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[ENTRETIEN] : Entretien avec Puggy (Les Inséparables)

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Groupe extrêmement populaire en Belgique, Puggy est désormais un habitué des productions NWave. L’occasion était donc belle de discuter avec ses membres pour aborder leur travail sur Les inséparables, les poussant plus à de la composition musicale pure dans les bureaux du studio d’animation belge.

C’était chouette de ne pas avoir à faire la même chose et de ne pas tomber dans une routine de position. Là, c’était vraiment spécial de travailler avec les acteurs, d’imaginer comment ils allaient interpréter le texte, tout ce qui est articulation, rythme. - Puggy


Comment avez-vous travaillé la bande originale du film ?

Ziggy : Un peu comme chaque BO, on commence bien à l’avance. On a un meeting ici, on voit les premières images, les premiers storyboards et le script. Pour la plupart des films, on commence assez tard dans le processus, quand les images se terminent et dans un timing plus tardif du film. Cette fois-ci par contre, ça a été un peu différent car il y a des scènes purement musicales dans le film : il y a du rap, une scène chantée à la fin. Il faut donc travailler dessus avant que l’animation ne commence car tout doit être animé sur les musiques. L’animation prend un long moment de travail donc je pense qu’on a commencé l’été passé, il y a presque un an et demi, pour les scènes de rap et de comédie musicale.

Justement, quel a été le challenge d’avoir plus de séquences musicales par rapport à Bigfoot Junior et d’avoir un protagoniste clairement orienté chanson ?

Romain : C’était chouette de ne pas avoir à faire la même chose et de ne pas tomber dans une routine de position. Là, c’était vraiment spécial de travailler avec les acteurs, d’imaginer comment ils allaient interpréter le texte, tout ce qui est articulation, rythme. C’était assez nouveau pour nous. Il fallait que ce soit simple, qu’on puisse le faire nous-mêmes. On a essayé de le faire chacun à notre tour. C’était donc ça la particularité de ce film. Il a fallu aussi composer le Musical à la fin et garder l’interprétation des autres. C’était donc un peu unique et très rafraîchissant.

Ziggy : La seule difficulté, je dirais, est qu’on a dû adapter le texte de tous ces morceaux. On a dû s’inspirer du script et condenser ça dans le texte. C’est quelque chose que nous n’avions jamais dû faire avant. Souvent, quand on écrit des textes pour les films, on fait quelque chose d’assez libre. Ici, cela faisait partie du script même.

Cela fait déjà plusieurs collaborations avec le studio NWave. Comment cette relation a-t-elle évolué ?

Matthew : C’est vrai que ça a énormément changé. Sur le premier film, Bigfoot Junior, ils nous ont contactés essentiellement car ils voulaient utiliser la musique de Puggy. Ils nous ont donc demandé de composer des chansons originales mais dans notre style. Ils se sont dit ensuite que, tant qu’à faire, nous pouvions aussi travailler à toute la musique du film. Il y avait aussi un peu d’orchestration, du soundscape, etc. On a donc appris à faire ce métier en travaillant avec eux. Ils nous ont fait confiance sur ce film, puis sur le second, Bigfoot Family. Quand il est venu le temps de commencer Hopper et le hamster des ténèbres, l’idée était de faire de la musique orchestrale type classique, de l’orchestre symphonique un peu à la John Williams. On s’est donc pris au jeu mais on a appris sur le tas très rapidement, vraiment composer pour un orchestre symphonique. Heureusement, on a eu l’aide de Pavel Guerchovitch, qui est un ami à nous et qui a retranscrit toute l’orchestration pour que l’orchestre puisse jouer. Dans Les inséparables, Jérémie Degruson, qui adore tout ce qui est éclectique et est un grand mélomane lui-même, nous donne des contraintes hyper intéressantes car il nous donne des genres complètement différents et qui sortent fort de ce que nous ferions naturellement. C’est génial car, étant curieux et musiciens, on a envie de faire ces musiques, on doit comprendre les codes et étudier le genre musical en question. Donc c’est un vrai challenge et on a appris énormément sur chaque film avec l’impression d’avoir fait des années d’université. Grâce à NWave, on a appris à vraiment faire énormément de choses pour les musiques de films. C’était donc autant une école qu’une aventure humaine. Plus ils nous font confiance, plus on apprend et plus on avance donc ça change énormément.

Est-ce que vous avez eu certaines inspirations sur ce film-ci, notamment pour ses thématiques d’imagination, d’aventure et d’amitié ?

