[CRITIQUE] : Mémoires d'un escargot
Réalisateur : Adam Elliot
Acteurs : avec les voix de Sarah Snook, Jacki Weaver, Kodi Smit-McPhee, Eric Bana,...
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Budget : -
Genre : Animation, Drame.
Nationalité : Australien.
Durée : 1h34min.
Synopsis :
À la mort de son père, la vie heureuse et marginale de Grace Pudel, collectionneuse d’escargots et passionnée de lecture, vole en éclats. Arrachée à son frère jumeau Gilbert, elle atterrit dans une famille d’accueil à l’autre bout de l’Australie. Suspendue aux lettres de son frère, ignorée par ses tuteurs et harcelée par ses camarades de classe, Grace s’enfonce dans le désespoir. Jusqu’à la rencontre salvatrice avec Pinky, une octogénaire excentrique qui va lui apprendre à aimer la vie et à sortir de sa coquille…
Critique :
Dis comme ça, tu ne t'en doute peut-être pas vu que son cadre ne squatte pas tant que cela le grand écran - tout du moins par chez nous -, mais derrière l'Australie furieuse et vrombissante de George Miller où encore celle fleurant bon la poussière aride et hostile de l'Outback (pas vraiment celui de Mick Dundee et de sa Geraldine, tu l'auras compris) de la Ozploitation, il y a un tout petit cœur poétique qui bat, et qui ne demande qu'à montrer sa douceur dans une salle obscure.
Et ce petit cœur est en - grande - partie porté par Adam Elliot, qui nous avait déjà mis une patate de forain avec son premier effort, le magnifique et tout en humour noir Mary & Max.
Bonne nouvelle, quinze ans plus tard et non sans s'être fait méchamment attendre, il récidive avec encore plus d'entrain quinze ans plus tard avec son second long-métrage, une nouvelle fois en stop-motion, Mémoires d'un escargot, merveille de petit bout d'animation à la fois formidablement déchirant et savoureusement excentrique et macabre; l'exemple type de proposition qui ne ressemble à aucun autre film d'animation, dont la révérence au cinéma de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro va bien au-delà de la présence de leur comédien fétiche, l'immense Dominique Pinon, au sein de la distribution vocale.
Cocktail tout aussi excentrique et carnavalesque que son illustre ainé (avec qui il partage une narration trouvant à nouveau un point d'ancrage solide à travers une amitié intergénérationnelle extraordinaire), à la palette de couleurs à la fois poussiéreuse et volontairement déprimante, l'histoire ne met pas longtemps pour catapulter gentiment son auditoire dans le mood tout en désespoir de son héroïne : à la mort de son père alcoolique, une heureuse et marginale collectionneuse d’escargots et passionnée de lecture, Grace, se voit arrachée à son frère jumeau et balancée dans une famille d’accueil à l’autre bout d'une Australie au cœur des 70s.
Et pour ne rien gâcher à la fête, elle, qui se languit de recevoir des nouvelles de son frère (un échange épistolaire où ils jurent de tout faire pour se retrouver un jour), est ignorée par ses tuteurs et harcelée par ses camarades de classe.
Mais si jusqu'ici sa destinée semblait s'être amusée à chier dans son bol de céréales chaque matin, tout va changer lorsqu'elle rencontre Pinky, une octogénaire qui va lui apprendre à aimer la vie, même si elle n'est faite que de désillusion et de coups durs...
Aussi bien ode à la marginalité à la fois sardonique et sensible, fantaisiste et cruelle, où Adam Elliot n'a jamais peur d'affirmer haut et fort que l'enfance - comme la vie d'adulte - peut être un territoire tout autant solitaire qu'effrayant, que magnifique récit d'émancipation et d'affirmation de soi d'une gamine dont la passion pour les escargots est à la fois le symbole du souvenir maternel, mais aussi un outil identitaire (elle ne cesse de se replier sur elle-même, presque dans une coquille imaginaire, lorsque son existence lui semble insupportable); Mémoires d'un escargot se fait un cabinet des curiosités incroyable dans sa manière de déceler la beauté dans les recoins les plus putrides et douloureux de l'humanité, au plus près de personnages aux névroses affirmées.
Ne reculant jamais devant les sujets difficiles (toxicomanie, alcoolémie, insécurité, deuil, handicap, troubles obsessionnels compulsifs, dépression et souffrance psychologique, échangisme,...), oscillant avec délicatesse entre comédie - noire - et tragédie, Elliot intime tout du long à sa jeune héroïne comme à son auditoire, de se délecter de la grâce imprévisible de la vie car à l'image même des escargots qui ne peuvent pas reculer, le temps file et l'on se doit de courageusement avancer, comme chaque chose, et de vivre chaque instant qu'il nous ait donné au maximum.
Loin du cynisme à peine masqué d'un Pixar dont la tendresse est désormais clouée sur l'autel - à grandes oreilles - de l'opportunisme laid (coucou Vice-versa 2), Mémoires d'un escargot et son animation aussi méticuleuse et sophistiquée que son écriture est inventive et pétri de cœur, distille l'idée, merveilleuse même dans son ton doux-amer, que nous pouvons continuer à vivre et à avancer même avec nos fêlures, même avec nos coquilles fendues, tant que l'on accepte l'idée qu'un lendemain meilleur puisse tout réparer.
On a beau être en janvier, on a presque déjà envie d'affirmer que l'on ne verra, sans doute, pas plus beau et grand film d'animation en 2025.
On tient les paris...
Jonathan Chevrier
Acteurs : avec les voix de Sarah Snook, Jacki Weaver, Kodi Smit-McPhee, Eric Bana,...
