[CRITIQUE] : Maria
Réalisateur : Pablo Larraín
Acteurs : Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino, Alba Rohrwacher, Haluk Bilginer, Kodi Smit-McPhee, Valeria Golino,...
Distributeur : ARP Sélection
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Américain, Chilien, Italien, Allemand.
Durée : 2h03min.
Synopsis :
La vie de la plus grande chanteuse d’opéra du monde, Maria Callas, lors de ses derniers jours, en 1977, à Paris.
Critique :
Embaumé dans la superbe photo d'Ed Lachman, #Maria, plus encore que Jackie et Spencer, se fait une peinture abstraite et élégante mais voilée, un hommage aimant au talent comme à la résilience de Maria Callas mais à qui il manque ce petit plus de profondeur pour être renversant. pic.twitter.com/KHIf0NAzxQ
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 28, 2025
Le parallèle est un poil vulgaire certes (mais pertinent, donc ne juges pas trop vite), et ne rendrait presque pas en apparence, justice à la qualité du cinéaste de l'orfèvre chilien Pablo Larraín et pourtant, il y a une sorte de LMU, le Larraín Cinematic Universe (marque pas encore déposée, avis aux amateurs), qui s'est constitué au fil de son œuvre, et pas uniquement dans le versant féminin de ses drames/biopics historiques : quand bien même il a su s'attacher à plusieurs figures féminines qui ont profondément marqué l'imaginaire du XXe siècle, tout son édifice n'a pas forcément commencé avec Jackie, mais bien le tout aussi fantastique Neruda.
Des petites pièces, des petits fragments de vies sur des périodes à la fois tragiques et charnières, capturés d'une manière profondément intense et captivante, motivé par l'idée saine de ne pas reproduire servilement aussi bien la formule usée du biopic conventionnel, ni de trop s'approcher de la réalité (devinez quoi : le cinéma c'est du cinéma), mais bien d'incarner des interprétations qui déconstruisent le réel dans des portraits volontairement abstraits et symboliques, imparfaits mais incroyablement vivants.
En ce sens, Maria incarne une parfaite continuité dans sa peinture de l'inaccessible Maria Callas, tant chacun de ses biopics féminins suivent la même structure (trois emprisonnements dans des cages dorées, trois femmes bouffées par l'isolement, l'incompréhension et la solitude la plus absolue), le même emballement dans sa mise en scène (à la fois distancé et au plus près des corps, cocktail de travellings et de plans serrés caméra à l'épaule), le même souci de se suspendre sur le fil ténu d'une réalité romancée et de séquences oniriques de plus en plus imposantes.
Imparfait mais libre, le film se concentre sur les derniers jour de Callas, une semaine seulement avant sa mort dans la solitude et la maladie, alors que l'éclat de sa gloire s'éteint tout aussi vite qu'elle et sa voix, jadis un don mais aujourd'hui une malédiction.
Un déclin à travers lequel Larraín tente, avec plus où moins de réussite, à percer le mystère Callas, artiste torturée et mélancolique abandonnée par l'amour de sa vie (le magnat Aristote Onassis, qui la quittera pour... Jackie Kennedy) et les siens (une mère qui a façonné l'artiste qu'elle est devenue, mais a brisé la femme qui cherchait à se construire), une Diva continuellement en représentation, cachée derrière sa grandeur et vivant désespérément dans le passée.
Sa volonté de décortiquer le mythe suit le même mouvement de la précision chirurgicale et inquiétée de la performance d'une Angelina Jolie exceptionnelle, qui donne de la grâce à des détails en apparence superficiels.
Une compréhension commune qui évite le piège de la performance dans la performance, pour mieux incarner un portrait respectueux, digne et nuancé de la cantatrice grecque, même si le mystère l'entourant semble encore un brin persisté une fois que sonne le glas du générique de fin.
Car même si la narration cherche à égrainer les pistes pour sonder son mal-être, notamment à travers plusieurs flashbacks qui apparaissent in fine plus esquissés que réellement probant (notamment ceux concernant ses liens familiaux), elle ne semble jamais totalement en déterrer les racines, à pleinement sonder sa psyché hantée, complexe et obsédante, même si Larraín comme Jolie, parviennent a susciter une empathie folle à son sujet.
Embaumé dans la magnifique photographie d'Ed Lachman, Maria, encore un peu plus que Jackie et Spencer, se fait une peinture abstraite et élégante mais un chouia voilée, un hommage symbolique et aimant au talent comme à la résilience de Maria Callas mais à qui il manque ce petit plus de profondeur pour être renversant.
Jonathan Chevrier