi codifié que la J-horror.

Mais Kiyoshi Kurosawa n'est pas un cinéaste comme les autres, et Chime, né comme un produit accrocheur pour le lancement d'une nouvelle plateforme de streaming - Roadstead -, le bonhomme dégaine, en à peine quarante-cinq minutes montre et café en main, un petit abécédaire glacial et calibré à la virgule près (plus la mise en scène certes, qu'une écriture qui joue la carte du non-sens et s'avère chiche en explications, pour mieux laisser parler une réalisation organique), de comment générer aussi bien le malaise que la terreur chez son auditoire, avec une touche d'ironie merveilleusement vacharde.

Copyright 2023 Roadstead

Catapulté au cœur d'une Kobe à l'atmosphère urbaine proprement étouffante et faussement ordonnée, symbole d'une société nipponne bouffée par la pression de la performance et un perfectionnisme absurde, et flanqué plus précisément dans les coulisses d'une école de cuisine où une simple mauvaise cuisson peut amener tout wannabe William Foster a pété les plombs (un univers rigidement parfait et sous tension que tout fantôme perturbateur peut s'éclater à saper); Chime, tout du long vissé sur la subjectivité de son protagoniste principal (un professeur de cuisine), délivre de tout son long un fantastique bout d'horreur psychologique joliment sous influences (Argento en tête), qui s'amuse comme un sagouin à ne jamais délivrer ses secrets à son auditoire choqué.

Une vitrine macabre et virtuose du savoir-faire de Kurosawa, qui vient fissurer la banalité apparente du quotidien par un effet psychotique et paranormal volontairement répétitif : un son qui s’insinue dans la tête des gens comme l'allégorie d'une hystérie collective qui intime à exprimer, aléatoirement, toute la rage et les frustrations contenues en soi.
Sonder les névroses de toute une nation pour mieux nous effrayer, nous perturber : Kiyoshi Kurosawa a, comme souvent, tout compris.


Jonathan Chevrier