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[CRITIQUE/RESSORTIE] : La classe ouvrière va au paradis


Réalisateur : Elio Petri
Acteurs : Gian Maria Volontè, Mariangela MelatoSalvo RandoneMietta Albertini,...
Distributeur : Tamasa Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Italien.
Durée : 2h05min.

Date de sortie : 31 mai 1972
Date de ressortie : 15 janvier 2025

Synopsis :
Lulù Massa est ouvrier modèle : son rendement est cité en exemple par son patron. Les autres travailleurs ne voient pas d'un bon œil ces cadences infernales, et il est détesté de ses collègues dont il méprise les revendications. Bercé par les rêves de la société de consommation Lulù réalise parfois la vanité de la vie qu'il s'impose. Alors qu'il se coupe un doigt accidentellement, les autres ouvriers, par solidarité, se mettent en grève...



Critique :



De loin le plus beau cinéma du monde jusqu'au difficile virage de la fin des années 70, la production italienne, passé quelques décennies gentiment dans les limbes - mais pas exempt de belles fulgurances de-ci de-là (on est quand-même pas sur une terre de manchots, restons honnête), commencent gentiment mais sûrement à reprendre du poil de la bête par la force d'une sacré galerie de jeunes cinéastes, hommes comme femmes, aux dents longues et aux caméras décemment affûtées.
Mais avoir le regard tourné vers l'horizon ne doit pas nous empêcher dans le même mouvement, de continuer à apprécier les hauts faits du passé quand ils se plaisent à renouer avec nos salles obscures.

Et pour les amoureux du cinéma rital, avec les récentes ressorties et autres rétrospectives concoctées aux petits oignons par, entre autres, des firmes telles que Carlotta Films (Redécouvertes et raretés du cinéma italien), Les Acacias (Le XIXème de Luchino Visconti) ou encore Les Films du Camélia (Dario Argento - Les six visages de la peur), c'est définitivement une période bénie pour s'y perdre sans réserve.

© 1971 Euro International Films / Sony Pictures / Tamasa Distribution

Nouvelle preuve en date avec la ressortie toute pimpante cette semaine du petit classique des 70s, La classe ouvrière va au paradis d'Elio Petri, Palme d'Or sur la Croisette en 1972 s'il vous plaît, merveille de péloche funambule entre le drame réaliste et la satire sociale à la fois subtile et féroce, au plus près des scissions et des aspirations dissonantes inhérentes à la gauche italienne et la classe ouvrière de l'époque, clouée aux basques d'un brave ouvrier qui passe du stade d'individualiste au rythme de travail insoutenable (une machine humaine, symbole de l'aliénation qui ne se soucier pas de sa propre santé face à l'ivresse de l'argent, qui se perd dans une transe productive et consumériste), a employé/collègue impliqué dans la lutte ouvrière à la suite d'une prise de conscience brutale (où il perdra, littéralement, une partie de lui-même) mais essentielle.

Si l'on peut lui reprocher sa facture conventionnelle, voire gentiment sommaire, impossible de ne pas louer sa puissance politique, sublimé autant par les sonorités du roi Ennio Morricone, que par la prestation captivante d'un brillant Gian Maria Volonté.
Une solide fable prolétarienne et au cynisme joliment lucide, mais aussi et surtout une sacrée (re)découverte.


Jonathan Chevrier