[CRITIQUE] : Spectateurs !
Réalisateur : Arnaud Desplechin
Acteurs : Mathieu Amalric, Françoise Lebrun, Milo Machado-Graner, Micha Lescot, Sam Chemoul, Salif Cissé,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h28min.
Synopsis :
Qu’est-ce que c’est, aller au cinéma ?
Pourquoi y allons-nous depuis plus de 100 ans ?
Je voulais célébrer les salles de cinéma, leurs magies.
Aussi, j’ai suivi le chemin du jeune Paul Dédalus, comme le roman d’apprentissage d’un spectateur. Nous avons mêlé souvenirs, fiction, enquêtes…
Un torrent d’images qui nous emporte.
Critique :
Il y avait jadis quelque chose de réconfortant dans l'idée familière de retrouver les mêmes thèmes où presque librement egrainés/recyclés par Arnaud Desplechin à chacune de ses nouvelles réalisations, ce petit côté rassurant de savoir où l'on va, comme une contine dont on ne connait pas forcément les paroles, mais dont la mélodie nous trotte toujours gentiment dans la tête.
Mais ça, c'était avant de découvrir la grosse déception qu'incarnait son dernier effort en date, Frère et Soeur, sorte de fusion peu inspirée de deux de ses plus beaux efforts, Rois et Reine (à qui il reprend sa structure fragmentée) et Un Conte de Noël, incarnant à la fois le meilleur comme le plus irritant du cinéma du cinéaste, vissé qu'il était sur l'exploration accrue des maux qui gangrenaient un clan - plus directement deux de ses enfants -, gentiment bourgeois mais surtout férocement antipathique.
Un écueil qui n'écornait pas pour autant notre envie plutôt marquée de découvrir son bien nommé Spectateurs !, que l'on pensait - de loin - comme un cousin au monument Cinema Paradisio de Giuseppe Tornatore (qui a dit Babylon ?), non pas dans un portrait nostalgique d'une vie - accompagnée par la cinéphilie - perdue, mais bien dans une réflexion métacinématographique sur l'importance du septième art comme de la fonction même du spectateur (après tout, tout est dans le titre), qu'il nourrirait donc de sa propre expérience aussi bien derrière la caméra que devant un écran.
Plutôt bonne pioche au final puisque la réflexion chapitrée du cinéaste, certes peu originale dans le fond mais prenant la forme d'un essai un poil déroutant dans sa manière de mêler fiction et documentaire, interroge ici avec pertinence l'art et l'expérience de sa découverte pour mieux définir qui est son auditoire et comment se façonne son regard, à travers un prisme majoritairement autobiographique : la création d'un jeune alter-ego - Paul Dédalus, une évidence - dont il scrute toutes les étapes passionnées de la cinéphilie (où il cite avec gourmandise autant sa séance de Shoah de Claude Lanzmann, aussi inoubliable que fondatrice, que son expérience spectatorielle auprès des oeuvres de la Nouvelle Vague, en passant par des extraits de la filmographie de Bergman, L’homme à la caméra de Dziga Vertov,...) jusqu'à sa transformation/identification ultime en metteur en scène.
Célébration de la toute puissance comme de la magie intemporelle du septième art, tout autant que théorisation raccourcie (moins de quatre-vingt-dix minutes au compteur) même si prenante, sur l'importance comme la passion même de la découverte cinématographique (sans spectateur, lambda comme cinéphile où même cinéaste, il n'y a pas de créateur), Spectateurs !, embaumé dans un enthousiasme qui n'a d'égal que sa sincérité, permet à Desplechin de raconter le cinéma au sens large mais également le sien, de commenter son propre lien avec lui avant tout et surtout comme un spectateur et non comme un auteur; un pendant qu'il laisse d'ailleurs, malheureusement, au second plan, ce qui se ressent aussi bien dans une écriture un brin bordélique, que dans une mise en scène sans ambition ni éclats.
Alors certes, on pourra assez (un peu trop pour son bien) souvent pointer la maladresse parfois criante de cette ode baroque, généreuse et polymorphe au septième art, dont les contours réflexifs ne nous sont pas imposés comme des vérités implacables (un bon point qui le démarque de nombreux cinéastes s'étant déjà essayé à une telle entreprise), mais puisque Desplechin aime le cinéma et que nous aussi, n'est-ce pas là au fond, l'essentiel à retenir ?
Jonathan Chevrier
Acteurs : Mathieu Amalric, Françoise Lebrun, Milo Machado-Graner, Micha Lescot, Sam Chemoul, Salif Cissé,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h28min.
