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[CRITIQUE] : Une Année difficile


Réalisateurs : Olivier Nakache et Éric Toledano
Acteurs : Pio Marmaï, Jonathan Cohen, Noémie Merlant, Mathieu Amalric,...
Distributeur : Gaumont
Budget : -
Genre : Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h58min

Synopsis :
Albert et Bruno sont surendettés et en bout de course, c’est dans le chemin associatif qu’ils empruntent ensemble qu’ils croisent des jeunes militants écolos. Plus attirés par la bière et les chips gratuites que par leurs arguments, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans conviction…



Critique :


Conscient d'être tranquillement logé tout en haut de la chaîne alimentaire du divertissement populaire made in France, le tandem Olivier Nakache/Éric Toledano n'a jamais réellement eu peur de flirter avec l'actualité, au point même de faire de plusieurs sujets de société et des laissés-pour-compte (la question du handicap, des sans-papiers,...), le cœur même de leurs aventures cinématographique.

Il faut dire que le duo a toujours su, jusqu'à présent, passer à la moulinette avec une justesse et une souplesse étonnante, aussi bien le film social et politique, la comédie populaire et le drame intime et poignant, pour croquer de vrais moments de cinéma feel good, sans se noyer tête la première dans l'océan du bon sentiment proprement indigeste, sans perdre de vue ses personnages/personnes ordinaires.
Des visions de la France sensiblement réaliste, certes un poil utopiste dans leur désir de dépeindre un peuple uni dans la différence et l'entraide, mais qui transpirent joliment l'enthousiasme et la sincérité.

Copyright Carole Bethuel - 2022 Quad Films – Ten Cinéma – Gaumont – TF1 Films Production

Mais tout équilibre précaire, aussi habile soit-il, à ses limites.
Et leur nouvel effort, Une Année Difficile, laisse poindre pour la première fois de leur carrière, une sortie de route pas vraiment maîtrisée, eux qui cette fois s'attache non pas à un mais deux sujets sensibles - la crise écologique (et la sensibilisation à celle-ci), par le militantisme écologique, et la précarité/misère sociale, deux thèmes sociaux cruciaux et d'actualités, gentiment confrontés à la brutalité d'un gouvernement sourd et aveugle - pour être poli.

Une entreprise furieusement bancale, par excès de prétention peut-être (sûrement) même si toujours embaumé dans une légèreté qui leur est chère au cinéaste, vissée sur deux hommes surendettés et désespérés, Albert et Bruno, qui se décident à arpenter le chemin associatif avant de croiser la route d'un groupe d'activistes écologiques, qu'ils rejoignent cyniquement autant pour les avantages que cela leur apporte, que pour tenter de ravir le cœur d'une jolie militante, Cactus,...

Pas subtil pour un sou, l'écriture empile avec gourmandise les clichés et la caricature faciles, desservant autant son propos écologique urgent (puisque le message, moqué et jamais pris au sérieux, est véhiculé par l'humour et des personnages volontairement stéréotypés... jamais pris au sérieux) que celui plus familier d'une hypocrisie générale à dénoncer (le capitalisme démesuré ou encore le consumérisme décomplexé, uniquement et démagogiquement à hauteur du simple citoyen ordinaire), tout en survolant fébrilement le moindre des thèmes abordés, à coups de rebondissements jouant clairement avec les limites de la cohérence et de la crédibilité (des forces de l'ordre à la bienveillance gentiment lunaire, gardiens de notre paix factice face à des militants bobos-écolos-bloqueurs-relous qui nous emmerde).

Copyright Carole Bethuel - 2022 Quad Films – Ten Cinéma – Gaumont – TF1 Films Production

Reste alors, uniquement où presque, sa belle galerie de comédiens, rompus au genre (dont un Jonathan Cohen au jeu joliment plus nuancé qu'à l'accoutumée), de tenter de sauver les meubles (surtout une Noémie Merlant, complètement desservie par le scénario), même quand ils sont forcés de nous faire croire à un activisme de façade, où à une romance ampoulée et forcée.

Difficile de dénoncer voire même de sensibiliser avec une écriture qui ne fait que policer les choses, que gratter la surface et qui ne cherche jamais à n'être plus qu'une inoffensive balade feel good où tout va bien, même quand ça va mal.
Le positivisme et la sincérité ambiante ne font pas (plus) tout et Une Année Difficile, malgré son humour faisant parfois mouche et ses (bonnes) intentions, botte furieusement en touche et irrite même plus que de raison.
La France va mal, oui, mais elle n'ira pas forcément mieux non plus, en sortant de la salle...


Jonathan Chevrier