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[CRITIQUE] : Balle Perdue 3


Réalisateur : Guillaume Pierret
Acteurs : Alban Lenoir, Nicholas Duvauchelle, Gérard Lanvin, Stéfi Celma, Anne Serra, Pascale Arbillot,...
Distributeur : Netflix France
Budget : -
Genre : Action, Thriller.
Nationalité : Français.
Durée : 1h51min.

Synopsis :
Le mécanicien de génie Lino est de retour, déterminé à se venger d'Areski et du commandant qui ont ruiné sa vie et celle de ses proches dans un dernier opus chargé en adrénaline.




S’il y a bien une chose que l’on peut reconnaître à Netflix, c’est qu’il semble particulièrement enclin à investir énormément dans des productions françaises. Depuis quelques années maintenant, les productions nationales se sont multipliées, et l’entreprise américaine est devenue un mécène pour la Cinémathèque française. Vraie envie de cinéma ou opportunisme commercial pour réduire l’impact de la chronologie des médias ? Nous vous laisserons faire votre propre avis. 

Copyright Julien Goldstein/Netflix

Mais dans ce grand nombre de productions, une trilogie s’est démarquée très rapidement. Sorti en 2020, le premier opus de Balle Perdue fait sensation. Enfin un film d’action à gros budget et produit intégralement en France. Réalisée par Guillaume Pierret, cette œuvre transpire l'actioner bien bourrin, offrant de très belles scènes d’action (notamment une bagarre en plan séquence dans un commissariat d’une grande maîtrise). Le tout incarné par Alban Lenoir, qui s’était majoritairement illustré dans des rôles comiques, ou alors des seconds rôles. Lui qui n'avait jamais caché son envie de participer à des projets comme Balle Perdue s’est montré particulièrement investi. Et ça se sentait à l’image. S’en est suivi une suite en 2022 qui pointait déjà quelques limites (notamment côté écriture), mais poussait toujours plus les curseurs de l’action et de la casse de voiture. Cette année sort donc le troisième et dernier film, Balle Perdue 3. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il représente la quintessence de cette trilogie. Que ce soit dans le positif, mais aussi dans le négatif. 

On y retrouve donc Lino, toujours incarné par Alban Lenoir, qui a réussi à se tirer des griffes des autorités espagnoles. Mais cela s’est fait grâce au flic corrompu Alexander Resz. En parallèle, Areski, l’antagoniste du 1, revient après 2 ans d'exil pour se venger de ce Resz en témoignant contre lui à la justice. Ainsi démarrent les intrigues de trahison, de coup monté et de bagnole, bien évidemment. Les voitures toujours au centre du récit, et qui offre d’incroyables scènes de courses dans Montpellier et sa périphérie (dont une qui inclut des feux d’artifices). Guillaume Pierret s’est totalement lâché, repoussant toujours plus les limites. Le tout en privilégiant des effets pratiques, et ça se sent. Certains passages semblent tellement fous qu’il semble impossible qu’il n’y ait pas de la CGI, mais il est très difficile de remarquer son utilisation. 
Devant Balle Perdue 3, on sent l’envie de faire un film d’action style américain mais à la française, sans pour autant se brider.

Copyright Julien Goldstein/Netflix

Malheureusement, il a aussi pris les mauvais aspects des productions outre-atlantiques, à commencer par l’acting. Les acteurs et actrices surjouent à chaque ligne de dialogue. Ainsi ressort une impression qu’ils se prennent beaucoup trop au sérieux, tentant d'imiter le jeu des Américains, mais sans beaucoup de succès. Cela servant ainsi un scénario qui est globalement très simple. Une simplicité qui n’est pas un problème en soi. Personne n'attend de ce genre de production une histoire renversante. Mais l’intrigue est parasitée par de nombreuses facilités scénaristiques provoquant des réactions de stupeur devant la débilité de beaucoup trop d’action des personnages. 

Dans la lignée des précédents opus, Balle Perdue 3 propose de très belles scènes d’action, prouvant qu’en France, nous sommes aussi capables de produire du grand spectacle. Malheureusement, le reste ne suit pas. Entre les grosses ficelles du scénario, et l’acting à la limite du supportable, le film en devient vite ridicule. Heureusement que les scènes de course poursuite sont là pour entrecouper ce récit, rendant le tout au moins amusant et joli à voir.


