[CRITIQUE] : Toni en Famille

Réalisateur : Nathan Ambrosini
Acteurs : Camille Cottin, Léa Lopez, Thomas Gioria,...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique, Comédie, Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h36min.

Synopsis :
Antonia, dite Toni, élève seule ses cinq enfants. Un job à plein temps. Elle chante aussi le soir, dans des bars, car il faut bien nourrir sa famille. Toni a du talent. Elle a enregistré un single qui a cartonné. Mais ça, c’était il y a 20 ans. Aujourd’hui ses deux aînés s’apprêtent à rejoindre l’université. Alors Toni s’interroge : que fera-t-elle quand toute sa progéniture aura quitté le foyer ? A 43 ans, est-il encore temps de reprendre sa vie en main ?

Critique :

Dénué de tout jugement facile, aussi doux et juste qu'il est d'une sobriété désarmante, #ToniEnFamille se fait une comédie dramatico-familiale touchante et nuancée, aussi mâture qu'elle a le cœur au bon endroit, portée par une Camille Cottin extraordinaire et joliment empathique. pic.twitter.com/2gmr2CVcVh
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) September 4, 2023

Sacré parcours cinématographique tout de même, que celui qu'à connu Camille Cottin en l'espace d'une toute petite décennie, passant d'une extension des aventures comiques de sa " Connasse " sur grand écran à des partitions remarquées Robert Zemeckis, Cédric Klapisch, Thomas McCarthy, Jalil Lespert, Ridley Scott et même bientôt Bruno Dumont.
Et que dire de celui qu'elle a connu sur le petit écran, où elle a mené d'une main de fer Dix pour Cent, jusqu'à même squatter la dernière saison de Killing Eve.

Mais c'est bien dans une salle obscure qu'on la retrouve par deux fois ces quinze prochains jours, aussi bien au casting de la dernière aventure en date du Poirot de Kenneth Branagh, Mystère à Venise, qu'en vedette du second long-métrage écrit et mis en boîte par Nathan Ambrosini (le magnifique Les Drapeaux de papier), Toni en Famille, formidable dramédie intime et mâture façon portrait intense et fin d'une femme ayant dédié sa vie à son rôle d'une mère et qui, alors qu'un avenir seul à la maison se profile, se demande si elle peut reprendre sa vie en main.

Elle, c'est Antonia dit Toni, fraîchement dans la quarantaine et avec cinq ados à la maison - dont deux en passent d'aller à l'université -, une femme qui ne s'appartient plus, qui ne vit que pour sa petite smala au point de s'oublier, quand bien même un petit passé dans la musique (elle fut une ancienne star d’un télé-crochet musical, et a signé un premier single qui a gentiment marché), vient sonner à la porte de sa mémoire un peu trop régulièrement pour son bien.
Une femme qui plie devant le poids de sa progéniture et d'un quotidien écrasant, fait de tâches quotidiennes herculéennes, de petits boulots ingrats, de dettes qui peinent à régresser et d'angoisses/crises familiales qu'elle se doit d'absorber pour le bien de tous.

Une super-héroïne du quotidien constamment sur le fil qui, au milieu du tumulte familial qui la dévore à petit feu, va essayer d'enfin se retrouver, de s'émanciper un peu du tout qui a régit sa vie depuis près de vingt ans, de ne plus mettre entre parenthèses toute envie qui viendrait rompre sa dévotion maternelle - même si la culpabilité la tiraille -, d'accepter les possibilités nouvelles que peuvent lui offrir l'idée d'assouvir un de ses désirs qu'elle s'interdit.
Et c'est tout en délicatesse qu'Ambrosini va dresser les contours de cette quête essentielle, de ce refus de continuer à encaisser les coups d'une vie solitaire et à la violence sourde, de ce refus de rester enfermé dans une cage dorée domestique, de se faire inlassablement lessiver par la vie.

Une quête portée à bout de bras par une Camille Cottin extraordinaire et follement empathique (définitivement son plus beau rôle sur grand écran), en mère effacée et sous pression (psychologiquement comme physiquement) à la croisée des chemins, dont la prise de conscience vitale va peut-être la faire se délester de toutes les injonctions sociales dont elle est victime.
Dénué de tout jugement putassier, aussi doux et juste qu'il est d'une sobriété désarmante, Toni en Famille se fait une comédie dramatico-familiale touchante et nuancée, aussi intelligente qu'elle a le cœur au bon endroit.
L'une des belles surprises de la rentrée.

Jonathan Chevrier