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[CRITIQUE] : Cassandro


Réalisateur : Roger Ross Williams
Acteur : Gael García Bernal, Roberta Colindrez, Perla De La Rosa, Raul Castillo, Bad Bunny,...
Distributeur : Amazon Prime Vidéo France
Budget : -
Genre : Biopic, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h47min.

Synopsis :
L'histoire vraie de Saúl Armendáriz, un lutteur amateur gay d'El Paso, devenu une célébrité internationale après avoir créé le personnage "Exotico", également appelé le "Liberace de Lucha Libre". Son personnage a bouleversé le monde machiste de la lutte et a changé sa vie.



Critique :


Aussi théâtrale et cynégétique soit-il, le catch, véritable sport spectacle - et encore plus depuis la main mise sur le business de la surpuissante WWE -, n'a pourtant pas réellement eu les honneurs de fictions dignes de ce nom sur grand écran, mis a part le bijou The Wrestler de Darren Aronofsky (en attendant The Iron Claw de Sean Dustin ?).
Après tout à quoi bon faire du cinoche avec un sport qui, sur le ring, fait justement du cinéma avec des combats ampoulés à l'issue aussi courue d'avance que les coups assénés ?
Avec une telle pensée, évidemment, cela ne servirait strictement à rien de se donner la moindre peine à filmer ce qui peut s'assimiler à des pros de la gonflette aux punchlines (souvent) faciles.

Et pourtant, ce serait décemment se priver de découvrir moultes figures fascinantes - surtout quand elles sont en bout de course -, d'apprendre à connaître ces hommes et ces femmes défiant la raison et dédiant leurs corps sur l'autel de l'entertainment, pour mieux électriser une foule se laissant volontairement berner par leurs " fausses " bagarres, tout en étant ébloui par leurs vrais exploits physiques - et c'est un fan qui parle.

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En ce sens, Cassandro de Roger Ross Williams, qui répond totalement au touchant et coloré documentaire Cassandro The Exotico! de Marie Losier (qui lui, avait eu les honneurs d'une sortie en salles en 2018), fait donc parti de ses pépites à ne manquer sous aucun prétexte, biopic ciblé sur Cassandro The Exotico aka Saúl Armendáriz, luchador mexicain légendaire et véritable icône gay/transgenre, roi de la Lucha Libra (la lutte est une véritable religion au Mexique) de loin la branche la plus spectaculaire du catch moderne et donc la plus exigeante pour les corps.

Si le doc de Losier sondait l'infini tristesse d'un lutteur au crépuscule de sa carrière, le premier long-métrage de fiction de Williams, lui-même documentariste, brosse un spectre un résolument plus large mais pas moins intime du luchador, un homme qui a su se nourrir des préjugés et de la violence qui a marqué son existence, pour imposer avec force et talent son exubérance (son maquillage n'étant qu'une extension/affirmation de sa propre identité), dans un petit théâtre de la démesure boursouflé par la virilité écrasante et compétitive.

De ses débuts au coeur des années 80, où il était ce qu'on appelle plus communément un jobber (un lutteur qui n'a que pour seul but de mettre over - gonfler la popularité - d'un lutteur physiquement plus imposant), en tant qu'El Topo, avant qu'il ne se réinvente en Cassandro, un véritable héros glam dont l'effervescence bouleversera les principes politiques et philosophiques de la lutte mexicaine (entre machisme assumé et conservatisme purement catholique), puisqu'il n'est pas là pour perdre; Cassandro se fait une origin story grisante dont la réussite ne se cache pas tant derrière le compte de trois dans un ring, mais bien dans la victoire derrière la victoire, le message inspirant et optimisme qui nait derrière la sueur et les larmes, qui jaillit au-delà des cordes.

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Tout en empathie et en bienveillance, quand bien même il est emprunt - narrativement - de tous les codes du biopic conventionnel à l'américaine (quitte à simplifier autant son histoire, que l'impact réel de la lutte sur les corps), Cassandro se fait in fine moins une hagiographie qu'une célébration admirative et respectueuse à la mise en scène à la fois sobre et joliment brute (avec d'excellentes séquences in-ring), totalement galvanisée par la performance émouvante et électrisante de Gael García Bernal (sa plus impressionnante de récente mémoire), aussi drôle et d'un enthousiasme furieusement contagieux, qu'il peut laisser poindre une vulnérabilité déchirante.

Il est la glue à l'humanité déchirante, d'un drame poignant sur le " Liberace de la Lucha Libre ", qui ne peine pas à nous river les épaules et le coeur au sol pour le compte de trois.


Jonathan Chevrier


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