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[CRITIQUE] : Leni Riefenstahl, la lumière et les ombres

Réalisateur : Andres Veiel
Acteurs : -
Distributeur : ARP Sélection
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Allemand.
Durée : 1h55min  

Synopsis :
Elle a été actrice, monteuse, réalisatrice.
Elle a créé des images iconiques.
Elle a été proche du régime nazi.
Qui était-elle ? Une opportuniste ? Une manipulatrice ? Une visionnaire ?
Ses archives personnelles, accessibles pour la première fois, la révèlent enfin, dans toute sa complexité, son ambiguïté.




Critique :



Il y a des explorations d'un héritage cinématographique où, plus largement, artistique, qui se font plus difficile à admirer comme à aborder, d'autant plus lorsqu'ils sont frontalement liés à une tragédie humaine - ici à la plus grande échelle qui soit.

Pas un petit effort donc opérer par Andres Veiel à travers son documentaire, Leni Riefenstahl, la lumière et les ombres, lui qui plonge autant dans l'œuvre même de la cinéaste et photographe allemande, qu'au plus près de ses liens complexes avec le régime nazi et de son amitié avec Hitler, juxtaposant son portrait riche en archives - publiques comme intimes - avec une mécanique de démantèlement fouillé, une dissection objective de toutes ses déclarations passées, elle qui a toujours nié avec obstination, malgré les faits, ses affinités poussées avec le régime.

 
Copyright ARP Sélection 

À l'image de son sujet, qui connaissait que trop bien le pouvoir de la caméra pour en jouer, Viel se concentre avec une minutie et un ordre assez strict, plus sur l'individu que le débat dialectique - et souvent hors de propos - sur la séparation entre l'œuvre et l'auteur derrière, imposant de facto une question encore plus pertinente derrière sa déconstruction biographique de son auto-acquittement systématique : qui est moralement plus incriminable entre un/une cinéaste opportuniste qui sert la propagande d'un régime totalitaire, et la société totalement consciente de ses actes, qui a préféré fermer les yeux et la laisser impunie.

Par sa manière de reprendre avec force, mais sans fureur, son pouvoir cinématographique à la figure complexe et contradictoire qu'est Leni Riefenstahl (qui aura, in fine,  conservé les preuves contredisant ses mensonges), ce documentaire dresse un réquisitoire aussi édifiant qu'effrayant tant en remplaçant dans la lumière une telle figure, il fustige aussi bien son discours qu'il lui offre une certaine immortalité qui, à une heure où tout est manipulé et manipulable, encore plus qu'hier, nourrit encore l'amoralité d'un néo-fascisme contemporain de plus en plus décomplexé.


Jonathan Chevrier