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Budget : -
Genre : Animation, Drame.
Nationalité : Australien.
Durée : 1h34min.
Synopsis :
À la mort de son père, la vie heureuse et marginale de Grace Pudel, collectionneuse d’escargots et passionnée de lecture, vole en éclats. Arrachée à son frère jumeau Gilbert, elle atterrit dans une famille d’accueil à l’autre bout de l’Australie. Suspendue aux lettres de son frère, ignorée par ses tuteurs et harcelée par ses camarades de classe, Grace s’enfonce dans le désespoir. Jusqu’à la rencontre salvatrice avec Pinky, une octogénaire excentrique qui va lui apprendre à aimer la vie et à sortir de sa coquille…
Critique :
Ne reculant pas devant les sujets difficiles, oscillant avec délicatesse entre humour et tragédie,#MémoiresDUnEscargot, dans la lignée de Mary & Max, se fait un cabinet des curiosités incroyable dans sa façon de déceler la beauté dans les recoins les plus douloureux de l'humanité pic.twitter.com/mSv41bxfUS
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 15, 2025
Dis comme ça, tu ne t'en doute peut-être pas vu que son cadre ne squatte pas tant que cela le grand écran - tout du moins par chez nous -, mais derrière l'Australie furieuse et vrombissante de George Miller où encore celle fleurant bon la poussière aride et hostile de l'Outback (pas vraiment celui de Mick Dundee et de sa Geraldine, tu l'auras compris) de la Ozploitation, il y a un tout petit cœur poétique qui bat, et qui ne demande qu'à montrer sa douceur dans une salle obscure.
Et ce petit cœur est en - grande - partie porté par Adam Elliot, qui nous avait déjà mis une patate de forain avec son premier effort, le magnifique et tout en humour noir Mary & Max.
Bonne nouvelle, quinze ans plus tard et non sans s'être fait méchamment attendre, il récidive avec encore plus d'entrain quinze ans plus tard avec son second long-métrage, une nouvelle fois en stop-motion, Mémoires d'un escargot, merveille de petit bout d'animation à la fois formidablement déchirant et savoureusement excentrique et macabre; l'exemple type de proposition qui ne ressemble à aucun autre film d'animation, dont la révérence au cinéma de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro va bien au-delà de la présence de leur comédien fétiche, l'immense Dominique Pinon, au sein de la distribution vocale.
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Cocktail tout aussi excentrique et carnavalesque que son illustre ainé (avec qui il partage une narration trouvant à nouveau un point d'ancrage solide à travers une amitié intergénérationnelle extraordinaire), à la palette de couleurs à la fois poussiéreuse et volontairement déprimante, l'histoire ne met pas longtemps pour catapulter gentiment son auditoire dans le mood tout en désespoir de son héroïne : à la mort de son père alcoolique, une heureuse et marginale collectionneuse d’escargots et passionnée de lecture, Grace, se voit arrachée à son frère jumeau et balancée dans une famille d’accueil à l’autre bout d'une Australie au cœur des 70s.
Et pour ne rien gâcher à la fête, elle, qui se languit de recevoir des nouvelles de son frère (un échange épistolaire où ils jurent de tout faire pour se retrouver un jour), est ignorée par ses tuteurs et harcelée par ses camarades de classe.
Mais si jusqu'ici sa destinée semblait s'être amusée à chier dans son bol de céréales chaque matin, tout va changer lorsqu'elle rencontre Pinky, une octogénaire qui va lui apprendre à aimer la vie, même si elle n'est faite que de désillusion et de coups durs...
Aussi bien ode à la marginalité à la fois sardonique et sensible, fantaisiste et cruelle, où Adam Elliot n'a jamais peur d'affirmer haut et fort que l'enfance - comme la vie d'adulte - peut être un territoire tout autant solitaire qu'effrayant, que magnifique récit d'émancipation et d'affirmation de soi d'une gamine dont la passion pour les escargots est à la fois le symbole du souvenir maternel, mais aussi un outil identitaire (elle ne cesse de se replier sur elle-même, presque dans une coquille imaginaire, lorsque son existence lui semble insupportable); Mémoires d'un escargot se fait un cabinet des curiosités incroyable dans sa manière de déceler la beauté dans les recoins les plus putrides et douloureux de l'humanité, au plus près de personnages aux névroses affirmées.
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Ne reculant jamais devant les sujets difficiles (toxicomanie, alcoolémie, insécurité, deuil, handicap, troubles obsessionnels compulsifs, dépression et souffrance psychologique, échangisme,...), oscillant avec délicatesse entre comédie - noire - et tragédie, Elliot intime tout du long à sa jeune héroïne comme à son auditoire, de se délecter de la grâce imprévisible de la vie car à l'image même des escargots qui ne peuvent pas reculer, le temps file et l'on se doit de courageusement avancer, comme chaque chose, et de vivre chaque instant qu'il nous ait donné au maximum.
Loin du cynisme à peine masqué d'un Pixar dont la tendresse est désormais clouée sur l'autel - à grandes oreilles - de l'opportunisme laid (coucou Vice-versa 2), Mémoires d'un escargot et son animation aussi méticuleuse et sophistiquée que son écriture est inventive et pétri de cœur, distille l'idée, merveilleuse même dans son ton doux-amer, que nous pouvons continuer à vivre et à avancer même avec nos fêlures, même avec nos coquilles fendues, tant que l'on accepte l'idée qu'un lendemain meilleur puisse tout réparer.
On a beau être en janvier, on a presque déjà envie d'affirmer que l'on ne verra, sans doute, pas plus beau et grand film d'animation en 2025.
On tient les paris...
Jonathan Chevrier