Matthew : À chaque fois que nous avons travaillé avec Jérémie (et les fois d’avant avec Benjamin), ils ont déjà une vision de leur film. Cela fait déjà un an qu’ils ont travaillé sur le film avant qu’on n’ait le scénario ou qu’on voie le début d’animation. Ils ont donc déjà les idées très claires. Quand on fait de la musique, cela peut être très utile d’avoir des contraintes. On croit qu’en avoir, ça limite le scope imaginaire ou créatif. Pour moi, souvent, c’est l’inverse. C’est-à-dire qu’on doit être très créatif dans un cercle un peu plus fermé et plaire à la vision du réalisateur. Dans les inspirations, le fait que Jérémie est mélomane nous envoie des idées qui ne sont pas toujours les musiques qu’on connaît et dont on doit alors s’inspirer pour faire de nouvelles choses. Maintenant, souvent, on a aussi nos propres idées. On propose des choses auxquelles ils n’auraient pas nécessairement pensé. C’est pris ou pas pris mais ce sont des conversations. L’inspiration, on la trouve entre nous trois avec tout notre bagage musical et on s’inspire l’un de l’autre. On s’inspire des réalisateurs avec qui on travaille, des scénarii, des films qu’on aime car on est également cinéphiles. Il y a des compositeurs de musiques de films dont on est très fan et dont on s’inspire évidemment. C’est vrai que, pour la musique en règle générale, la musique que l’on fait quand on est Puggy ou pour d’autres gens, on s’inspire de tout musicalement et on est très curieux. Les films ont été supers pour nous car ils sont un réel échappatoire créatif, nous permettant de faire des choses qu’on ne peut pas faire ou qu’on ferait moins quand on est notre propre groupe, notre propre entité sous le nom de Puggy.

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Pour chacun, quelle est la bande originale qui vous a le plus marqué ?

Ziggy : Je pense qu’on va tous répondre John Williams (rires). Ces dernières années, ce serait plus des BO qui sortent de l’eau ou, assez récemment, « 8th grade », avec une compositrice allemande qui mélange électronique et musique classique de façon intéressante. Je pense que, dans ces dernières années, c’est la BO qui m’a le plus « choqué » car ce n’est pas une BO à laquelle j’avais pensé.

Matthew : J’ai beaucoup aimé la BO du Pinocchio de Guillermo del Toro. C’est Desplat qui a fait ça, un compositeur français qui est extraordinaire. Il y a une simplicité dans les mélodies, c’est ultra élégant et qu’est-ce que c’est bien orchestré ! C’est tellement au service du film, qui est déjà extraordinaire par son animation. C’est du Clay Animation et la musique est tellement bien faite, de bon goût et marchant très bien dans le film. Je trouve que c’est un bel exemple de la musique au service du film. C’est une BO que j’écoute volontiers en dehors du film tant la musique est bien faite et ficelée. Morricone aussi, on aime tous ses grands classiques. Hans Zimmer aussi, comment ne pas être fan ?

Ziggy : Même les vieux Disney.

Romain : Comme Le Livre de la Jungle.

Ziggy : Même les plus récents ou ceux des années 90 comme Menken. Franchement, ce sont des chefs d’œuvre.

Mathew : Et tous les Bond. On est obligé d’être fan de toutes les BO des James Bond (rires).

Romain : Moi, la dernière BO qui m’a le plus marqué, c’est celle de la série Dark. Le compositeur a fait aussi plein d’autres choses et c’est vraiment marqué car, comme le disait Ziggy, c’est un truc allemand qui est très minimaliste, avec plein de samples avec un peu de musique classique mélangée, et cela crée une ambiance qui est marquante. Tu sens vraiment une ambiance musicale qui n’est pas normale et c’est déstabilisant donc ça m’a beaucoup touché.

Ziggy : Dans le même sens, il y a l’orchestre derrière The White Lotus. C’est très particulier et intriguant.

Aussi, sur le même genre, quels sont les films d’animation qui vous ont marqués ?

Matthew : C’est parce que tu en as parlé tout à l’heure mais Le Livre de la Jungle. Je crois que c’est un de mes films d’enfance préféré, je connaissais la BO par cœur. Étant né de parents anglais, j’ai grandi avec tous ces films en anglais. J’ai chanté cette BO toute mon enfance. C’est tellement bien écrit, il n’y a aucune chanson à jeter. Les Aristochats aussi, les vieux Disney aussi.

Romain : En animation pure, on va quand même dire Toy Story car ça a mis un standard assez violent dans le monde du cinéma, c’était un des premiers films complètement tournés avec un ordinateur.