Livio Lonardi


Copyright Julien Goldstein/Netflix


Sans tortiller de la fesse gauche, sorti de nulle part mais bien décidé à faire son trou par la force de sa caméra testostéronée, Guillaume Pierret avait donné un méchant coup dans la fourmilière avec Balle Perdue premier du nom, tentative pleinement réussite de conjurer doublement le sort d'une action bien de chez nous totalement paralysée par son Olivier Marchalisation forcée, mais aussi et surtout d'une Netflix ne sachant pas réellement produire de bonnes péloches dans l'hexagone (cinq ans plus tard, le constat reste cruellement le même).

Éduqué à la bonne école, celle de l'actionner qui décolle la rétine et qui nous fait bondir de nos sièges, portant fièrement en bandoulière ses références américaines tout droit en VHS sorties des 80s, Pierret préférait moins réinventer le genre (une hérésie à laquelle beaucoup se sont hasardés) et ses tropes furieusement familiers, que les épouser avec une fougue et une passion sincère, détail loin d'être négligeable qui faisait toute la différence.

Copyright Julien Goldstein/Netflix

Moins polar et plus riche en lard, Balle Perdue 2 poussait même les potards du spectaculaire encore un peu plus loin (comme toute bonne suite de B movie qui se respecte et qui s'inscrit dans la continuité des événements du premier opus), en jouant la carte de l'actionner décomplexé et testostéroné qui prenait son pouls autant dans des courses-poursuites mignonnes, que dans des bastons homériques chorégraphiée à l'os brisé près, totalement conscient qu'il était d'être avant tout et surtout un put*** de shot d'adrénaline à l'ancienne généreux et, assez logiquement, plus simpliste que son aîné.

Restait à savoir désormais si le film de conclusion, Balle Perdue 3, allait injecter à son moteur une dose de Nos pleine de nostalgie et de muscles, à en faire pâlir Dom Toretto et sa familia (dont les délires motorisés ont dépassés le stade du crédible depuis bien longtemps, et baigne désormais paresseusement dans le bain plein d'huile du cartoonesque de moins en moins défendable); où s'il allait privilégier l'idée d'un total package, dans une fusion des deux premiers efforts façon divertissement référencé ultime (entre le polar rugueux des 70s, et l'actionner bourrin des 80s/90s), qui fait fit de ses - plus où moins - maigres enjeux (la résolution de la vengeance de Lino contre Areski, qui sort de taule au moment même où le second réapparaît miraculeusement dans les parages) et de la fragilité de son écriture, comme de ses caricatures familières.

Bonne nouvelle, le film vogue plutôt vers la deuxième voie, celle de la bisserie comme on l'aime qui certes ne se laisse pas totalement aller à tous ses excès, mais s'en offre quelques gratinés (comme ramener la légende Gérard Lanvin pour jouer le flic pourri ultime, qui cabotine comme un sagouin sans pour autant se perdre... comme chez Olivier Marchal), privilégiant la brutalité décontractée à toute recherche de profondeur (même s'il s'offre quelques flashbacks et gonfle un peu plus la personnalité d'Areski, qui n'est plus totalement le vilain binaire à abattre), ce qui rend son efficacité furieusement redoutable et primaire même s'il laissera, sans doute, une petite note douce-amère à plus d'un spectateur s'attendant à une narration moins ramassée (quand bien même celle-ci, dès le départ, ne ment absolument pas sur la marchandise et ne prétend jamais à n'être plus que ce qu'elle était vouée à être : épurée et, par là, efficace).

Copyright Julien Goldstein/Netflix

Affirmant habilement ses forces (une mise en scène toujours autant inventive, repoussant constamment ses propres limites, à l'image d'un Alban Lenoir toujours aussi athlétique en cousin frenchy de Jason Statham), Balle Perdue 3 roule strictement vers l'essentiel et est, une nouvelle fois, un petit bout de cinéma sec et brutal, burné et décomplexé, porté par une vraie envie d'offrir un moment de cinéma bien de chez nous qui dépote.
Guillaume Pierret l'a bien compris, en suivant toujours aussi assidûment une règle incroyablement essentielle : c'est toujours dans les vieilles VHS que l'on fait les meilleur actionners, et on a vraiment hâte de voir ce que donnera la suite de sa carrière, peut-être (on l'espère) hors des sentiers battus de la firme au Toudoum, et plus près des salles obscures...


Jonathan Chevrier