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[CRITIQUE] : L'Arbre aux papillons d'or


Réalisateur : Pham Thiên Ân
Acteurs : Le Phong Vu, Nguyen Thi Truc QuynhNguyen Thinh,...
Distributeur : Nour Films
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Vietnamien, Français, Espagnol, Singapourien.
Durée : 2h58min.

Synopsis :
Après la mort de sa belle-sœur dans un accident de moto à Saigon, Thien se voit confier la tâche de ramener son corps dans leur village natal. Il y emmène également son neveu de 5 ans, Dao, qui a miraculeusement survécu à l’accident. Au milieu des paysages mystiques de la campagne vietnamienne, Thien part à la recherche de son frère aîné, disparu il y a des années, un voyage qui remet profondément en question sa foi.



Critique :


Dans une production d'Asie du Sud-Est où les élans contemplatifs sont presque devenus une spécialité à part entière, quand bien même ils sont tous marqués par des personnalités/sensibilités dissemblables (d'Apichatpong Weerasethakul à Lav Diaz, en passant Bi Gan, Hou Hsiao Hsien ou encore Tsai Ming-liang), fruit de cultures privilégiant traditionnellement les liens avec la nature et la communauté avant les besoins individuels; Pham Thiên Ân arrive néanmoins à brillamment se démarquer, dans sa maturité mais également dans sa manière de privilégier une mise en scène la plus suggestive et riche en sens possible, totalement dénuée de tout artifice inutile et purement organique.

Copyright JK Film

En ce sens, difficile de ne pas voir un lien de parenté - pour nous évident - entre son cinéma naissant et ceux, radicaux et mûrement conçus de Bi Gan et Lav Diaz (autant pour sa propension à enchaîner les longs plans-séquences que celle à jouer la carte de l'économie de dialogues), à la vision de L'arbre aux papillons d'or, son premier long-métrage pétri de justesse et de maîtrise, où le jeune cinéaste parvient à fusionner les contours d'une histoire réaliste et terre à terre, à des éléments sensiblement plus irréels et onirique - presque Capra-esque même.

Partant d'un pitch résolument épuré (un jeune homme désenchanté et perdu qui vit à Saigon, Thien, doit prendre soin de Dao, le fils de sa belle-sœur, qui vient de disparaître dans un tragique accident de moto), le cinéaste dessine deux voyages, à la fois physique (celui d'un retour dans le village natal du héros, pour les funérailles et trouver son frère ainé) et existentialo-spirituelle, d'un personnage qui jusqu'ici hésitait à l'entreprendre, qui jusqu'ici se laissait aller par manque de motivation, de but, de foi - un peu écrasé par la réalité perpétuelle vie -, mais qui par la force tragique du deuil et de la perte, va devoir repenser ses choix, sculpter enfin ses vraies priorités, prendre fièrement sa place dans ce tout organique et cyclique qu'est l'existence.

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Et c'est par la force de sa mise en scène (et le montage délicat qui va avec) que Pham Thiên Ân rend ce double périple en apparence banal, à la fois captivant et organique, tant il conçoit chaque plan comme un catalyseur de tout ce qui est essentiel, continuellement au service de l'action (soit un paysage qui lui dicte le moindre de ses cadres, le moindre de ses mouvements), faisant correspondre le fond avec la forme dans un tout fantastique, quand bien même la seconde absorbé assez vite la première tant l'histoire, intime, ne prend réellement de sens que dans le tout qu'est le monde, jusqu'à un dénouement aussi fabuleusement énigmatique que cathartique, paradoxalement inachevé et cohérent à la fois.
Une merveille, rien de moins.


Jonathan Chevrier


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