Matthew : La BO de Randy Newman est dingue aussi. « You got a friend in me”, j’adorais.

Romain : Ça a aussi été le début d’une grande aventure pour Pixar et Disney, ça a chamboulé tout Jusque-là où on est avec NWave, ce sont des films qui ont été une inspiration pour le cinéma entier.

Matthew : Il y a deux films plus récents, avec une espèce de croisement avec le film d’animation qui aurait dû en faire des œuvres plus familiales, parfois un peu enfant et où on s’est rendus compte qu’il y avait une lecture plus adulte présente aussi. Je trouve personnellement que Wall-E est plus un film d’adulte qu’un film pour enfants. Je trouve qu’Up a des passages où tu ne peux être que bouleversé.

Ziggy : Les cinq premières minutes sont bouleversantes.

Matthew : Ça, c’est un chef d’œuvre.

Ziggy : Comme court-métrage, c’est loin au-dessus du film je trouve. Inside out, c’est aussi très réussi dans le concept. Il y a aussi Miyazaki évidemment. On est très fans aussi de lui.

Matthew : Tu as vu le dernier ?

Ziggy : Non

Romain : Pas encore.

Il est très bien.

Matthew : Je le trouve extraordinaire aussi. Il est en train de se faire défoncer et je ne suis pas d’accord. Il est vraiment bien.

À mon avis, il est moins accessible d’apparence, plus froid d’apparence que certains titres et je crois que ça impacte la vision de certains spectateurs.

Matthew : Il est plus dark le dernier.

Il faut une certaine immersion pour le début peut-être, je sais que j’ai été personnellement déstabilisé les 15 premières minutes.

Matthew : Quand on a été le voir, on était assis à côté d’une japonaise qui a rigolé à la quasi-totalité du film et sortait des phrases avant même que la scène se déroule. Il paraît que, dans ses films, il y a tellement de références à la culture japonaise que l’on ne comprend pas en Occident. Il y a beaucoup d’inside jokes. Apparemment, le film est très drôle avec cette culture donc cela vaudrait sans doute la peine, avant d’aller le voir, de lire une analyse japonaise du film pour mieux comprendre les références en son sein. Je pense qu’en tant qu’européen, on les complexifie. En tout cas, je l’ai adoré le dernier !

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C’est aussi une très grande année niveau animation justement, notamment dans les diversités esthétiques et sonores. Quel regard vous adoptez à ce sujet, sachant qu’on a eu le Miyazaki, Spider-Verse, Élémentaire qui expérimente techniquement, …

Ziggy : Même Le Chat Potté 2 a un style d’animation switchant entre la 2D et la 3D comme dans Les inséparables. Je pense que c’est chouette d’avoir cette volonté de pousser les curseurs mais ça fait des années que cela existe. Pixar a été très fort à ce niveau pendant longtemps sans faire d’erreurs. D’un autre côté, j’ai bien aimé Élémentaire. J’ai trouvé ça assez touchant mais je sais aussi qu’il a été beaucoup critiqué.

Matthew : J’ai cette impression qu’il y a tellement de films de ce genre à découvrir. Il fut un temps où tu avais une grande boîte qui sortait un film d’animation par an et que tu allais découvrir à Noël enfant avec tes parents. C’était le nouveau Disney, le nouveau Pixar, … Là, il n’y a pas un mois sans qu’il n’y ait deux, trois sorties, avec des titres plus indépendants.

Ziggy : Même les enfants ont plus facilement accès à cela, avec Netflix par exemple.

Matthew : Comment rester émerveillé quand tu as tout vu ?

Ziggy : C’est vrai. Il faut chercher à se différencier mais c’est clair que les deux « Spider-Verse » sont visuellement au top. J’ai aussi aimé Invincible, les séries comme ça qui font des choses qu’on ne pouvait pas faire avant. Il y avait moins de choses comme ça il y a 10 ans. Après, on a toujours eu des comic books qui étaient assez dark comme Watchmen.

Matthew : Après, tu as le marché qui fait que des gens peuvent tourner ces films et avoir une rentabilité qui n’existait pas il y a x années.

Ziggy : Tu as aussi une audience adulte qui a grandi avec des dessins animés et permettent de faire des choses plus sombres.

Matthew : Oui, il y a beaucoup de facteurs mais on n’est pas qualifiés pour en parler (rires).


Propos recueillis par Liam Debruel.

Merci à Marie-France Dupagne de The PR Factory pour cette interview.

 

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