Synopsis :
Qu’est-ce que c’est, aller au cinéma ?
Pourquoi y allons-nous depuis plus de 100 ans ?
Je voulais célébrer les salles de cinéma, leurs magies.
Aussi, j’ai suivi le chemin du jeune Paul Dédalus, comme le roman d’apprentissage d’un spectateur. Nous avons mêlé souvenirs, fiction, enquêtes…
Un torrent d’images qui nous emporte.
Critique :
Célébration de la magie intemporelle du 7ème art, tout autant que théorisation maladroite (mais prenante) sur l'importance de la découverte cinématographique, #Spectateurs! se fait une ode baroque et généreuse qui questionne la place du spectateur et comment se façonne son regard pic.twitter.com/HsNGdPldKk
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 15, 2025
Il y avait jadis quelque chose de réconfortant dans l'idée familière de retrouver les mêmes thèmes où presque librement egrainés/recyclés par Arnaud Desplechin à chacune de ses nouvelles réalisations, ce petit côté rassurant de savoir où l'on va, comme une contine dont on ne connait pas forcément les paroles, mais dont la mélodie nous trotte toujours gentiment dans la tête.
Mais ça, c'était avant de découvrir la grosse déception qu'incarnait son dernier effort en date, Frère et Soeur, sorte de fusion peu inspirée de deux de ses plus beaux efforts, Rois et Reine (à qui il reprend sa structure fragmentée) et Un Conte de Noël, incarnant à la fois le meilleur comme le plus irritant du cinéma du cinéaste, vissé qu'il était sur l'exploration accrue des maux qui gangrenaient un clan - plus directement deux de ses enfants -, gentiment bourgeois mais surtout férocement antipathique.
Copyright Les Films du Losange |
Un écueil qui n'écornait pas pour autant notre envie plutôt marquée de découvrir son bien nommé Spectateurs !, que l'on pensait - de loin - comme un cousin au monument Cinema Paradisio de Giuseppe Tornatore (qui a dit Babylon ?), non pas dans un portrait nostalgique d'une vie - accompagnée par la cinéphilie - perdue, mais bien dans une réflexion métacinématographique sur l'importance du septième art comme de la fonction même du spectateur (après tout, tout est dans le titre), qu'il nourrirait donc de sa propre expérience aussi bien derrière la caméra que devant un écran.
Plutôt bonne pioche au final puisque la réflexion chapitrée du cinéaste, certes peu originale dans le fond mais prenant la forme d'un essai un poil déroutant dans sa manière de mêler fiction et documentaire, interroge ici avec pertinence l'art et l'expérience de sa découverte pour mieux définir qui est son auditoire et comment se façonne son regard, à travers un prisme majoritairement autobiographique : la création d'un jeune alter-ego - Paul Dédalus, une évidence - dont il scrute toutes les étapes passionnées de la cinéphilie (où il cite avec gourmandise autant sa séance de Shoah de Claude Lanzmann, aussi inoubliable que fondatrice, que son expérience spectatorielle auprès des oeuvres de la Nouvelle Vague, en passant par des extraits de la filmographie de Bergman, L’homme à la caméra de Dziga Vertov,...) jusqu'à sa transformation/identification ultime en metteur en scène.
Copyright Les Films du Losange |
Célébration de la toute puissance comme de la magie intemporelle du septième art, tout autant que théorisation raccourcie (moins de quatre-vingt-dix minutes au compteur) même si prenante, sur l'importance comme la passion même de la découverte cinématographique (sans spectateur, lambda comme cinéphile où même cinéaste, il n'y a pas de créateur), Spectateurs !, embaumé dans un enthousiasme qui n'a d'égal que sa sincérité, permet à Desplechin de raconter le cinéma au sens large mais également le sien, de commenter son propre lien avec lui avant tout et surtout comme un spectateur et non comme un auteur; un pendant qu'il laisse d'ailleurs, malheureusement, au second plan, ce qui se ressent aussi bien dans une écriture un brin bordélique, que dans une mise en scène sans ambition ni éclats.
Alors certes, on pourra assez (un peu trop pour son bien) souvent pointer la maladresse parfois criante de cette ode baroque, généreuse et polymorphe au septième art, dont les contours réflexifs ne nous sont pas imposés comme des vérités implacables (un bon point qui le démarque de nombreux cinéastes s'étant déjà essayé à une telle entreprise), mais puisque Desplechin aime le cinéma et que nous aussi, n'est-ce pas là au fond, l'essentiel à retenir ?
Jonathan Chevrier