[CRITIQUE] : Bottoms

Réalisatrice : Emma Seligman
Avec : Rachel Sennott, Ayo Edebiri, Ruby Cruz,...
Distributeur : Amazon Prime Vidéo France
Budget : -
Genre : Comédie
Nationalité : Américain.
Durée : 1h32min

Synopsis :
PJ et Josie, deux lycéennes homosexuelles et impopulaires, créent un club de combat pour perdre leur virginité auprès des pom-pom girls. Le club de combat prend de l'ampleur et bientôt les filles les plus populaires de l'école se battent les unes contre les autres au nom de l'autodéfense. Mais le duo se retrouve dépassé et doit trouver un moyen de s'en sortir avant que leur plan ne soit dévoilé.



Critique :

Pertinent dans sa réappropriation queer des tropes et archétypes hétéro-masculins du teen movie US, autant qu'il accompagne avec malice la nouvelle vague de comédie rated R,#Bottoms se fait une satire affûtée pas exempt de maladresses certes, mais joliment intelligente et ludique pic.twitter.com/0m7xJpV40B

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) November 22, 2023

Force est d'admettre qu'un film vissé sur deux ados créant - à la suite de quelques quiproquos/mensonges alambiqués - un fight club de combats et d'autodéfense pour rencontrer des filles sexy et perdre leur virginité, ça a tout du teen movie gentiment déviant et décomplexé tout droit sortie des 80s/90s, intercalé entre un Revenge of the nerds et un American Pie.

La petite (plutôt grosse finalement, et plus subtile qu'elle n'y paraît) différence est que le second long-métrage d'Emma Seligman (le génial Shiva Baby) use de ce concept pour remplacer ses étudiants boutonneux et ringards en deux adolescentes lesbiennes, au sein d'une narration suffisamment consciente d'elle-même - et sur plusieurs niveaux -, pour rendre cette ballade régressive plus réfléchie mais surtout plus digeste que la moyenne.

Patti Perret/Orion Pictures

Et dans sa prise en grippe d'un genre dont elle épouse finalement nombreux des tropes (voire même une dynamique tout aussi problématique), notamment pour mieux s'en moquer ostensiblement, Seligman - avec l'aide de son actrice fétiche Rachel Sennott - pousse généreusement les curseurs au maximum, quitte à parfois se perdre un brin dans sa diatribe (son manque étrange de recontextualisation sur certains codes du genre démontrent justement pourquoi le teen movie US a furieusement vieilli) et ses ruptures de ton brutales.

Mais dans sa généralité, Bottoms vise juste et incarne un délice de satire drôle et ludique n'abordant jamais frontalement les limites évidentes de son concept (et encore moins via un humour graveleux aux jeux de mots trop intentionnels pour faire totalement mouche), fruit d'une écriture intelligente qui ne ridiculise nullement ses personnages, mais renforce aussi bien leur authenticité que la crédibilité des liens qui les unissent (auquel s'ajoute, bonus non-négligeable, une alchimie folle entre Sennott et Edebiri, qui renforce encore plus la crédibilité de leur amitié à l'écran), quand bien même ceux-ci correspondent, en apparence, à de véritables tropes ambulants vendant totalement l'esprit parodique du film.
Et c'est justement quand il se livre sans réserve à la satire, quand elle se moque d'un genre au regard strictement masculin ou presque, quand elle transcende l'espace et le temps au point de donner l'impression qu'elle vient d'une autre époque - tout en gardant sa verve furieusement actuelle -, que cette seconde réalisation fait réellement le plus mouche.

Patti Perret/Orion Pictures

Pertinent dans sa réappropriation queer des tropes hétéro-masculins du teen movie US, autant qu'il accompagne avec malice la nouvelle vague de comédie rated R, Bottoms se fait une satire affûtée pas exempt de maladresses certes, mais joliment intelligente et ludique.
Pas forcément le cas de bon nombre de ses aînés...


Jonathan Chevrier