[CRITIQUE] : Soudain Seuls

Réalisateur : Thomas Bidegain
Acteur : Gilles Lellouche et Mélanie Thierry.
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Thriller, Romance, Drame.
Nationalité : Français, Américain, Belge, Islandais.
Durée : 1h50min.

Synopsis :
En couple depuis 5 ans, Ben et Laura ont décidé de faire le tour du monde en bateau. Avant d'atteindre l'Amérique du Sud, ils font un détour vers une île sauvage, près des côtes antarctiques. En pleine exploration, une tempête s'abat sur eux et leur bateau disparaît. Éloignés du monde, soudain seuls face au danger et à l'hiver qui approche, ils vont devoir lutter pour leur survie et celle de leur couple.

Critique :

Plus Arctic que La Montagne entre nous (ouf), #SoudainSeuls se fait une solide odyssée infernale, un survival éprouvant à la fois physiquement que psychologiquement ses personnages, dans leur quête de survie autant que dans la mise à nu captivante de leur mécanique conjugale. pic.twitter.com/EksnTyulvk
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) December 4, 2023

À l'instar de Robert Pires pendant la Coupe du monde 1998 (la référence de boomer, on est d'accord), Gilles Lellouche, qu'on l'aime ou non, a sensiblement musclé son jeu au cours des dernières années, que ce soit du côté de chez Cédric Jimenez (oui), Fred Cavayé, Jérôme Salle mais aussi et surtout Jeanne Herry (qui a totalement appuyé sur des nuances de son jeu jusqu'ici insoupçonnées) et Frédéric Tellier, devenant sans forcer l'un des comédiens français les plus plaisants à suivre du moment.

En attendant de le retrouver, à nouveau, du côté de chez Quentin Dupieux - Daaaaaali ! -, c'est du côté du second effort de la (très) solide plume de Thomas Bidegain (l'excellent Les Cowboys), qu'il pointe le bout de son nez en ses dernières heures de 2023 avec Soudain Seuls, adaptation plutôt libre du roman éponyme de la navigatrice et romancière Isabelle Autissier, pour lequel il partage la vedette avec la magnifique Mélanie Thierry (un projet un temps porté par le tandem Jake Gyllenhaal/Vanessa Kirby, quand-même).

Adaptation libre donc, puisque uniquement basée sur la première partie du pavé, soit la quête de survie d'un couple en terres - vraiment - hostiles, une île sauvage près des côtes antarctiques, sur laquelle ils se retrouvent coincés à la suite d'une tempête avant ruiné leur tour du monde en bateau; Soudain Seuls joue pleinement - et logiquement - la carte du survival pur jus, furieusement dépouillé, rude et intime, un drame épuré qui se vit savoureusement au présent, flanqué au plus près des corps et des âmes d'une union littéralement mise à rude épreuve par la force des choses, là où il voyait - ironiquement - cette balade maritime planétaire comme le voyage de la dernière chance.

Dans une situation plus qu'extrême ou mère nature reprend et impose ses droits, arène hostile qui influencent les tensions et les fêlures qui les déchirent et les rendent encore plus profondes, Bidegain tisse donc la double quête de survie (impossible ?) à la fois physique et sentimentale, de deux âmes poussées dans leurs dernies retranchements (corporels comme moraux), dont on décortique les liens (le passé, les secrets, les non-dits, l'essence même de leurs sentiments,...) jusqu'à la moelle, dans une mise à nu juste et captivante de la mécanique conjugale (ou toute engueulade est presque une question de vie ou de mort), où les rapports de force se renverse dans un naturel désarmant.

Plus Arctic que La Montagne entre nous (ouf), Soudain Seuls se fait une éprouvante et captivante odyssée en plein enfer majestueux de beauté, un beau drame humain autant qu'il est un thriller tendu et un survival douloureux, éprouvant aussi bien physiquement que psychologiquement ses personnages comme son auditoire, le tout dominé par un superbe duo Gilles Lellouche/Mélanie Thierry tout en résilience.

Une vraie bonne séance.

Jonathan Chevrier